Des ventes records lors du mercato et la transition Will Still: comment Lens a redressé une situation inquiétante

Le départ de Franck Haise avait fait l'effet d'une bombe, il n'était en fait que la face émergée de l'iceberg. L'été dernier, le RC Lens a entamé un vaste projet de remise à niveau. Financière surtout, avec un déficit d’exploitation en juillet autour de 60 millions d'euros nets (explosion de la masse salariale suite à la Ligue des champions et la chute des droits TV). Sportif aussi, avec le choix de Will Still pour entamer l'après-Haise.
De sa deuxième place en 2024 avec une Ligue des champions à disputer, le club nordiste était descendu au septième rang la saison dernière. Rien d'alarmant. Mais le signe qu'il fallait changer quelque chose, pas seulement sur le terrain. Et tout a changé. En plus de Franck Haise, parti à Nice et qui fera part quelques semaine plus tard d'un certain épuisement mental, le directeur général Arnaud Pouille a lui aussi quitté le navire à l'été.
Place donc à une nouvelle direction: Pierre Dréossi à la direction générale, Diego Lopez en directeur sportif et donc Will Still sur le banc. Des choix forts de la part du président Joseph Oughourlian, bien décidé à tourner la page précédente - aussi belle fut-elle sur le terrain - pour entamer un nouveau cycle. Avec un mot d'ordre financier: l'équilibre. Le train de vie du RC Lens version Ligue des champions n’était plus possible à assumer pour Lens.

Près de 100 millions d'euros brut (avec l’étalement de certains transferts sur plusieurs années comme celui de Kevin Danso) à trouver pour revenir à l’équilibre financier
Ce rééquilibrage des comptes, Lens y est parvenu en quelques mois. "Nous avions une double philosophie, sportive et économique. Nous avons rééquilibré (les comptes)", confirmait Pierre Dréossi à L'Equipe cette semaine. Un redressement qui est passé par des ventes lors des deux derniers mercatos, à commencer par le départ d'Elye Wahi en août à l'OM (qui l'a déjà fait partir en Allemagne) pour 27 millions d'euros. Le gros investissement de départ (autour de 30 millions) étant presque couvert malgré une mauvaise saison de l'attaquant français. Le prêt contracté en fin d’année 2024 pour passer la DNCG mais surtout pour financer l’achat du stade Bollaert (avant juin) a bien évidemment aidé.
Cet hiver, le départ de Brice Samba (qui bénéficiait d'un important salaire) pour Rennes (14 millions d'euros), celui de Kevin Danso (lui aussi un gros salaire) en prêt avec option d'achat (25 millions, activable en cas de maintien) à Tottenham et la vente d'Abdukodir Khusanov à Manchester City (40 millions d'euros hors bonus) ont achevé l'opération renflouage.
De quoi souligner le rôle du directeur sportif Diego Lopez, particulièrement actif dans le dossier Khusanov. Plusieurs clubs étaient intéresssés (Chelsea, Manchester United, Tottenham et la Juve, pas de PSG en revanche) et c'est finalement Manchester City qui a emporté la mise.
Les dessous de l’opération Khusanov
En coulisses, le nom de Jorge Mendes est souvent revenu. La superstar des agents a notamment obtenu un mandat sur le dossier Khusanov. De quoi susciter des critiques en externe. Mais son influence aura permis de faire monter les enchères grâce à son réseau incomparable. De quoi passer de propositions saugrenues à 3 millions d'euros au cap des 40 millions sans les bonus. Un coup de maître pour un joueur de 20 ans arrivé en 2023... pour 100.000 euros. Si Lens aurait aimé le garder en prêt pour la fin de saison, il a fallu se résoudre à faire sans lui. A ce prix-là, plus facile à accepter. En ce sens le choix de Diego Lopez de l’impliquer se révèle judicieux.
De l'argent est rentré dans les caisses mais pas question de tout remettre dans des transferts: l'idée a toujours été de recruter malin, l'été dernier comme cet hiver. Tout en conservant des joueurs qui incarnent l'identité lensoise, à l'instar des Sotoca, Gradit, Thomasson, Medina et El Aynaoui sur lequel Lens veut le mettre comme taulier du club pour l’avenir.
Ne surtout pas désunir le groupe, au contraire
Les dirigeants de Lens ont donc travaillé sur des marchés dits secondaires: sont notamment arrivés Goduine Koyalipou (CSKA Sofia), Mathew Ryan (AS Roma), Nidal Čelik (FK Sarajevo), Andrija Bulatovic (Buducnost Podgorica). Le fruit d'un gros travail de scouting sur fond de difficultés du football français avec des droits TV devenus faméliques. Et ce redressement économique permettra de présenter plus sereinement le dossier du club devant la DNCG.
Et sportivement dans tout ça? L'objectif est toujours de rester dans la course à l'Europe. Pour l'instant, le Lens de Will Still est dans les clous, avec une sixième place et une honorable série en cours de trois victoires en quatre matchs (une défaite face au PSG). L'ancien entraîneur de Reims n'a pas eu la tâche facile. Passer après Franck Haise, totalement adopté par la région, lui a imposé quelques défis. Mais il s'est lui aussi mis dans l'optique de sa direction: former un groupe uni, des joueurs qui se battent ensemble, sans grosse star mais avec le coeur. A l'image des supporteurs lensois.