Une mascarade qui dérange

Pas de doublé olympique pour le skieur de Bois d'Amont. - -
Drôle d’ambiance au Parc Olympique. Pas la peine de chercher les Moan, Gottwald, Frenzel ou Lamy-Chappuis aux avant-postes dans le portillon de départ de la course de ski de fond. Tout simplement parce que le gratin mondial du combiné nordique est passé complètement à côté de son saut quelques minutes auparavant. La faute à une météo changeante et un vent tournant qui rendait impossible la tenue des épreuves. Mais surtout à un jury peut enclin à prendre ses responsabilités. Les officiels avaient d’ailleurs annulé le concours après le passage de trente sauteurs… pour le repousser de trente minutes. Les Français qui s’étaient déjà élancés - à l’exception de Jason Lamy-Chappuis - étaient donc bon pour un deuxième tour. « Ça fait chier. Sauter dans ces conditions pour un concours olympique, ce n’est pas normal », avait lâché désabusé Maxime Larheute.
Et le clan français n’est pas au bout de ses surprises. Tout simplement parce que le deuxième essai se déroulera dans des conditions encore pires pour les six derniers sauteurs. Quarante-et-unième à s’élancer, Mario Stecher saute ainsi à 123,5m, alors que son successeur, l’Allemand Tino Edelmann, ne s’envole qu’à 109,5m. Dans les camps allemand et japonais, c’est également la stupeur. Personne ne comprend pourquoi le concours continue. « On voyait que le jury voulait terminer et envoyer les cinq derniers sauteurs coûte que coûte. Les cinq derniers devaient être des surhommes », s’agace Julien Eybert, l’entraîneur français des sauteurs. Quant à Jason Lamy-Chappuis, il fait bonne figure devant les médias mais laisse pointer un agacement perceptible. « Après le saut, j'étais vraiment en colère et franchement, je n'avais même pas envie de courir le ski de fond mais je me suis dit "tu es aux JO, profite" et je me suis bien défoulé sur le ski de fond.’’ »
Un juge au triste passif
Une fois la course terminée, tous les protagonistes se lancent dans une critique ouverte contre le jury. « On truque les Jeux. Que le jury soit aussi mauvais, c’est incroyable », lâche Fabrice Guy, Champion Olympique en 1992 aujourd’hui farteur de l’équipe de France. « C’était une vraie loterie nationale. On aurait pu rester couchés et prendre des tickets. C’est une grossièreté. Ils sont en dessous de tout », reprend le patron de l’équipe de France, Nicolas Michaud. Mais le plus véhément est sans aucun doute Fabien Saguez, le DTN de la FFS : « C'est un scandale. C'est inadmissible. Je comparerais la FIS à une république bananière : "je décide, je fais, je suis le jury" et une fois que c'est fait on est content. On a réalisé une compétition mais qui n'est pas du tout une compétition internationale. On ne prépare pas une compétition olympique pour exister une fois tous les quatre ans et pour se retrouver là à se faire voler. Ces directeurs de course pas professionnels. Ce sont des petits touristes régionaux. Ils sont incapables de gérer un concours. »
Pris sous le feu des critiques, le délégué technique de la FIS fuit micros et caméras. Tout juste laisse-t-il échapper : « Je dois prendre une décision pour un ensemble d’athlètes. Pas seulement pour une nation. Je pense que le jury a fait de son mieux. » C’est d’ailleurs le discours ironique que Guenter Csar a tenu à la délégation française quand celle-ci est venu lui dire ce qu’elle pensait de tout cela. Sauf que cet Autrichien n’est pas un inconnu dans le monde du combiné nordique. Médaillé de bronze en 1988 par équipes à Calgary et champion du monde trois ans plus tard, toujours par équipes, il n’a pas laissé un bon souvenir dans le petit monde du nordique. D’anciens athlètes se souviennent d’un skieur truqueur qui n’hésitait pas à jouer des coudes et marcher sur les skis de ses adversaires…. Une époque pas si révolue.