La France est prévenue

Le public lituanien - -
Mardi 6 septembre. 20 heures 55. Les officiels de la FIBA Europe sont eux-mêmes surpris par la caisse de résonance de la Siemens Aréna de Vilnius. Le « Tautiska Giesme », l’hymne lituanien, est entonné par 11 000 spectateurs à l’unisson. A l’extérieur, carton d’audience TV et rues désertes. Le match n’a pas encore commencé que déjà, les « Lietuva, Lietuva » pleuvent sur le parquet. A la table de marque, panique à bord : rien n’a été prévu pour atténuer les décibels ou se boucher les oreilles. La salle, habituel théâtre des rencontres du club local du Lietuvos Rytas, arbore avec fierté dans un couloir les trophées du club, exposés… entre la pizzeria et les toilettes pour hommes.
Quarante minutes de fête, de partage et de soutien à l’égard d’un sport devenu, au fil du temps, un outil politique face au joug soviétique. « Le basket n’est pas un sport, c’est une religion qui a permis de nous libérer », témoigne Robertas Jankulasecius, maillot vert sur les épaules. « En 1988 à Séoul, il y avait autant de Lituaniens que de Russes dans l’équipe soviétique. Et nous avons gagné les JO », poursuit ce chauffeur de bus venu avec femme et enfants à l’Aréna.
Des paysans au rebond
A l’époque, le mouvement d’opposition « Saujudis » prend forme et conteste la prédominance russe. Le basket lituanien compte alors dans ses rangs l’un des plus grands joueurs de l’histoire mondiale : Arvydas Sabonis. Quelques années plus tard, ce dernier profite de la Pérestroika pour enfin s’exiler en NBA. Une fierté nationale supplémentaire, une fois encore grâce au basket.
L’acte fondateur de cette histoire d’amour entre la Lituanie et la balle orange remonte à 1937, lorsque le pays remporte à Riga le Championnat d’Europe. Trois ans plus tard, Staline et son armée envahissent le territoire, reléguant du même coup dans les sélections les Lituaniens, « considérés comme des paysans », raconte Jacques Monclar, consultant RMC Sport. Aujourd’hui, le basket se vit dans tout le pays. Une fenêtre abimée peut être recyclée en panneau. Un espace abandonné dans une contrée déserte peut ressusciter sous forme de terrain. Drapeaux aux fenêtres, cet Euro est donc une fierté nationale dans un pays économiquement à l’agonie. « Nous avons repoussé le passage à l’Euro, mais nous allons pousser pour gagner l’Euro », s’extasie ce chauffeur de taxi. Les officiels de la FIBA Europe sont prévenus. Ils ont jusqu’au 18 septembre pour trouver des boules quiès.