Lavillenie : « Ce n’est pas fini »

Renaud Lavillenie - Crédits photo : nom de l'auteur / SOURCE
Renaud Lavillenie, avez-vous digéré votre exploit de samedi ?
Ça fait à peine 24 heures que ça s’est passé. Je n’ai pas réellement eu le temps de tout réaliser. Je viens tout juste de poser les pieds en France. Après mes 6,08m il y a 15 jours, il a fallu que je rentre chez moi pour me rendre compte de l’ampleur. Là, je ne suis pas encore rentré chez moi donc ça va prendre un peu plus de temps (rires). Quand je vois le nombre de caméras, il n’y a qu’après les Jeux (2012) que j’en ai vu autant. C’est énorme.
Avez-vous récupéré physiquement ?
Non. Toujours pas de sommeil, c’est la règle jusqu’à lundi. J’aurai le temps pour récupérer de tout ça, donc je ne suis pas pressé.
Aviez-vous pensé succéder à Sergueï Bubka ?
Dans mes rêves, peut-être ! C’est assez irréel. Bubka, ce n’est pas un athlète lambda, donc c’est assez extraordinaire. En plus, j’ai eu des moments très forts avec lui, avant la compétition, pendant et après.
Vous rendez-vous compte que votre vie va changer ?
J’en ai bien l’impression (rires). Personnellement, je n’ai pas envie de changer et je ferai en sorte de ne pas changer. Je commençais déjà à être difficilement tranquille à Clermont donc je pense que ça va être encore pire. C’est la rançon de la gloire et ça fait aussi plaisir de voir ça. Il vaut mieux ça que de sortir de l’aéroport en recevant des tomates et des cailloux !
Quand avez-vous passé le cap ?
L’année des Jeux a été constructive. Après Londres, j’ai fait un choix qui a été critiqué (se séparer de son entraîneur, ndlr) mais qui, au final, cloue le bec à tout le monde parce que j’ai mis une claque à mon record et je suis bien meilleur qu’avant. Ça passe par un entraîneur beaucoup plus serein et disponible. Avec les bons conseils au bon moment, on a travaillé et gagné un peu plus de puissance.
Pouvez-vous encore sauter plus haut ?
Je ne vais pas m’arrêter, donc il n’y a pas de raison pour ne pas essayer de battre ce record. Après, il n’y a pas de date prévue. L’objectif, c’est de voir comment je vais pouvoir récupérer au niveau de mon pied. Ce n’est pas fini, j’ai 27 ans. L’avantage, c’est que j’ai encore du temps devant moi, j’ai encore de belles saisons à venir.
Allez-vous faire comme Bubka et y aller centimètre par centimètre ?
Bubka a pris le record à 5,90m et l’a amené à 6,15m. Moi, si je le prends à 6,16m, je ne vais pas en faire 35 ! En avoir fait un, c’est déjà énorme. Si je peux arriver, dans les années à venir, à en faire un ou deux autres, ce sera extraordinaire. Pour l’instant, l’objectif c’est de se dire « savoure ce que tu viens de faire », parce que ça ne se reproduira peut-être jamais.
Est-ce plus fort que votre médaille d'or aux JO ?
Ça n’a rien à voir. Là, c’est extraordinaire. Le fait que ça se passe à Donetsk, devant Sergueï Bubka… Des champions olympiques à la perche, il y en a eu plusieurs. Un recordman du monde, il n’y en a qu’un et ça change complétement la dimension. Tout l’engouement que je vois depuis est extraordinaire. Je ne suis pas sûr qu’il y ait eu un tel engouement aux Jeux. Il n’y a pas de mots.
C'est donc encore plus d'émotion...
Oui parce que ce record n’était pas prémédité. Il y a deux ou trois ans, je faisais bonne figure en disant que j’y pensais, mais je savais qu’il était quand même assez loin. Depuis l’an dernier, je me suis rendu compte que je pouvais vraiment m’en rapprocher. Mais c’est au-delà de ce que je pouvais imaginer. Tant mieux, parce que rien n’est écrit. Je vais faire le maximum à chaque fois, comme à chaque entrainement et chaque compétition.
Votre blessure au pied, sur votre essai à 6,21m, peut-elle vous priver des Mondiaux en salle en Pologne (du 7 au 9 mars) ?
Il n’y a aucune certitude là-dessus. Je dois passer des examens ce dimanche et lundi pour voir où ça en est et je pourrai en dire plus lundi.
En voulant allez plus haut, vous avez péché par enthousiasme ?
Mon coach Philippe (d’Encausse) me connait bien et savait que je n’allais pas m’arrêter là. Il fallait que je tente quelque chose, c’est dans ma nature. J’ai voulu tenté les 6,21m. L’objectif n’était pas de dire « remets encore 5 cm à ton record » mais plutôt « fais un saut pour te rendre compte de ce qui t’attend ». Pas de chance, la perche se fait éjecter du butoir et elle m’a éjecté, mais pas au bon endroit. A la réception, le pied a pris cher. Mais si c’était à refaire, je le referais sans hésiter, malgré la blessure. M’arrêter, ça n’aurait pas été moi.
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