Lemaitre change de dimension

Le Savoyard a décroché la médaille de bronze du 200m ce samedi aux Mondiaux de Daegu en explosant le record de France (19''80). De quoi lui offrir une place parmi les ténors du circuit. Après sa mésaventure sur 100m, Usain Bolt a survolé les débats en signant la meilleure performance mondiale de la saison (19''40).
L’accolade est chaleureuse entre les deux hommes. A l’arrivée d’un 200m supersonique, Usain Bolt et Christophe Lemaitre se congratulent. Sur la piste bleue de Daegu, le Jamaïcain a remis les pendules à l’heure une semaine après son incroyable faux-départ sur 100m. Entre deux pitreries, « l’Eclair », toujours aussi relâché, a illuminé le ciel sud-coréen en signant la quatrième meilleure performance mondiale de tous les temps (19’’40). Dans sa foulée, Lemaitre a pulvérisé le record de France (19’’80) pour décrocher la médaille de bronze derrière l’Américain Walter Dix (19’’70). Après un départ canon, le Savoyard avait pourtant perdu du terrain dans le virage. Mais il a su puiser dans ses ressources pour s’offrir une ligne droite dantesque. Et une place parmi les plus grands sprinteurs de la planète.
« J’avais dit qu’il deviendrait un grand athlète, glisse le roi Bolt. Je ne suis pas vraiment surpris. Il est jeune. Son temps est super. Il va continuer à devenir un athlète encore meilleur. » Dans la bouche du patron, le compliment est à savourer. A 21 ans, Lemaitre a franchi un palier. Après ses titres de champion du monde juniors (en 2008 en Pologne) et de champion d’Europe (l’an passé à Barcelone), le prodige attendait la confirmation à l’échelon supérieur. C’est chose faite. Et avec la manière. Sa quatrième place pleine de frustration en finale du 100m aurait pu l’inhiber. Mais Lemaitre a su rebondir pour mieux s’envoler vers les étoiles. « C’est énorme ce qu’il a fait, admire Gilles Quénéhervé, avec qui il co-détenait le record de France (20’’16). Il est allé chercher sa médaille. Je ne le pensais pas capable de courir à ce niveau-là. Je suis très content pour lui. Maintenant, il faut qu’il aille voir plus loin avec le record d’Europe de Pietro Mennea (19’’72) ! »
Yalouz : « C'est un guerrier »
Une marque qui semble largement dans ses cordes. Mais en attendant, et avant le relais 4x100m ce dimanche, Lemaitre va déjà savourer son podium, synonyme de troisième médaille française dans ces Mondiaux (après Renaud Lavillenie à la perche et Mahiedine Mekhissi sur 3000m steeple). « Christophe a largement rempli son contrat, estime Ghani Yalouz, le directeur technique national. C’est ‘El Maestro’ ! Il l’a fait avec la manière. C’est un guerrier, un lion. Il est très appliqué et à l’écoute. Il se sent bien dans cette équipe de France. Il prend du plaisir. Il reste humble et accessible. C’est essentiel pour progresser. »
Une progression qui l’a mené à ce chrono de 19’’80, à seulement cinq centièmes du record de Carl Lewis ! « Il est aujourd’hui le n°3 mondial du 200m, résume Renaud Longuèvre, son entraîneur à Daegu en l’absence de Pierre Carraz. Il fallait qu’il le prouve. Il l’a fait. Ce n’est jamais évident. Je savais qu’il en était capable. Au niveau mondial, c’est le sprinteur qui a le plus progressé depuis les derniers Mondiaux de Berlin. On est au début du chemin. Cette médaille va lui donner encore plus d’appétit. Un jour, je pense qu’il se présentera dans un grand championnat avec l’ambition de remporter le titre. » Une perspective tout à fait envisageable si Lemaitre poursuit sur sa lancée. « Quelle est sa limite ? Je n’en sais rien », sourit Yalouz. Les JO de Londres apporteront certainement un nouvel élément de réponse l’été prochain.
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