Perri : « Ce football de la démesure peut exploser »

Kaka - -
Depuis lundi minuit, le mercato estival est officiellement clos. Et pas besoin d’aller chercher bien loin pour mettre en avant une tendance propre à cette fenêtre des transferts 2013 : cet été en Europe, il y avait les très gros, et puis les autres. Si 200 millions d’euros ont été dépensés en plus par rapport à l’année précédente, c’est uniquement à cause de quelques locomotives, détournant l’attention d’un marché moribond. « Ce sont les cinq clubs les plus dépensiers qui ont le marché cet année, confirme l’économiste Pascal Perri. Il y a un fossé qui se creuse entre les plus riches, capables d’acheter les meilleurs avec des chèques souvent supérieurs à 60 millions d’euros, et les autres, ceux du football tranquille, dans lequel il y a des échanges réguliers pour des sommes beaucoup plus modestes. »
Au sein d’une Liga minée par les dettes, la signature de Gareth Bale au Real Madrid pour une somme avoisinant les 100 millions d’euros fait ainsi presque figure d’hérésie : « L’investissement sur Bale, aucun économiste n’est en mesure, ni de le comprendre, ni de l’expliquer, poursuit-il. Sa réputation n’a jamais dépassé l’Angleterre. Il n’est pas Ronaldo, qui avait rapidement remboursé l’investissement consenti par le Real avec les produits annexes. On peut y voir un phénomène inquiétant, au moment où l’Europe du football parle de fair-play financier, c’est-à-dire de bonne gouvernance du football. »
« Le football espagnol court un risque »
Il reproche également à ce marché à deux vitesses de créer des iniquités sportives peut-être impossibles à combler. « En France, il y a maintenant d’un côté le football des oligarques, avec des investisseurs qui sont prêts à payer beaucoup, sans limite visiblement, et surtout sans espérance de rendement à court terme, peut-être même à moyen et à long terme. Et puis il y a le football plus modeste des clubs français de droit commun, qui ne bénéficie pas d’un droit de tirage illimité. Cet écart est aussi inquiétant. On a le sentiment que les deux plus riches vont pouvoir préempter les deux places directement qualificatives pour la Ligue des champions et qu’il y aura un deuxième championnat derrière. »
Perri craint notamment que le fragile équilibre financier sur lequel s’appuie encore le marché européen finisse par être très sérieusement menacé. « Quand on rapporte la nature de l’investissement à la nature de l’endettement, on se dit que le football espagnol court un risque. Il y a une bulle qui se crée, et c’est possible que les clubs soient un jour incapables de faire face à leurs engagements, vis-à-vis du FISC ou de la sécurité sociale, et que ce foot de la démesure explose. Le grand danger, c’est que la chute de quelques-uns entraîne l’édifice dans son ensemble. »
A lire aussi :
- En images : les dix stars du mercato 2013/2014
- Mercato : ce qu’ils disaient à l’époque…
- EN IMAGES-Mercato : les dix gros coups de la soirée