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Riolo: "Ultras …. Confus! "

Retour sur le communiqué des 45 associations de supporters contre la reprise de la L1!

Dans la cacophonie qui accompagne notre foot en ces moments troublés, il ne manquait plus que la voix des supporters et des Ultras. Par le biais d’un communiqué commun, chose plutôt rare, 45 groupes ont affiché leur volonté de ne pas voir la L1 reprendre.

Une petite remise des événements dans le contexte du moment s’impose peut-être. Depuis le début de la crise sanitaire, le foot, comme tous les autres secteurs d’activités de l’économie, est confronté à de gros soucis financiers. 'Limiter la casse' est la règle pour à peu près tout le monde. Et quand les diffuseurs TV ont annoncé ne pas vouloir payer le produit non fourni, il est vite apparu évident, souhaitable voire vitale d’envisager une reprise coûte que coûte.

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On peut vouloir changer le monde et trouver un autre moyen de financer le foot, mais toujours est-il qu’aujourd’hui les caisses des clubs sont principalement remplies par les télés! Il y a là le premier grand combat des Ultras. La télé, ce grand méchant loup sans cesse vilipendé. La relation entre foot et TV a beau être antérieure à la création des groupes de supporters, certains croient utiles de mener ce combat d’arrière-garde. En 1927, Ernest Chamond prévoyait déjà que le foot deviendrait "le plus grand spectacle télévisuel du monde"!

La télé, a beau être, en quelque sorte, l’inventeur du foot moderne, rien n’y fait. Les plus grands souvenirs de l’histoire du foot ont beau avoir été sublimés par l’image, mais non! Non ça ne passe pas. Chaque semaine, dans les stades, on voit des banderoles absurdes dénonçant les diffuseurs. Et expliquer chiffre à l’appui que les clubs qu’ils supportent vivent sous perfusion télévisuelle ne change rien. 

La réponse fuse: nous on sera toujours là. L’argent des TV est sans odeur pour nous. Il n’y aurait plus de bons joueurs sur le terrain, un stade vétuste et au trois quart vide, une pelouse pourrie… mais nous on sera toujours là! On veut bien le croire et c’est pour ça qu’ils s’appellent Ultras. Un foot débarrassé de tout ce qu’ils estiment être superficiel. Un ballon, un écusson à défendre, une banderole à afficher et des chants.

Récemment est sorti un film sur les Ultras de Naples. Evidemment il a été jugé caricatural. Livre, film, article, tout est faux. Toujours. Même quand c’est fait par quelqu’un qui a connu le milieu. Quand tu en sors, c’est fini. J’ai trouvé ça plutôt pas mal. On y voit notamment toute l’ambivalence du milieu. Le cœur dans une main, le bâton dans l’autre. Un Ultra peut passer la journée à faire preuve de générosité, à aider des associations, à se plier en quatre pour venir en aide aux démunis et il peut le soir aller se taper avec des flics, des supporters rivaux. Une vieille histoire, un compte à régler, une querelle de banderole. Un grand écart pas simple à appréhender.

Mais revenons au communiqué rendu public hier. La critique des dirigeants affichant mesquinerie et intérêts privés est recevable. Dans cette crise, le foot français a le plus souvent affiché un visage honteux. Comme s’il avait fallu quelques semaines pour comprendre que sans démarche collective, il n’y aurait pas de salut! Ce sont les télés en déclarant une cessation de paiement qui ont provoqué l’unité! La catastrophe financière annoncée a contribué à un resserage des coudes.

Très vite il est apparu que la priorité était de finir le championnat coûte que coûte. Partout en Europe et à l’UEFA pour les compétitions internationales, le même défi: reprendre et terminer.

Restait à savoir si c’était possible et comment. L’intervention du Chef de l’Etat, ce lundi, était donc attendue. Et même si rien n’a été dit spécifiquement pour le foot, même si rien n’est acté et que la prudence doit primer, il apparaît qu’une reprise en juin et à huis clos est envisageable. Ce huis clos ne passe pas pour les Ultras. Ils veulent être là ou rien. Même si les clubs peuvent couler, même si des employés du club peuvent perdre leur emploi? Ils ne peuvent pas surmonter l’effort du stade vide? Du mauvais moment à passer avant que tout ne redevienne comme avant? 

Ils avaient anticiper la réponse: "Pas de stade sans public. Le football reprendra en temps voulu, quand les conditions sanitaires et sociales seront réunies. Le foot coûte que coûte est une honte".

J’ai un peu de mal à croire que la reprise se fera sans l’assurance de bonnes conditions sanitaires. Et sans leur faire offense, ce ne sont pas les Ultras qui seront amené à juger de ça. Alors il reste quoi? Le stade vide pour contenter la télé! On y revient car tout est là. Derrière la soupe sociale, il y a la dénonciation du foot business! Evidemment. On tortille du derrière mais tout est là! Un propos économique sorte de bouillie extrémiste de gauche ou de droite. Le foot d’en bas contre celui d’en haut. Niveau caricature, on est pas mal. Quand ils auront fini de cracher sur le film Ultras, je leur propose de passer à English Game, toujours sur Netflix. Ils verront que le foot business a été inventé par les ouvriers et que pleins de gens vivent grâce à l’argent du foot. Mais eux s’en foutent. Ils pensent à leurs petits intérêts, leur rêve d’appropriation du foot. Mais concrètement on fait quoi? On se coupe du monde. On n’évolue pas comme nos voisins. On ne cherche même plus à rivaliser. On descend notre niveau encore plus bas. Derrière la soupe de bons sentiments, il y a quoi? Rien, le néant. Et si des gens se retrouvent à la rue à cause des problèmes éco qui suivront la crise sanitaire, pas de problème, ils iront les aider. L’important c’est de rêver un monde nouveau, pas de le vivre. 

Daniel Riolo