Bellator 288: Pitbull-Nurmagomedov, une affaire de famille (et de légitimité)

Être à la hauteur de l’héritage familial et légitimer sa place au sommet. Pour Patricky "Pitbull" Freire et Usman Nurmagomedov, opposés ce vendredi à Chicago pour le titre des légers dans le co-main event du Bellator 288, où le combat principal mettra le champion Vadim Nemkov face à Corey Anderson pour la couronne des mi-lourds, les enjeux du choc se rejoignent. Le premier, qui défend pour la première fois la ceinture gagnée en battant Peter Queally par TKO au deuxième round lors du Bellator 270 à Dublin en novembre 2021, est le grand frère de Patricio "Pitbull" Freire, actuel champion des plumes dans la même organisation.
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Numéro un du classement pound-for-pound (toutes catégories confondues) de cette dernière, Patricio est aussi considéré par la plupart des spécialistes comme le plus grand combattant de l’histoire du Bellator. De l’autre côté, le nom Nurmagomedov renvoie forcément à un prénom: Khabib, l’une des plus grandes légendes de l’histoire du MMA, parti à la retraite invaincu et avec la ceinture des légers de l’UFC autour de la taille. Usman, lui aussi pour l’instant intouchable en carrière (15-0; 24 ans), est son jeune cousin. Des traces dans lesquelles il n’est pas facile de marcher. Surtout quand on fait face à des procès en légitimité.
Pour le plus vieux des Pitbull (36 ans; 24-10), il vient de son chemin vers le titre. Le champion avant lui? Son petit frère, de mai 2019 à octobre 2021, date à laquelle il abandonne cette ceinture pour se concentrer à plein sur la reconquête – mission accomplie en avril dernier – de celle des plumes abandonnée à A.J. McKee en juillet 2021. Derrière, son frangin se voit offrir une chance pour le titre (il en avait déjà eu une contre Michael Chandler en juin 2016, pour une défaite par KO au premier round) vacant face à Queally alors qu’il reste sur… deux défaites, dont une sur arrêt médical contre le même Irlandais. Pas l’idéal pour être approuvé par les fans.
"Beaucoup de gens disent que je ne suis pas le vrai champion car mon frère a abandonné la ceinture, confirme l’intéressé au micro de CBS Sports. Comment peuvent-ils dire ça? J’ai battu Peter Queally, je l’ai terminé au deuxième round. Pourquoi je ne serais pas le champion? Je suis le vrai champion et je vais le montrer à tout le monde le 18 novembre. Répondre à ces gens est quelque chose qui me motive tous les jours." "Ça n’a pas d’intérêt à ce point, complète son challenger quand on l’interroge sur la question. Il y a un champion et si les gens n’aiment pas que ce soit lui, je peux les rassurer, ça va bientôt changer."
Pour Nurmagomedov, la question de la légitimité entoure son nom. Pitbull pense qu’il doit sa chance pour le titre à ce patronyme si parlant dans le MMA. "Je ne crois pas qu’il mérite cette opportunité. Si le Bellator le met contre moi, allons-y! Mais il y a Benson Henderson, Tofiq Musayev et beaucoup d’autres qui méritent cette chance. Qui a-t-il affronté pour la mériter?" L’argument s’entend quand on sait que le garçon affiche un bilan de 4-0 au Bellator mais n’a battu aucun membre du top 10 du classement des légers avant de se retrouver numéro 1 et challenger officiel.
Comme Islam Makhachev, accusé par certains d’être "pistonné" par coach Khabib avant d’oblitérer Charles Oliveira pour la ceinture des légers de l’UFC, Usman doit prouver que sa relation familiale avec son cousin superstar n’est pas la raison de sa présence à ce niveau. Et comme Makhachev, dont il est un des principaux sparring-partners, il a le niveau pour monter sur le trône et faire taire les critiques. Excellent au sol, comme tout bon Daghestanais qui se respecte, Nurmagomedov présente un striking (combat debout) de plus haut niveau que celui de son cousin: il a vite suivi dans sa jeunesse les pas de son grand frère Umar, aujourd’hui combattant à l’UFC, pour se former au muay thaï en plus de la lutte libre, auxquels il ajoutera le sambo après avoir déménagé à Makhachkala pour rejoindre le camp Eagles MMA de son oncle Abdulmanap, papa de Khabib décédé à l’été 2020.
Bref, Pitbull va devoir affronter un combattant complet. "Ses coups de pieds sont très bons, pointe le Brésilien. Il est très calme et il a bien sûr une excellente lutte et un super grappling. Il est très dangereux, c’est certain." Et désormais, c’est sous les ordres de Khabib que le combattant du Bellator se prépare. Avec la charge de travail attendue. "Avec lui, tu t’entraînes deux heures de suite et tu ne peux pas t’arrêter, témoigne Usman en souriant. S’il te voit t’arrêter, il peut même te virer de la salle. Il te dit: 'Si tu veux te reposer, tu peux rentrer à la maison et le faire là-bas, ta mère peut te servir un thé et tu peux rester tranquille. Mais si tu veux t’entraîner, ça se passe à la salle.'"
Avec un tel régime sportif, Nurmagomedov compte perpétuer la tradition familiale et devenir le premier champion du Bellator venu du Daghestan. Il pourra compter sur ses nombreux supporters, qui n’hésitent pas à harceler Pitbull sur les réseaux sociaux. "Ces fans russes n’ont rien à faire de leur vie, s’en amuse le Brésilien. C’est peut-être à cause du froid, qui les pousse à boire de la vodka et à passer leur temps à m’envoyer des messages." "Ils croient en moi, c’est un honneur de les voir me soutenir et la ceinture sera pour eux", répond Nurmagomedov. Nul doute qu’il plairait à ce dernier d’être couronné sur une soumission, marque de fabrique des combattants de son pays, après avoir terminé ses deux derniers combats sur étranglement. "Je sais étrangler les gens, lance-t-il comme une prémonition. C’est mon travail." Pitbull et Nurmagomedov ne se disputent pas seulement un titre. A Chicago, avec l’ombre familiale en fond, ils ont aussi des choses à prouver.