Comment Africa Run fait courir l’Afrique de l’Ouest

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Jean-Philippe Allaire, concrètement, quelles sont les motivations d’Africa Run ?
C’est une association loi de 1901 qui a pour objet de collecter, acheminer et distribuer des chaussures de running en Afrique de l’Ouest. Des chaussures qui n’ont plus assez d’amorti pour assurer des compétitions mais qui peuvent être en suffisamment bon état pour avoir une deuxième vie, et aider les populations locales qui ont du mal à se chausser.
Comment vous est venue cette idée ?
En 2006, j’étais coureur de marathon. J’avais une consommation de chaussures de running de deux à trois paires par an. Comme elles étaient encore en bon état, je les gardais dans mon placard, ce qui exaspérait un peu mon épouse… A l’occasion d’un voyage au Mali, au pays Dogon, on a traversé un certain nombre de villages, on a soigné une jeune fille qui avait le pied blessé parce qu’elle avait marché dans les rochers ou dans les épines pieds nus. Je me suis dit finalement pourquoi ne pas donner une nouvelle vie à mes chaussures afin qu’elles aient une réelle utilité.
Avez-vous constaté un intérêt pour la pratique du running en Afrique de l’Ouest ?
On était dans une zone rurale où la pratique du sport se limitait à jouer au foot sur la place du village. La chaussure était plutôt un élément de protection pour pouvoir se déplacer, pour travailler au champ, et éventuellement pratiquer le football. Mais la pratique du running en tant que telle, dans ces zones rurales, est quasiment inexistante. On n’a donc pas entrepris cette démarche dans la logique sportive d’acheminer des chaussures pour des coureurs. Finalement, c’est une démarche de développement durable.
Comment choisissez-vous vos lieux de collecte ?
Les lieux de collecte sont des événements sportifs principalement en France, et en région parisienne (marathon de Paris, la Parisienne, Paris-Versailles…), pour des questions de logistique. L’autre question, c’est pourquoi nous distribuons au Tchad, au Mali, et pas dans d’autres pays. Là aussi, c’est lié à la logistique. Lorsqu’on a la possibilité de faire un affrètement relativement peu onéreux dans un pays dont on sait qu’il y a des besoins, on est capable de monter l’opération sur cette base. Si demain un partenaire me dit qu’il peut m’amener des cartons au Burkina Faso, à Ouagadougou, on montera l’opération.
Avez-vous des sponsors pour vous aider ?
Nous recevons des dotations faites par des grandes marques comme Mizuno, New Balance, qui nous donnent des paires de test neuves. On les donne ensuite à des clubs de sport dans les banlieues des grandes capitales, là où il y a des clubs structurés. Pour le coup, ça sert à des athlètes qui s’entrainent et préparent des événements internationaux.
L’Afrique produit de très grands marathoniens et coureurs de fond : comment expliquer ce paradoxe entre manque de structures et performance ?