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UFC: Ciryl Gane, une terreur à l’horizon et un Hulk à sortir

Numéro 3 du classement des lourds de l’UFC, Ciryl Gane affronte le numéro 5, le Russe Alexander Volkov, ce samedi à Las Vegas (à suivre à partir de 21h en direct et en exclusivité sur RMC Sport 2). Un choc de strikers compliqué mais qui pourrait lui ouvrir la porte du champion Francis Ngannou, son ancien partenaire d’entraînement. Et lui permettre de briller après une dernière performance critiquée par le patron de l’UFC.

Cette fois, la marche peut mener à la grande porte. Toujours invaincu en MMA (8-0), et donc à l’UFC (5-0), Ciryl Gane passe un nouveau test d’envergure ce samedi soir à Las Vegas face au Russe Alexander Volkov. Quatre mois après avoir battu Jairzinho Rozenstruik, le phénomène français déjà arrivé au troisième rang du classement des lourds de l’UFC remonte dans la cage face au cinquième du même ranking pour un "main event" (combat principal de la soirée) où une victoire pourrait le mener à un choc pour le titre. "On est dans cette thématique-là, oui, confirmait 'Bon Gamin' dans l’émission RMC Fighter Club. Quand j’ai battu Jairzinho, il était numéro 3 et on me disait de demander la ceinture. Mais je pensais qu’ils allaient me mettre un autre combat avant. Là, si je gagne, je ne pense pas qu’ils vont me faire passer par une nouvelle étape intermédiaire."

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"C’est quasiment une certitude", appuie Fernand Lopez, son coach au MMA Factory. Qui ne peut pas trop en dire plus pour l’instant mais complète: "Il serait invaincu, c’est beau pour l’affiche". Surtout si elle l’oppose à un certain Francis Ngannou, surpuissant champion de la catégorie. Le Camerounais a grandi dans la discipline au biberon de Fernand Lopez au MMA Factory, comme Ciryl Gane. Ils ont partagé des séances d’entraînement, des coaches, des camarades, qui ont souvent vu "Ciryl annuler le danger de Francis avec ses déplacements" dixit Taylor Lapilus, combattant français autre membre du MMA Factory et consultant RMC Sport. Puis Ngannou a quitté le navire parisien pour Vegas, séparation avec un fond de rancœur. Le storytelling s’écrit tout seul, évident, marketable, et l’UFC a sans doute déjà en tête les vidéos qui raconteront leur histoire croisée.

"Ça m’aurait embêté de l’affronter avant..."

Avec son large sourire qui ne le quitte jamais, le possible futur challenger ne s’en cache pas quand on lui demande réagir au sacre de Ngannou fin mars: "Je suis content qu’il ait eu la ceinture car ça m’aurait embêté de l’affronter et qu'on se mette des bâtons dans les roues avant un combat pour le titre par rapport à tout ce qu’on sait. Franchement, sa victoire m’a fait chaud au cœur. J’étais super content, surtout quand j’ai vu la vague sur les réseaux de ces fameuses vidéos en Afrique et un peu partout. J’ai senti vraiment que ce n’était pas que pour lui mais pour plein d’autres choses. Un truc super bon que je n’avais ressenti pour aucun autre champion. Ça me donne envie de faire la même chose pour la France. Il n’y a aucune animosité. Noooon. Vous me connaissez, il n’y en aura jamais. Ça aurait aussi pu ne me faire ni chaud ni froid mais ça m’a vraiment fait plaisir. Les images m’ont fait plaisir."

La véritable opposition de style entre le striker destructeur Ngannou et le striker plus danseur technicien Gane fait saliver. Elle s’anticipe, aussi. Fernand Lopez avoue vouloir "durcir" le striking de son protégé maintenant que les choses très sérieuses arrivent. Manager de l’équipe de France olympique, John Dovi a observé le combattant UFC lors d’un sparring avec Mourad Aliev, qualifié pour Tokyo chez les super-lourds, ces dernières semaines. "Fernand Lopez est en train de préparer ça: Ciryl gère bien l’espace mais Francis est un monstre, un raz-de-marée, et c’est pour ça aussi qu’il a besoin de se parfaire dans cette notion de face-à-face. Ça jouera un grand rôle dans un tel combat." On pourrait imaginer le choc forcément électrique pour la fin d’année, voire le début de la suivante.

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Si la situation sanitaire permettait aux jauges des enceintes françaises un 100%, on rêve bien sûr de le voir à Bercy, et même à cinq heures du matin s’il faut satisfaire à la diffusion US. Peu importe l’heure, la salle serait pleine. Bouillante. Il faudra d’abord battre Volkov, tout sauf une mince affaire tant le bougre est coriace, et voir Ngannou défendre sa ceinture contre Derrick Lewis, qui l’avait battu en 2018 dans un des pires combats de l’histoire de l’UFC, sans doute en septembre. Pas grave, Ciryl n’est pas pressé. "Je me dis qu’on est en position pour dire: 'Les gars, on attend'. J’attends un deuxième enfant pour le mois d’août, une autre fille. Du coup, on va prendre le temps pour ça et pour ce fameux cycle de force dont on parle depuis deux-trois ans mais pour lequel je n’ai jamais eu le temps car j’enchaîne les combats. On va prendre le temps avant le prochain combat. Si je gagne, bien sûr." Pour s’en assurer, Gane répète qu’il a préparé "une version 3.0 de lui-même".

"On ne va pas se mettre le couteau sous la gorge"

Pour plaire à Dana White, très critique après sa victoire sur Rozenstruik? Si vous connaissez le bonhomme et sa décontraction face aux événements, vous savez déjà qu’il s’en fiche. "Ça ne m’a pas impacté dans mon état d’esprit, avance le combattant français. Je sais ce que j’ai à faire le jour du combat. Je suis très au courant de ce qui se passe autour de moi et je ne suis pas surpris. Le mec, c’est un businessman. On sait bien ce qui fait tourner son entreprise donc c’est compréhensible. Quand tu te mets dans la peau du fan qui aime l’action mais qui ne connaît pas trop les arts martiaux et qui se met à regarder l’UFC pour voir des KO, lui non plus n’est pas content. Par contre, les gars qui aiment les arts martiaux et le MMA, ils kiffent et se disent que c’était une belle prestation."

Ciryl Gane à l'entraînement en mars 2021
Ciryl Gane à l'entraînement en mars 2021 © Icon Sport

Une démonstration de supériorité et de contrôle cinq rounds durant. "Il a annulé le mec, rappelle Taylor Lapilus. Tu regardes le combat, tu ne sais pas si Rozenstruik est fort ou pas. Tu te dis: 'Punaise, ils sont partis prendre le vigile du supermarché d’à côté'." White avait jugé la performance pas assez spectaculaire à son goût, coup de sang surtout né d’une soirée très pauvre en show qu’il espérait voir sauvée par un bang entre les deux lourds. "On connaît Dana, reprend notre consultant. C’est un mec qui parle sous le coup de l’émotion. Il fait des déclarations choc, ce n’était pas sa première et ce ne sera pas sa dernière. Il s’attendait juste à plus de spectacle. Mais produire cette prestation-là, faire ça à un mec comme Rozenstruik, il y a peu de mecs qui sont capables de ça."

Allez, après tout ça, pas envie de ce gros KO qui tournerait en boucle sur les réseaux sociaux et donnerait un sourire extra au patron de l’UFC? "Quand tu me parles de ça, je dis oui car il y a les followers sur Instagram qui vont avec, la prime de combat qui va avec, donc oui j’aimerais bien mettre ça, sourit Gane. Mais si tu me dis que je dois chercher ça absolument, que ma prochaine stratégie doit être uniquement sur ça… On a prouvé qu’on arrivait à faire de belles choses en peu de temps. Si ça doit venir, ça viendra, mais on ne va pas non plus se mettre le couteau sous la gorge. Ça peut aussi peut-être me pousser à la défaite." Pieds sur terre, toujours.

Mais même sans le chercher, ce bang pourrait bien venir contre Volkov, grande tige de plus de deux mètres et ancien karatéka à la boxe plus classique, en ligne, qui présente un style parfait pour voir briller ce (très) gentil garçon, toujours bien dans ses baskets et qui met les autres bien dans les leurs, mais qui sait aussi se transformer. "Je voulais ce combat, explique Fernand Lopez, car après ces critiques, il me fallait quelqu’un qui puisse pousser l’homme vert à sortir de l’intérieur de Ciryl. Il y a un Hulk qui se cache en Ciryl, qui ne sort que quand il est en colère, quand il est bousculé. Je l’ai déjà vu en mode ‘animal’ sur le combat contre Adam Dyczka au Canada (son deuxième en MMA, septembre 2018, victoire sur TKO, ndlr). Il était diminué, il avait un seul poumon, un orteil cassé, mais j’ai vraiment senti ce Hulk sortir de lui, une personne que je ne reconnaissais pas. Dans son regard, je voyais de la méchanceté, il voulait finaliser le mec. Il était prêt à mourir et c’est ce mec-là que j’ai envie de voir contre Volkov."

"Volkov va sortir un Ciryl que tout le monde va kiffer"

A priori, c’est l’idée. "Dans la manière de s’entraîner, alors qu’il ne tape que sur moi ou sur Paulin Begai avec les pattes d’ours, tu vois qu’il y a l’intention de faire très, très mal. On l’a conditionné." Et ce dès le "gameplan" initial à l’annonce du combat. "Je lui ai écrit, poursuit son coach, en lui disant: 'J’ai une mauvaise nouvelle pour toi: tu vas prendre des coups, tu vas voir très mal. Mais j’ai une bonne nouvelle pour toi: si tu acceptes de prendre les coups, de les bloquer, tu vas le coucher car il est ouvert, il va faire une erreur. Si tu acceptes d’arrêter de jouer et de durcir un peu le jeu, tu vas le descendre. Voilà l’état d’esprit."

Les mots suivants tombent comme une prédiction: "C’est intéressant. Volkov, avec sa taille, sa manière de boxer, va sortir un Ciryl que tout le monde va kiffer. C’est parfait comme match-up. Les mauvaises langues un jour vont toujours exister, et dans un sens on a besoin d’elles. Ça ne me dérange pas. Mais c’est bien de montrer le Ciryl qui peut être striker, grappleur, lutteur, bagarreur, se faire plaisir dans tous les départements." Dana White devrait apprécier. Du côté de Francis Ngannou, on regardera ça d’un œil intéressé.

https://twitter.com/LexaB Alexandre Herbinet Journaliste RMC Sport