Le foot allemand, (re)construit pour durer

Les démonstrations du Bayern Munich et du Borussia Dortmund en demi-finales aller de la Ligue des champions valident le renouveau du modèle allemand entamé il y a dix ans sur les bases de la formation à la française. Décryptage.
Le 25 mai, Wembley devrait parler allemand. Avant les demi-finales retour de la Ligue des champions la semaine prochaine, le Bayern Munich (4-0 face au Barça) et le Borussia Dortmund (4-1 contre le Real) ont mis un genou à terre à l’Espagne du football. Pas du tout surprenant au regard de la constance des équipes allemandes dans le dernier carré de la C1 depuis cinq ans (Bayern Munich à trois reprises, Schalke 04 en 2011 et Dortmund cette année) et de la présence du Bayern en finale en 2010 et 2012. Une réussite qui ne doit rien au hasard et qui récompense le travail de restructuration effectué par la Fédération allemande à la fin des années 1990.
Vieillissante, la Mannschaft s’était fait sortir en quart de finale de la Coupe du monde 98 puis dès la phase de poules (1 nul, 2 défaites) de l’Euro 2000, avec des joueurs en bout de course à l’instar du vétéran Lothar Matthäus, alors âgé de 39 ans. L’humiliation de trop outre-Rhin, où les instances vont décider alors de faire un grand ménage et de se tourner vers les modèles qui fonctionnent. En l’occurrence la France et sa fastueuse politique de formation.
Micoud : « En France, on ne met pas assez en avant le football allemand »
De manière quelque peu dictatoriale, la DFB oblige les clubs à se doter d’un centre de formation. « Il y a eu une politique d’ensemble qui a apporté une grande touche technique par le biais de nombreux joueurs étrangers avant de cultiver ça avec les jeunes joueurs des centres de formation, analyse Johan Micoud, ancien international français qui a évolué en Bundesliga avec le Werder Brême. Quand vous voyez les matches, c’est un plaisir. »
La finale de la Coupe du monde 2002 perdue face au Brésil ne fut qu’un heureux leurre qui masquait la profonde restructuration opérée en coulisses. Le fiasco de l’Euro 2004 ne fera que confirmer la nouvelle ligne adoptée par la Fédération. La Coupe du monde organisée à domicile en 2006 a, elle, pleinement participé à cette refonte avec l’essor de stades somptueux qui permettent aujourd’hui à la Bundesliga de bénéficier de la plus forte moyenne de spectateurs chaque week-end (40 000 personnes). De quoi apporter des retombées financières importantes et régulières aux clubs. « Il y a eu un creux mais ils ont réussi à se remettre en question, poursuit Micoud. Ils ne tergiversent pas. Ils ont réfléchi à une ligne de conduite et ils s’y sont tenus. Depuis 10-15 ans, toute l’Allemagne suit cette philosophie. »
Un football devenu total
Ainsi, les clubs se distinguent par une gestion saine avec un part des salaires qui ne représente que 40% de leur budget contre 60% en moyenne dans les autres championnats européens. Cette saison, 14 clubs sur 18 ont terminé leur exercice en excédent budgétaire. Un exploit comparé à la situation de Valence en Espagne, dont l’endettement est équivalent à ceux de tous les clubs allemands réunis… Le football est devenu total et les résultats arrivent.
« C’est un football super attractif et on ne le met pas assez en avant en France, regrette Micoud, fervent partisan du foot allemand. Il a fallu attendre deux matches extraordinaires en Ligue des champions pour qu’on puisse enfin en parler. » En cas de qualification de ses deux derniers représentants en finale, l’Allemagne, souvent placée mais moins gagnante, remporterait sa première Ligue des champions depuis 2001. Et validerait ainsi la mutation opérée depuis plus d’une décennie sur le modèle français. Les clubs de l’Hexagone seraient aujourd’hui bien inspirés de tourner leur regard de l’autre côté du Rhin…
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