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JO 2024: l'incroyable destin olympique de David Smith, presque sourd mais qui dispute ses 4e JO avec les valides

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David Smith est né presque sourd, avec une perte auditive de 80 à 90 %, mais il a réussi à surmonter cette difficulté pour devenir un athlète d'élite: il participe, à Paris, à ses quatrièmes Jeux olympiques au sein de l'équipe masculine de volley-ball des Etats-Unis, qui joue ce samedi contre l’Argentine.

S'il a du mal à avoir des conversations normales, car il a besoin d'appareils auditifs et de lecture labiale pour communiquer, David Smith n'a jamais été limité dans sa pratique du sport. Pour preuve, malgré une perte auditive de 80 à 90 %, le volleyeur dispute, à partir de ce samedi, les Jeux olympiques pour la quatrième fois, avec l'équipe des Etats-Unis. Dans sa riche carrière, il est passé par la France pendant cinq saisons de 2011 à 2016 au Tours Volley Ball.

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"Quand je l’ai recruté à Tours", affirme Pascal Foussard manager de l’équipe de France et du TVB jusqu’en 2024. "Je n’ai absolument pas pris son handicap comme un obstacle. Je le considère comme un joueur avec toutes ses capacités. Son handicap, si on ne le connaît pas on ne le voit pas. Je ne me suis jamais posé la question quand je l’ai recruté s’il ça allait poser problème. Il faut juste lui parler en anglais car il lit sur les lèvres."

"Le sport m'a donné confiance en moi",  disait-il à la chaine américaine NBC lors des derniers JO de Tokyo il y a trois ans. "C'est quelque chose qui m'a permis de m'épanouir en dépit d'un désavantage. Je pense que pour moi personnellement, c'était excellent pour ma compréhension mentale de qui je suis et de ce que je peux faire, mais je pense aussi que c'était une façon unique de m'intégrer dans le monde des entendants."

L'importance de ses parents

Ses parents, Nancy et Rick, l’ont mis plus jeune dans des écoles publiques et des équipes sportives au lieu de le garder avec des enfants sourds. Nancy Smith, sa maman avait travaillé avec des enfants sourds avant la naissance de David, elle était donc bien préparée à l'élever.

"Ils ne m'ont pas empêché d'avancer", ajoute Smith à NBC. "C'est l'une des leçons de vie que j'ai retenues de mes parents. Je suis le seul à pouvoir m'empêcher de faire ce que je veux. Si je veux faire quelque chose, il y a un moyen de le faire, qu'il s'agisse de sport, de travail, d'université ou de relation. Il se peut que je doive prendre un chemin différent. Il se peut que je doive faire quelques ajustements en cours de route. Mais si je suis vraiment passionné, si je suis vraiment appelé à le faire, c'est à moi de trouver le moyen d'y arriver."

Âgé de 39 ans, Smith qui joue au poste de central a lancé sa carrière à l'université d'Irvine, avant de jouer en Europe où il a côtoyé le passeur de l’équipe de France Benjamin Toniutti dans le championnat Polonais à Kedzierzyn-Kozle. Passeur – central, une relation basée énormément sur la communication. Il faut donc s’adapter.

"Il y a des règles à respecter avec lui quand il appelle pour prendre la passe de transition", précise Toniutti. "Il faut lui laisser car il n’entend pas si quelqu’un parle à côté. Sur certaines situations comme une phase de relance, s’il parle, c’est lui qui prend la balle car il n’entend pas et c’est dans son dos."

Dans la vie quotidienne, les anecdotes sur ses petits tracas sont légions et font sourire ses coéquipiers avec beaucoup de bienveillance. "Il a son Apple Watch pour se réveiller le matin car elle vibre", se souvient Benjamin Toniutti. "Il y a eu un ou deux déplacements où il l’a oublié donc je devais le réveiller car j’étais en chambre avec lui. C’est un super joueur, un super gars et  j’ai juste du respect pour tout ce qu’il fait."

Un rapport différent à la douleur

Pascal Foussard garde en tête son incroyable force de caractère: "Comme il a perdu un sens, on l’appelait Robocop, il ne sent pas la douleur. Une fois je l’ai emmené chez l’échographe, il avait une déchirure énorme et l’échographe lui a dit: 'Mais tu en as aussi une sur l’autre cuisse! Tu t’es fait ça quand?' Il a répondu: 'Je ne sais pas je ne m’en suis pas aperçu'. Il a un sentiment avec la douleur qui est très différent de nous."

"Je pense que parfois, beaucoup de gens considèrent la perte d'audition comme un handicap et c'est tout ce qu'ils voient et cela devient le centre de leur processus de pensée", ajoute Smith. "Ils pensent alors à ce qu'ils ne peuvent pas faire plutôt qu'à ce qu'ils peuvent faire. Pouvoir démontrer cela est l'une des choses les plus gratifiantes. Pouvoir exercer une influence en temps réel et inspirer la prochaine génération est vraiment génial."

Le manque d'audition de David Smith a été largement compensé par son empathie et, surtout, ses capacités athlétiques. Le central espère décrocher une deuxième médaille olympique après le bronze à Rio en 2016. De quoi forcer encore plus l’admiration. 

Nicolas Baillou