
Mbappé, la FFF, le PSG... l'interview intégrale de Platini chez Rothen s'enflamme sur RMC
Michel Platini, que faites-vous aujourd’hui ?
"J’ai 67 ans. Je suis à la retraite. Je me suis retiré de toutes les affaires. J’ai déménagé à Cassis l’année dernière. Comme je suis né dans un café, j'ai toujours aimé avoir un restaurant. Il y a eu une opportunité. J'ai eu cette opportunité du Bistrot de Nino à Cassis. On a une belle équipe. Je m'en occupe. Dans l’actualité du foot, c’est un peu plus difficile de se passionner avec la pandémie, la guerre… J’ai un peu lâché. J’avais d’autres centres d’intérêt que le football. J’ai pris un peu de recul."
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Vous êtes moins passionné?
Je suis passionné par le jeu et par les joueurs. Mais le jeu et les joueurs, je les ai quitté il y a trente ans, parce qu'après j'ai fait plus de la politique que du football. Tout ce qu'il y a autour, je le lis moins, ça m'intéresse moins. En revanche, le joueur, je le regarde, et je m'enflamme toujours pour un joueur.
Le football français est pas dans la meilleure forme. Avez-vous la sensation de manquer au football ?
C'est difficile parce d'abord je ne suis pas jeune, et aussi j'ai tout fait. J'ai fait votre boulot, j'ai été commentateur à la télévision, j'ai été sélectionneur, j'ai été vice-président de Nancy, j'ai été joueur, j'ai été président de l'UEFA, vice-président de la FIFA. Il me faut quelque chose de nouveau, qui me plaise pour que je me relance quelque part. J'ai pas mal d'idées.
Pourriez-vous briguer la présidence de la FFF ?
Je n'étais pas préparé à cette question. C'est compliqué, il faut aller aux élections, bouger, aller voir les gens, avoir un programme... J'ai été vice-président de la fédération française de football, j'ai été président de l'UEFA donc je connais tout ça. Mais écoutez, pour l'instant il y a un président (Noël Le Graët) donc on verra. Si l'idée de devenir président vient de moi-même non, si on vient me chercher, il faut réfléchir. Je ne demande pas à ce qu'il y ait un mouvement populaire, je ne demande rien. J'ai du recul sur toutes ces choses, je ne sais pas. Ne m'embêtez pas avec ces questions.
Et un poste de président de club ?
Non. Je n'ai plus envie d'aller le mercredi et le samedi (x3), voyager, revenir à minuit, revenir, repartir et gérer des joueurs.
Dernièrement, on vous a proposé quelque chose?
On m'a proposé plein de choses mais je n'ai pas trouvé celle qui me plaisait.
Le poste de président de club, on vous l'a proposé?
Oui.
Où ça?
Quelque part.
Dans un de vos anciens clubs?
Non. On m'a proposé de faire de la télé, de la radio, commenter des matchs, commenter la Coupe du monde. On m'a proposé beaucoup de choses mais bon, j'ai fait tout ça et je ne pense pas que ce soit le moment de recommencer à le faire. Je l'ai fait il y a 30 ans quand j’avais 40 ans.
Mais vous avez toujours envie de faire quelque chose?
Je vous ai dit que s'il y a quelque chose qui me plait et qui me plairait énormément, je le ferais.
Est-ce que vous avez au fond de vous l'envie de ne pas terminer sur cette image négative et ce qu'il s'est passé?
Il n'y a aucune image négative.
Vous méritez une fin de carrière dans le football autre que ce qu'il s'est passé à l'UEFA et à la FIFA avec l'épisode judiciaire ?
Peut-être. Mais l'épisode judiciaire, vous verrez qu'à l'arrivée, c'est moi qui vais gagner. Je vous rappelle que je suis suspendu de personne mais je suis libre de travailler dans ce que je veux dans le football.
Est-ce qu'aujourd'hui, un vestiaire fonctionne de la même façon qu'à votre époque?
Ça fait longtemps que je ne suis pas allé dans un vestiaire. C'est un lieu d'histoire entre les hommes. Des histoires de vies, de victoires et de défaites et des liens s'y font pour l'éternité. Dans un vestiaire, c'est les seuls liens qui durent pour l'éternité je pense. On est toujours copains avec nos copains de vestiaire. Pour moi il s'est passé 40 ans mais avec les autres, ce n’est pas la même chose. Les résultats sont passés mais les copains restent. Moi j'ai toujours des relations avec tous mes copains pratiquement. Pas que ceux de la Juventus, de Nancy ou de Saint-Etienne. Il y a aussi les copains de l'Armée, des Espoirs chez qui j'ai joué un match avec Rolland (Courbis, ndlr). Il y avait un axe central Courbis - (Bernard, ndlr) Gardon, ils ne me donnaient jamais le ballon, ils tapaient toujours loin devant. Mais je pense que le vestiaire d'aujourd'hui est beaucoup plus compliqué qu'à notre époque. On n'avait pas de transferts tous les huit jours, on parlait tous la même langue. On restait plusieurs années dans la même équipe, tu créais une équipe, tu rapportais des joueurs dans une équipe qui existait. T'avais un groupe. Aujourd'hui, ça va, ça vient, ça part. T'achètes, tu vends. C'est le football d'aujourd'hui. C’est le business d'aujourd'hui. Si tu n'achètes pas, tu vends pas, tu vis pas. Le système est mal foutu.
Que vous inspire le vestiaire du PSG ? Vous pensez que c'est un problème d'ambiance de vestiaire les désillusions années après années?
Non pas du tout. Je n’ai pas vu le match aller contre le Real Madrid mais j’ai vu le match retour. J'ai trouvé que Paris avait bien joué. Ils ont commis trois erreurs : le gardien (Donnarumma), Marquinhos et une erreur collective. Sur le 2e but de Benzema, il y a six joueurs autour de lui. Il est tout seul, personne ne le marque. Ce sont ces trois erreurs qui ont fait perdre le PSG. Ce sont des détails. Après on peut "bla bla bla", parler de psychologie... En revanche sur le match de Monaco, là j’ai senti qu’il y avait un petit problème. Je pense que le problème Monaco vient des sifflets du Parc (face à Bordeaux, ndlr). Quand dans ton stade, devant ton public, tu es sifflé par tes supporters, c’est très compliqué.
Les sifflets, vous les comprenez?
Les sifflets, on les comprend mais c'est compliqué. Un joueur est un être humain, il a une âme, une réflexion. Il se dit: " Qu'est-ce que je viens faire ici? Pourquoi je joue, pourquoi je me fais siffler chez moi, devant ma famille alors que je défends mes couleurs". C'est le match de Monaco qui m'a perturbé, plus que le match du Real. Ils ont perdu contre le Real Madrid hein, ils n'ont pas perdu contre Nancy. Ils ont fait trois erreurs, point final. Et après tu vas chercher des raisons psychologiques sur le vestiaire, sur la morale... Non, moi je n'y crois pas, ils sont habitués au très haut niveau.
Mais cela se répète au Paris Saint-Germain.
Oui mais ce ne sont pas les mêmes équipes, les mêmes joueurs. Ça ne se répète pas, là c'est plusieurs erreurs, voilà. C'est tout. Donnarumma n'a jamais fait une erreur comme ça. Marquinhos, depuis dix ans qu'il joue au PSG, il n'a jamais fait une erreur comme ça de remettre le ballon au milieu du terrain. Ça s'est passé ce soir-là, ça ne se passera plus.
Comprenez-vous les sifflets contre Lionel Messi ?
Lui aussi les comprend mais ça fait mal. Moi aussi j'ai été sifflé au Parc des Princes. Mais je n'ai jamais été sifflé ni à Saint-Etienne, ni à la Juventus.
On a le droit de siffler une légende comme Léo Messi?
On a le droit de siffler. Le client est roi. Moi je ne le ferais pas. Tout le monde a le droit de siffler, d'insulter... Le terrain de football est un exutoire. On a le droit mais tu le vis mal. Léo est venu pour faire plaisir à Paris. Il y avait peut-être d'autres équipes qui le voulaient. C'est très dur. Je pense que les joueurs de Paris ont vachement souffert de ça lors du match à Monaco.
Messi a-t-il fait une erreur en signant au PSG ?
Premièrement, il fait ce qu’il veut, c'est lui qui décide de sa vie. Maintenant c’est vrai que c’est l’enfant de Barcelone comme Ronaldo était l’enfant de Madrid. Ils ont décidé de partir. Je peux me mettre à leur place. Moi quand j’ai quitté la Juve, j’ai arrêté. J'avais 32 ans. Barcelone et l’OM me voulaient. C’est compliqué pour un joueur comme Léo, quand tu arrives à 34 ans, tu sais que tu vaux un patrimoine, tu vaux cher. Mais est-ce que tu vas jouer aussi bien que par le passé? Je me suis posé cette question, je savais que je ne jouerai pas aussi bien que par le passé alors que j’allais gagner plus d'argent que dans le passé. C’est compliqué. Agnelli m’a demandé : "Tu restes avec nous?" J’ai dit non, j’arrête. Lionel a choisi d’avoir un nouveau challenge. C’est bien pour le football français qu’il soit venu jouer en France. Mais il ne jouera jamais aussi bien qu’il y a 5-6 ans.
Question d'un auditeur: Qui est le meilleur joueur entre Maradona et Zidane à vos yeux?
Je pense qu'on ne se pose jamais la question de qui était les meilleurs entre les Beatles et Edith Piaf. Je pense que Zizou a été le meilleur de sa génération et Maradona l'un des deux meilleurs de sa génération. C'est tout. Je pense que c'est comme Pelé dans sa génération. Comparer les joueurs c'est impossible. J'ai joué ni contre l'un ni contre l'autre.
Parlons de Kylian Mbappé. Quel regard avez-vous sur son niveau ?
On a vécu 15 années extraordinaires avec deux joueurs exceptionnels qui ont tout gagné, Ronaldo et Messi. Il est en pole position pour le futur. L'avenir est devant lui, il peut tout gagner. Il est le joueur qui devrait être la future grande star des années à venir.
On le sent focalisé sur cet objectif là...
On ne vit pas sur les titres quand on a 60 ans, on vit sur le charisme qu'on a donné aux supporters et aux spectateurs. Je ne connais pas Kylian, je ne l'ai jamais rencontré de ma vie. Mais je lis certaines choses. C'est vrai qu'il veut tout gagner. C'est bien qu'il veuille tout gagner. Moi aussi je voulais tout gagner mais je ne le disais pas (rires). C'est le meilleur joueur français actuellement. Il a tout pour être le meilleur, pour être Ballon d'or plusieurs fois.
Est-ce que dans le jeu il n'est pas l'illustration de l'évolution dans le foot avec des qualités différentes des vôtres? C'est le un témoin que le jeu change?
Aujourd’hui, le football a évolué d'une telle façon que les gens peuvent jouer avec leurs qualités, ce qu'on n'avait pas à notre époque. Moi j'avais toujours un mec sur le dos en marquage individuel tout le temps. Aujourd’hui je n'ai pas vu Messi, Mbappé ou Ronaldo pris en marquage individuel. Ça change, c'est nouveau, les entraîneurs en face faisaient attention à ne pas que tu développes tes qualités. Quand on voit les espaces qu'ils laissent à Kylian, c'est se tuer. Maintenant ils vont commencer à faire attention à lui. Si tu laisses des espaces ou des "un contre un" à Kylian, à l'arrivée tu perds le match.
Dans quelle position vous le préférez?
Aujourd'hui, on se focalise sur sa vitesse. Pour utiliser sa vitesse, il faut qu’il ait des bons passeurs à côté. Neymar et Messi donnent de très bons ballons. Mais s’il n’a plus ces joueurs-là près de lui, il faudra qu’il ait d'autres qualités, qu'il soit plus égoïste et plus individualiste pour se créer des occasions. Aujourd’hui, il a beaucoup plus que des qualités physiques. Il a la vision, le jeu de tête, les deux pieds. Pour l’instant on focalise sur la vitesse.
Il est en fin de contrat. Quel conseil lui donneriez-vous pour son avenir?
Il faut qu'il fasse ce dont il rêve, ce qu'il a envie de faire. Il est en fin de contrat. Je pense que c'est bien qu'un joueur soit en fin de contrat.
Aller jusqu'au bout de son contrat, ça montre qu'il veut aller voir ailleurs?
C'est bien qu'il aille jusqu'à la fin de son contrat. Avec Rolland (Courbis, ndlr), on a fait grève dans les années 70 pour que les joueurs aient des contrats à temps, parce qu'avant c'étaient des esclaves des clubs. Moi je suis allé à la fin de mes contrats tout le temps, et tu peux décider ce que tu veux! Kylian peut faire ce qu'il veut, il décide.
Il a plus de chances d'avoir le ballon d'Or au Real?
Je n'ai pas de ressenti. S'il est bon, il aura le ballon d'Or.
Quel regard portez-vous sur l’évolution de l’équipe de France ?
J’ai été sélectionneur donc je me fie au sélectionneur. J’ai une entière confiance en Didier (Deschamps), je ne me pose pas les questions. Il a prouvé qu’il était un très grand sélectionneur, il a gagné la Coupe du monde. Il connait le groupe beaucoup mieux que moi. Je regarde le match comme un supporter.
Si vous êtes président de la FFF, vous le gardez ?
Il faut que je vois avec Zinédine (rires).
Noël Le Graët dit que Zidane sera sélectionneur de l’équipe de France un jour…
C’est la logique.
Il sera un bon sélectionneur ?
Ce sera un bon sélectionneur s’il a de bons joueurs.
Ce sont les joueurs qui font tout?
Oui, regardez. Ils font un parcours sans faute à la coupe du monde, vous avez dit que Didier était bien. Après on l'a critiqué parce qu'ils ont perdu le match en menant 3-1 (contre la Suisse à l'Euro, ndlr). Si les joueurs gagnent le match, ça reste un très grand entraîneur. Je pense que Didier sait les choses, connaît son métier.
Il n'est pas le seul responsable de ce qu'il s'est passé à l'Euro, c'est aussi un problème de mentalité.
Didier est venu dans une situation dans laquelle il a beaucoup de stars à gérer, ce qu'il n'avait pas avant. Les statuts ont évolué. D'un moment à l'autre, c'est différent à gérer. Tu deviens plus psychologue que sélectionneur.
Gérer les ego, c’est difficile?
C’est compliqué. Tu dois gérer la personnalité des gens, il y a des sensibilités différentes. Il faut gérer. Quand j’étais sélectionneur, j’avais quelques cas à gérer, notamment les deux attaquants, Papin et Cantona, ce n’était pas très simple. Quand tu es sélectionneur, il y a des choses que tu peux dire à certains joueurs et pas à d’autres, des choses à dire en aparté ou non. Tu dois connaître le caractère du joueur et lui expliquer les choses en fonction de ça. Il faut être réfléchi et dire les choses au bon moment. Ce n’est pas facile d’autant que toi tu es sélectionneur, tu as tous les joueurs français donc tu dois choisir.
Quel est le plus difficile entre être entraîneur et être sélectionneur ?
Ça doit être le poste d’entraîneur puisque je ne l’ai pas été. Je ne vais pas prendre des métiers difficiles, ça ne va pas ou quoi ? (rires)
Tu es invité au Stade Vélodrome pour France – Côte d’ivoire ?
Non. Je ne sais pas pourquoi. Je n’ai peut-être pas fait suffisamment de choses pour le football français pour être invité.
Tu n’as pas de relations avec les gens de la Fédération Française de Football ?
Non.
Dans les affaires auxquelles tu as fait face, tu n’as pas eu de soutien de la part de Noël Le Graët, président de la FFF ?
Il n'a pas pris position, il a pris ma place. J'étais vice-président de la FIFA, qui sait qui est membre à la FIFA maintenant? Chacun à sa moralité, ça ne me dérange pas.
Estimez-vous qu’il y a un manque de reconnaissance envers les anciens joueurs globalement?
C'est très français. A l'étranger, il n'y a pas ça. Même quand un président de club vient, il oublie le passé, les anciens joueurs, les anciens dirigeants.
Mais revenons au rôle de sélectionneur et d’entraîneur. Je n’aurais jamais été entraîneur. J’ai arrêté le football en 87, je suis devenu sélectionneur en 88. Ce n’était pas prévu mais on m’a sensibilisé, je suis arrivé comme ça. La France n’était pas bien, on m’a demandé d’être sélectionneur, je ne pouvais pas refuser. En revanche, être entraîneur d’un club, non. J’ai arrêté le football à 32 ans, c’est pour pas être entraîneur à 33 ans.
C’est de l’usure?
Oui. Pourtant on m’a proposé d’être entraîneur du Real Madrid à l’époque où l’on gagnait tous nos matchs avec l’équipe de France. Entraîneur c’est une vocation, c’est 24h/24, 7/7, 365 jours par an. Quand j’étais sélectionneur, moi j’avais un match, on gagnait et j’étais tranquille deux mois.
Vous, l’ancien Vert, auriez-vous pu être entraîneur de l’OL?
Oui.
Vous verriez donc d’un bon œil la possible arrivée de Zinédine Zidane au PSG alors qu’il est de Marseille?
Zinédine fera ce qu’il voudra faire. Ça ne me choquerait pas, ça ne me dérangerait pas. Après peut-être pour les supporters marseillais... Je ne suis pas supporter marseillais ou parisien. Les rivalités, il faut que ça entraîne dans le positif, pas dans le négatif. La rivalité c’est bien parce que ça donne du piment. Moi, ma rivalité c’était Nancy-Metz.
Donc entraîner Metz ça ne t’aurait pas dérangé?
Non pas du tout. Parce que j’aurais voulu jouer à Metz même, ils ne m’ont pas voulu.
Vous avez été un opposant au VAR. Etes-vous toujours contre?
Dans l'absolu oui. Ça règle des problèmes, ça créé d’autres problèmes, ça en déplacent… Si je fais partie du jeu, je suis dans un club et qu’un arbitre fait une erreur, je dirais: "Mais il fallait mettre la VAR" mais quand tu réfléchis sur ce qu’est le football, je pense qu’au niveau philosophique, l’arbitre fait partie du jeu et que l'erreur de l'arbitre fait partie du jeu. Un arbitre a le droit de louper une décision comme le gardien qui fait une erreur, comme l’attaquant qui a le droit de louper un but. Mais j’avais dit à Sepp Blatter qu’il avait fait une erreur quand il avait instauré la Goal Line Technology parce que "tu ne sais pas où ça va s’arrêter". Il est là le problème. Dans l'idéal, on devrait mettre la VAR sur les lignes, ce que l'arbitre ne peut pas voir. Mais pas sur l'interprétation, la faute, la main... Sur la Goal Line Technology, c'est une bonne chose. De même c'est compliqué pour un arbitre de voir un hors-jeu. Donc si on devait trouver un compromis entre les pros et contre, on devrait instaurer la VAR sur les lignes et pas sur les interprétations.
Pas sur les mains donc, même quand elles sont flagrantes?
L’arbitre n’a qu’à la voir. Ils sont quatre arbitres, ils devraient le voir.
Donc le but de la main de Qarabag face à Marseille en Ligue Europa Conférence ?
C’est qu’il est mauvais, il faut changer l’arbitre. Tu mets la VAR parce que les arbitres ne sont pas à la hauteur de la situation. Si les arbitres étaient très bons, tu n’aurais pas besoin des caméras mais après il y a des choses qu’ils ne peuvent pas voir. C’est pour ça que j’avais mis le cinquième arbitre car tu avais plus d’yeux. Comme au basket, ils sont trois arbitres pour cinq joueurs contre cinq. Au football, le terrain est dix fois plus grand et tu n’as qu’un seul arbitre.
Ça a été testé ça, le cinquième arbitre, non?
Oui mais comme c’était une idée à moi, ils ne l’ont pas gardée.
Que pensez-vous du projet d’une Coupe du monde tous les deux ans, le projet de Gianni Infantino avec Arsène Wenger à sa tête…
Mouais… Je connais les personnages donc on ne va pas parler d'eux... (il souffle) C'est compliqué. Ceux qui en ont besoin de cette coupe du monde tous les deux ans, ce sont les Fédérations parce qu’elles gagnent plus d’argent. En revanche les joueurs sont moins disponibles pour les clubs qui les payent. C’est compliqué. Je rejoins ce qu’a dit Kylian Mbappé : c'est la rareté qui fait le prix, la beauté. Quatre ans, c’est un cycle qui date depuis toujours, je ne vois pas pourquoi on le changerait. Il y a d'autres contraintes avec l'Euro, les JO. Il y a tout un système financier basé autour du sport, si tu changes tous les deux ans, ça complique. Ça change tous pour les partenaires, les télévisions. Il y a un gros problème.
Vous trouvez que le football évolue plus vers le business et qu’on laisse les joueurs de côté ou bien que ça a toujours été le cas et que c’est juste un peu plus poussé ?
Ça a été une évolution, il y a toujours eu de plus en plus d’argent et donc de plus en plus d’intérêt. On me demande: "ça ne te dérange pas de ne pas jouer aujourd’hui alors que tu gagnerais plus d’argent que quand tu jouais?" Mais je dis non. On va pas me poser la question si ça ne me dérangeais pas de jouer avant alors que je gagnais plus d’argent que les Kopa, Piantoni, Fontaine. Je pense qu’il devrait y avoir deux football. Le football professionnel et l’autre football. Le football professionnel basé sur le business, que sur le business. Et puis après je dirais le football amateur, le football du loisir, le football de détente. Il y a toujours eu un problème entre le professionnalisme et l’amateur. Je pense que la gouvernance du football fait que c’est compliqué.
Vous êtes contre le projet de la Super League?
J'ai dit que le football n'appartient ni à l'UEFA, ni à la Fifa. Il appartient à tout le monde. Le Tour de France appartient à un journal qui s'appelle L'Equipe (au groupe ASO). Vous, RMC, vous pouvez créer une Coupe d'Europe. Rien ne les (les clubs) empêche d'avoir une compétition. C'est à l'UEFA de tenir ses clubs pour garder les compétitions qui existent. Là où il faut se battre c’est qu’il faut donner les moyens pour faire un système de montées-descentes, il ne faut pas faire de ligue fermée. Il faut donner la possibilité à tout le monde de pouvoir gagner.
Question d’un auditeur: Si vous étiez le patron du PSG, vous pourriez changer quoi pour que le club réussisse?
Je ne suis pas le Cheikh déjà... C'est difficile de faire différemment et mieux que ce qu'ils ont fait. Tu crées une équipe avec une ligne d'attaque Messi-Neymar-Mbappé. Si en mettant trois des meilleurs joueurs du monde, tu ne gagnes pas, qu'est-ce que tu dois faire? Peut-être avoir une réflexion plus en profondeur sur la façon de jouer plutôt que de prendre des noms. Moi, Neymar, Messi et Mbappé, je préfère les voir les uns contre les autres. Parce qu'il y a au moins du piment. Je préfère voir Messi contre Ronaldo. Après ils ont 12 points d'avance en championnat. On ne peut pas dire que c'est quelque chose de loupé. Un match, c'est un match. En Coupe d'Europe, quand tu joues contre le Real Madrid, ce n'est pas parce que tu es PSG que tu vas gagner. Il ne faut pas être méchant avec le PSG. Le Prince Al Thani a fait de Paris un grand club. Nasser Al-Khelaïfi a fait de Paris un grand club. Ils ont une belle organisation, un beau stade, une belle pelouse. Ils sont peut-être un peu trop orientés vers le bling bling pour être négatif... Ouvrir un truc sur la 5e Avenue à New York, je ne suis pas sûr que ce soit très important. Je ne sais pas ce que je changerais mais ils ont fait un grand club.
Tu ne souhaiterais pas voir Haaland et Mbappé évoluer ensemble? Tu préfèrerais avoir une rivalité entre les deux?
Oui dans l’intérêt du football. J’ai dit pareil pour la Juventus. Aujourd’hui ils ne sont pas premiers alors que ça fait dix ans qu’ils le sont. C’est bien que ce soit les autres qui gagnent d’avoir un intérêt. Le football ce n’est pas qu’un club, c’est plein de clubs. Je le vois comme ça. Je suis persuadé que le Prince il voudra toujours le meilleur, le plus beau, le plus grand pour gagner la ligue. Sur les dernières années, ils ont fait un grand club. Ils ont trop dit qu’ils voulaient gagner la ligue des champions. Maintenant les supporters l’attende et ce n’est pas facile.
Question d’un auditeur: La fédération française de football n’a toujours pas rendu hommage à Michel Hidalgo, qu’est-ce que ça vous inspire?
Rien de surprenant. J’ai connu un grand professeur qui m’a dit une fois: "Celui qui oublie le passé n’a pas d’avenir."
Où en est le projet d’inscrire le football au patrimoine universel de l’Unesco ?
C’est un beau programme. Je dois voir la ministre de la Culture, Roselyne Bachelot et le président de la République Emmanuel Macron. C’est elle qui dira à la fin si on peut l’inscrire, ou non au patrimoine universel de l’Unesco. Le but est de protéger le football. Je dois trouver les termes pour ça.
Vous avez des regrets dans la vie?
Non, j’ai toujours pu faire ce que je voulais, sans m’emmerder la vie. J’aurais aimé faire une chose, jouer aux Etats-Unis à la fin de ma carrière plutôt que d’arrêter à 32 ans. Pour développer le football là-bas, de les aider à promouvoir le football là-bas.
Vous préfèreriez que des joueurs comme Messi ou Ronaldo termine dans des championnats plus exotiques comme ça?
Ils pourraient apporter quelque chose à un continent ou un pays, comme les Etats-Unis, la Chine, l’Inde. Faire deux ans pour donner un peu au football après avoir beaucoup pris. Ils ont déjà gagné beaucoup de titres. Après ils font ce qu’ils veulent.