XV de France féminin: "Il y a beaucoup d'excitation", les Bleues ont lancé la préparation de la Coupe du monde 2025

Charlotte Escudero, on est à moins de deux mois du lancement de la Coupe du monde. Votre premier match ce sera le 23 août contre l'Italie. Comment vous sentez-vous?
Oui, forcément. Là, on est en pleine préparation. Il y a beaucoup d'excitation, beaucoup d'envie. Il y a encore presque un mois et demi à tenir. C'est vrai qu'on est toutes hyper impatientes. On bosse dur et on a hâte.
Comment ça se passe, le début de ce rassemblement? Vous en avez déjà vécu pour des Tournois des VI Nations, entre autres. Qu'est-ce que ça a de particulier, un rassemblement de Coupe du monde?
J'ai déjà fait la Coupe du monde en 2022, donc c'est ma deuxième. Mais c'est vrai que c'est toujours hyper particulier parce que ce n'est pas une compétition lambda. C'est vrai que là, il y a cette excitation en plus de participer à une Coupe du monde, donc c'est hyper cool. En plus, on retrouve les copines après le Tournoi où on a été un petit peu frustrées. Donc c'est important pour nous de reprendre sur des bonnes bases et de travailler fort sur cette compétition-là.
Qu'est-ce qui change d'une préparation d'un Tournoi des VI Nations? Le fait qu'il y ait des équipes que vous ne connaissez pas, par exemple le Brésil qui est dans votre poule, que vous n'avez jamais affronté. Qu'est-ce que ça change dans votre préparation?
Là, d'abord, on va vraiment axer la préparation sur la partie physique parce qu'on a eu trois semaines de vacances, la saison s'est terminée en juin. Donc vraiment, on axe fort sur la partie physique, retrouver nos bases un petit peu sur le projet. Et après, on va avoir le groupe de la préparation, on va avoir le match de warm-up, donc on a encore un peu de temps avant de se focaliser vraiment sur les équipes qu'on va rencontrer à la Coupe du monde. Donc voilà, d'abord, c'est un travail physique, après pour la préparation du warm-up, et ensuite, ça se fera en trois parties.
Il y a une équipe que vous avez affronté cinq fois, c'est l'Angleterre. Aucune victoire, c'est une équipe qui est difficile à battre. Pourtant, vous n'êtes pas passées loin lors du dernier Crunch, pendant le dernier match du Tournoi des VI Nations (défaite 43-42). Est-ce que c'est frustrant d'échouer à un point? Est-ce que ça vous donne de la motivation supplémentaire, ou est-ce qu'au bout d'un moment, ça décourage un petit peu?
Moi, encore, ça va. Je suis encore un peu jeune dans l'équipe. Il y en a, je sais qu'elles ont accumulé beaucoup plus de défaites. Forcément, il y a ce goût un peu de revanche à chaque fois parce qu'on a envie d'y arriver, on a envie de les battre. Et c'est vrai qu'on se concentre sur les matchs les uns après les autres, mais forcément, on a toujours un peu les Anglaises dans un coin de nos têtes et on sait que là, ça va être chez elles. On va les rencontrer à un moment ou à un autre, on espère en phase finale, après les poules. Donc oui, forcément, on a à cœur de gagner ce match et, en tout cas, d'aller chercher quelque chose chez elles.
On parle beaucoup des Anglaises mais il y a une autre équipe contre laquelle vous avez échoué aussi à un point en demi-finale lors du dernier Mondial, c'est la Nouvelle-Zélande (25-24). Comment on fait pour aller chercher ce petit point qui nous manque pour leur passer devant?
Comme je disais, ça reste les plus grosses nations mondiales, donc on a toujours un peu ce supplément d'âme à aller chercher les Anglaises chez elles. Les Néo-Zélandaises, c'était chez elles. On n'a pas réussi en 2022. Forcément, il y a toujours ce truc en plus de se dire qu'on va aller taper le top 3 mondial. Donc oui, il y a toujours un peu cette excitation supplémentaire. Je pense aussi que ça se joue toujours à des détails. On le voit contre les Anglaises à Twickenham aux Six Nations. Donc je pense que là, on appuie fort le travail sur ça, sur les petits détails, les scénarios qui rentrent aussi en compte, par exemple avec des cartons, avec différents scénarios qu'on peut rencontrer pendant ces matchs-là où tout est important.
Justement, pour travailler sur les détails, vous avez des intervenants qui viennent tout au long de votre préparation. Cette semaine, vous avez notamment Alexandre Ruiz qui est venu pour travailler le jeu au sol. Qu'est-ce que vous, dans votre rôle, ça vous apporte d'avoir ce genre d'intervenant qui vient, qui est extérieur à votre staff ?
C'est vrai que ça a été hyper sympa cette première approche avec Alexandre Ruiz, parce qu'on voit vraiment que c'est son secteur de prédilection. Il a été arbitre, mais maintenant il coache (manager du SA XV, en Pro D2) et il est hyper pro. C'est du détail, c'est des attitudes, c'est la performance en fait et ça fait vraiment beaucoup. Moi, je sais qu'en une séance, il a carrément changé ma façon de voir les choses sur les attitudes au contact. Donc c'est hyper précis, c'est du détail et c'est ça dont on a besoin. Je pense que le fait d'avoir des intervenants, c'est hyper cool pour nous sur ça, parce qu'on a besoin de petites choses qui vont faire la différence contre des grosses équipes et là, c'est vraiment le top pour nous.
Vous dites que ça a changé votre façon de voir les choses. Est-ce que vous pouvez nous en dire un petit peu plus?
En fait, ce sont des petites attitudes que nous, on n'a pas forcément l'habitude de travailler. Moi, je sais que, par exemple, dans des attitudes au contact, j'arrive un peu droite et lui, il nous a vraiment corrigé ça. Il nous a dit d'arriver bien basse, que la posture est hyper importante au sol. En fait, il a l'œil hyper avisé sur des choses dont on n'a pas l'habitude de travailler, parce que nous, on le fait de manière générale, on enchaîne, on travaille beaucoup en répétition et là, c'était vraiment des tous petits détails qui font beaucoup la différence, surtout dans ce genre de phase-là de ruck. Et on sait que contre les Anglaises, c'est ce qui nous a un peu manqué, donc là, c'est vraiment hyper minutieux.
L'étau se resserre entre les différentes équipes nationales. Est-ce que ça aussi, ça aide à vouloir aller encore plus haut, à ne pas se relâcher? Il faut se méfier de tout le monde, même des Brésiliennes, par exemple, qui n'ont pas l'habitude de ce genre de compétition?
Oui, forcément. C'est ce qu'on a vu pendant le Six Nations. Là, le premier match, c'est contre les Italiennes. Et on sait, en plus, pendant le Tournoi, que c'est toujours un match un peu piège. Donc là, on va être vraiment attendues sur ça. Toutes les équipes montent leur niveau et même les Brésiliennes. C'est vrai qu'on n'a pas du tout l'habitude de les jouer.
Moi, je ne les ai jamais jouées. Et je pense qu'on va se méfier de tout le monde parce que là, effectivement, l'étau se resserre et le rugby féminin augmente de plus en plus son niveau. Et c'est ce qui est hyper bien pour nous. Donc oui, on va bosser fort pour tous les matchs et surtout ceux des poules pour pouvoir aller chercher des phases finales.
Le dernier Mondial, c'était en Nouvelle-Zélande, loin de la maison. La prochaine Coupe du monde, c'est en Angleterre. Est-ce que ça aussi, ça vous aide dans votre préparation de savoir que vous serez plus proche de vos familles, qu'elles pourront peut-être venir plus facilement vous voir?
Oui, forcément. Après là, je pense que c'est plus l'aspect mental et un petit peu intime parce que c'est vrai qu'être loin de ses proches, avec le décalage horaire, c'est toujours un peu dur. En plus de partir loin, de ne pas les avoir en contact, c'est quand même assez dur pour la partie personnelle. Et là, c'est vrai que d'avoir le soutien de ses proches, de pouvoir les appeler, les avoir, les voir aussi parce que c'est vrai que c'est qu'à une heure en avion. Donc ça, c'est vraiment, d'un aspect personnel, c'est hyper bien pour nous, quoi. Mentalement, ça fait du bien.
Côté ambiance, comment ça se passe dans ce groupe? Il y a notamment quelques nouvelles qui vous ont rejoint...
C'est hyper cool parce que c'est des nouvelles, entre guillemets, parce qu'on a l'habitude quand même de les voir. Elles ont fait tout le circuit jeune. On a déjà fait un stage en janvier, à peu près toutes ensemble. Donc, au fur et à mesure, le groupe se resserre, mais c'est des filles qu'on a quand même l'habitude de voir. Et là, c'est l'été, il fait beau, donc le soir, on se retrouve ensemble. En fait, on ne se lâche jamais. On est toujours en collectivité et c'est ça qu'on aime. Donc, c'est hyper cool. On joue à la pétanque après les entraînements, jouer au molkky, c'est une ambiance hyper sympa.
Vous avez été forfait pour le WXV qui a eu lieu l'automne dernier. Il y a de plus en plus de concurrence aussi à tous les niveaux et notamment à ton poste. Est-ce que vous avez pu craindre un petit peu de perdre votre place? Et comment vous avez vécu le fait d'être loin d'elle aussi pendant cette nouvelle compétition?
L'aventure sportive, c'est une aventure humaine, et quand on est loin, ça manque. On a envie déjà de retourner sur les terrains et de retourner avec les filles. Donc, forcément, on a toujours envie d'y retourner et d'y rester, quoi. Et par rapport à la concurrence, je pense que c'est bien aussi d'avoir des filles qui nous challengent parce que rien n'est jamais acquis, surtout en équipe de France. Ça reste toujours une sélection parce qu'on a le côté plaisir de porter le maillot, quelque chose d'incroyable, d'un rêve. Mais ça reste quand même une sélection et il faut toujours viser plus loin et travailler plus fort.
Avec vous en troisième ligne, il y a une "petite nouvelle". C'est Séraphine Okemba qui vient du rugby à 7, qui, elle, a vécu une autre aventure l'année dernière avec les Jeux olympiques. Comment est-ce que vous, vous la guidez dans ce nouveau rôle pour elle en troisième ligne?
Moi, c'est compliqué parce que j'ai du mal un peu... Ce n'est pas dans mon tempérament de leader comme ça les filles, mais je pense que Séraphine, c'est une fille qui bosse beaucoup. Elle, personnellement, elle a toujours cette volonté de travail et de débassement de soi. Je pense qu'avec le 7, c'était un peu son leitmotiv. Donc, elle va beaucoup chercher les autres. Elle est tout le temps à l'écoute, hyper intéressée. Elle veut apprendre, elle veut savoir. Donc, je pense qu'elle, personnellement, elle a ces atouts-là qui lui permettent de jongler entre le 7, le 15, les différentes compétitions parce que c'est vrai que d'enchaîner des JO avec une Coupe du Monde, mentalement et physiquement, il faut être au rendez-vous.
Est-ce qu'elle vous parle des JO de l'année dernière et de cette aventure qu'elle a vécue?
C'est quelqu'un d'assez réservé, Séraphine. Donc, c'est vrai qu'elle ne va pas beaucoup parler d'elle. Mais de temps en temps, quand on lui pose des questions, oui, elle en parle. Elle nous explique les différences qu'il y a avec le Seven, physiquement, les entraînements... Parce que quand on fait des séances de physique, on lui dit "mais toi, tu as l'habitude, c'est quelque chose de normal". Et là, elle nous explique quand même qu'il y a des nuances. C'est assez rigolo de la questionner sur ça.
Est-ce que vous ça vous apporte aussi, vous êtes curieuses de savoir les différences entre le jeu à 7 et le jeu à 15?
Oui, forcément. En plus, on a souvent des collaborations avec les filles du Seven. On s'entraîne souvent ensemble et on voit vachement la différence. Moi, je sais que je ne pourrais jamais faire du rugby à 7 parce que, comme elle dit, c'est un autre sport. Ils ont essayé un petit peu de m'envoyer à 7. Et c'est vrai que les espaces, c'est hyper dur quand on n'a pas l'habitude. Le style de défense, d'attaque, il y a des espaces partout. Et il faut vraiment s'y connaître, quoi, et s'entraîner physiquement, parce que le physique, là, c'est important, très important.
On vous a vu à la fin de l'entraînement, faire un cri de guerre. Est-ce que vous pouvez nous dire d'où il vient? Quelle est son histoire ?
C'est une phrase qu'on a depuis un moment. En fait, on tape plusieurs fois des mains et on finit par "qui ose, gagner". C'est notre leitmotiv, parce qu'on a envie d'oser, de tenter des choses et de s'amuser sur le terrain. Donc, c'est un peu notre fil conducteur tout au long de cette préparation.