Affaire Semenya: l'ONU critique la Fédé internationale pour le taux de testostérone des athlètes

Le Conseil des droits de l'Homme de l'ONU a critiqué le nouveau règlement de la Fédération internationale d'athlétisme (IAAF) visant à réguler le taux de testostérone des athlètes féminines et a apporté un soutien unanime à la championne sud-africaine Caster Semenya.
Dans une rare intrusion dans le monde du sport, l'organe de l'ONU a affirmé dans une résolution adoptée jeudi soir que le règlement de l'IAAF "pourrait ne pas être compatible avec les normes et règles internationales relatives aux droits de l'Homme".
Il impose aux femmes "hyper androgènes" de faire baisser, avec des médicaments, leur taux de testostérone pour participer aux épreuves internationales du 400 m au mile (1609 m).
L'ONU n'a aucun pouvoir de contrainte
La résolution présentée par l'Afrique du Sud demande aux Etats à "veiller à ce que les associations et instances sportives (...) s'abstiennent d'élaborer et d'adopter des politiques et des pratiques qui forcent, contraignent ou obligent par d'autres moyens de pression les athlètes des catégories féminines à subir des traitements médicaux inutiles, humiliants et préjudiciables pour participer aux épreuves féminines des compétitions sportives".
Le texte a été adopté par consensus par les 47 membres du Conseil, qui n'a toutefois aucun pouvoir de contrainte. L'ambassadrice d'Afrique du Sud à l'ONU à Genève, Nozipho Joyce Mxakato-Diseko, a déclaré vendredi à l'AFP qu'elle était "extrêmement contente" de l'adoption de la résolution.
"Cela signifie que pour l'essentiel, tous les membres de l'ONU sont d'accord avec nous", a-t-elle ajouté. "Caster est une femme. Personne ne peut lui dire, sur la base de (...) preuves scientifiques douteuses, qu'elle n'est pas une femme", a martelé l'ambassadrice.
Règles controversées
La Fédération internationale d'athlétisme argumente que si des athlètes ont des niveaux de testostérone masculins, il est nécessaire de "préserver l'équité de la compétition féminine" et donc de demander à ces athlètes de "réduire leur taux de testostérone avant une compétition internationale".
Triple championne du monde (2009, 2011, 2017) et double championne olympique du 800 m (2012, 2016), Caster Semenya assure être "incontestablement une femme" et a saisi le Tribunal arbitral du sport (TAS) à Lausanne pour faire annuler le règlement de l'IAAF.
La décision du TAS est attendue à la fin avril
Son taux de testostérone n'est pas connu, mais entre 2011 et 2015, l'athlète a pris des médicaments pour le réduire afin de respecter les limites imposées à l'époque.
Le TAS, juridiction suprême en matière sportive, doit rendre sa décision à la fin avril. Le Conseil a également appelé la Haut-Commissaire aux droits de l'Homme, Michelle Bachelet, à "établir un rapport sur la convergence de la discrimination raciale et de la discrimination fondée sur le genre dans le sport".
Mme Mxakato-Diseko a qualifié l'attitude de l'IAAF d'"atroce" et a estimé que Caster Semenya était visée pour des motifs "de genre et de race". Pour certains experts scientifiques, priver Caster Semenya de compétition à cause de son taux élevé de testostérone reviendrait à exclure des basketteurs parce qu'ils sont trop grands.
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