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Wimbledon : Marcus Willis, prof de tennis à 30 Livres de l'heure, va affronter Federer

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Improbable 772e mondial, quasi retraité, licencié à Capdenac (Aveyron), Marcus Willis affrontera Roger Federer au deuxième tour de Wimbledon mercredi sur le fameux « Centre Court ». Le point d’orgue d’une fabuleuse histoire pour cet Anglais de 25 ans à la bouille sympathique.

Aujourd’hui, Philippe Perrier, Mayron Riols ou encore Walter Rodriguez – tous trois classés à 3/6 – doivent totalement halluciner. Marcus Willis, le numéro 1 de leur équipe de Capdenac (Aveyron), qui évoluait ce printemps en DN3, va défier mercredi Roger Federer.

Si l’Anglais est venu arrondir ses fins de mois sur les bords du Lot (46), c’est parce qu’il était sans le sou. « Pour son premier match à Bayonne, il avait six raquettes dans son sac, seulement deux cordées et même pas de serviette, a raconté à Tennis Actu Mathieu Desroches, le président de Capdenac. A notre retour, on a discuté et on lui a expliqué qu’au club, quel que soit le niveau, tout le monde avait une serviette, des raquettes cordées et une bouteille d’eau dans son sac. Cela lui a fait un petit choc. »

Relancé par un coup de foudre

Bon junior mais (trop) bon vivant, il était monté à plus de 100 kilos. Sans résultats, ce gaucher talentueux de 26 ans avait quasiment décidé de prendre sa retraite. Un poste de prof l’attendait à Philadelphie. C’était sans compter sur une rencontre avec une dentiste. Le coup de foudre. La demoiselle est suffisamment persuasive pour lui faire comprendre qu’il n’est pas fini. Qu’il a encore de l’avenir.

Il bosse dur pour perdre du poids mais il manque l’étincelle. Ou le coup de bol. Un Anglais retenu dans un tournoi en Tunisie et le voilà admis en dernière minute pour des play-offs qui offrent une wild-card pour les qualifications de Wimbledon. Il avale ces trois matches puis les trois autres sur le gazon de Roehampton. Le voilà dans le tableau final du Championships. L’histoire était déjà belle pour le 772e mondial. Mais elle a pris une tout autre tournure avec un succès épatant face au Lituanien Ricardas Berankis, terrassé en trois manches (6-3, 6-3, 6-4) au premier tour du tableau principal, gavé par les slices de ce Briton euphorique, galvanisé par l’atmosphère délirante du court 17.

Prof, il prend 30 Livres de l’heure

Convié dans la grande salle d’interview, Marcus Willis a fait preuve d’un sérieux sens de l’humour, détaillant son habituel emploi du temps du lundi au Warwick Boat Club. « J’ai les mini-rouges de 16 à 17. Puis un môme de 14 ans et je crois que c’est Ben Cleary de 18 à 19h. Mais je fais aussi les mamies d’autres jours… » Et pour une leçon individuelle ? « C’est trente Livres de l’heure », sourit-il. Un tarif qu’il va pouvoir augmenter car désormais on prendra un cours avec le mec qui a joué Federer.

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A moins que ce tournoi ne marque un nouveau départ. Assuré d’empocher au moins 50 000 Livres – « un peu plus que mes gains de cette année » -, il va peut-être repartir sur le circuit avec un autre état d’esprit. Un conciliabule avec sa petite amie va s’imposer. D’ailleurs, lundi, la fameuse Jennifer a pu se libérer comme par enchantement pour assister à l’exploit de son chéri. « Ce matin, elle m’a envoyé un texto en m’apprenant que les équipements de son cabinet dentaire étaient tombés en panne », racontait Marcus Willis.

« Je ne pense pas que Federer ait joué le Future d’Hammamet »

Va-t-elle abandonner sa clientèle pour le choc face à Federer ? Un deuxième tour que le Suisse accueille avec une vraie joie. « C’est l’une des plus belles histoires de notre sport depuis bien longtemps » a-t-il indiqué. Fouler le Centre Court ou le 1, Marcus Willis en avait sûrement rêvé quand il était un bon junior. Là, il va vivre un conte de fées.

« Si j’ai déjà parlé à Roger Federer ? Non, je ne pense pas qu’il ait joué le Future d‘Hammamet en Tunisie (le seul tournoi professionnel dans lequel il s’est aligné cette année, ndlr). Quand j’étais junior, je l’avais croisé. Il était poli. Mais je n’avais pas entamé de discussion. » Finalement, huit ans après, c’est tellement mieux de dialoguer raquette en main avec le septuple vainqueur sur le gazon londonien…

Eric Salliot