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"Le basket est la seule raison pour laquelle j’ai des amis" Tony Snell de la NBA à Boulazac

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A 33 ans et après 9 saisons très correctes en NBA, l’arrière californien débarque à Boulazac en Dordogne. Pour l’amour du jeu, pour découvrir une nouvelle culture avec femme et enfants. Rencontre avec ce joueur qui a raté pour un match NBA seulement, la couverture médicale garantie pour ses deux garçons atteints d’autisme.

Quand il plie sa grande carcasse pour s’asseoir dans un petit fauteuil rembourré dans les coulisses de Roland-Garros ce vendredi, Tony Snell dévoile son plus beau sourire, un mélange de timidité et de franchise. "Bonjour" articule-t-il. Un mot qu’il a appris dans les films. L’arrière de 33 ans et 1m98 est la curiosité du recrutement du promu. Comment le club périgourdin, qui a fait l’ascenseur avec l’élite, a-t-il réussi à attirer ce CV solide de NBA ? Vingtième de choix de draft en 2013, Snell a joué à Chicago, Milwaukee, Détroit, Atlanta, la Nouvelle Orléans et Portland.

Séduit par le projet et le discours du coach

Après 3 saisons en G-League, Snell a eu envie de tenter l’expérience à l’étranger : "J’ai dit à mon agent que je voulais jouer à l’étranger, n’importe où insiste-t-il. Il a trouvé Boulazac, on a eu une visio, J’ai aimé leur envie, ils ont aussi aimé ce que je dégageais. J’ai apprécié les mots du coach, ce qu’il attendait de moi, toute l’alchimie que l’on va créer."

Un rôle de leader défensif et shooteur à trois points

En Dordogne, Snell qui est monté à 8,5 points et 3 rebonds de moyenne sur sa meilleure saison aux Bulls, sera le leader défensif de l’équipe et aussi une arme à trois points. Avec Détroit, il avait planté 24 points à 100% de réussite dont 6/6 à trois points un soir de victoire contre les Knicks. Arrivé il y a quelques jours, il a d’abord dû se remettre du décalage horaire avant de découvrir cette région riche en jolis paysages et plaisirs du palais. Plusieurs fois, il nous répète qu’il est ‘open-minded’, ouvert pour essayer de nouvelles choses : "Il y a un mois je n’aurais pas su placer Boulazac sur la carte. Je ne savais rien mais je découvre tout. Je suis très reconnaissant de cette opportunité. Je n’avais pas d’a priori. Je voulais sortir de ma zone de confort. J’adore la culture française."

Un joueur passionné avant tout

Il va découvrir qu’à Boulazac, le BBD est très important dans ce département rural. C’est la seule équipe de sport collectif au plus haut niveau hexagonal. "J’aime la culture française et l’une des premières choses que j’ai pu sentir c’est que tout le monde semble uni. Ca se voit dans les petits moments. Tu sens l’unité de la communauté." A Milwaukee, Snell a signé un contrat de 46 millions de dollars sur 4 saisons. Il peut sembler incongru de le voir débarquer dans la banlieue de Périgueux. Il coupe : "Je joue au basket parce que j’adore le basket. C’est bien d’avoir l’argent mais je ne le fais pas pour l’argent, je fais les choses pour le basket, parce que j’adore ce jeu."

Entre combat personnel et résilience

Snell poursuit un autre combat. Ses deux garçons, Kenzo et Karter, ont été diagnostiqués avec un trouble du spectre autistique. Il lui manque un match d’après son calcul dans une équipe de NBA pour obtenir la sécurité sociale premium promise aux joueurs qui compilent 10 ans dans la ligue.

L’ancien coéquipier de Giannis Antetokounmpo, Jimmy Butler ou Damian Lillard n’en fait pas un sujet, porté par son désir de jouer : "Je ne pense pas à ça. Si ça arrive je serais content mais si ça n’arrive pas je serai quand même heureux je pense au prochain chapitre, il faut continuer à grandir." C’est en accompagnant l’un de ses fils à un examen médical qu’il a saisi quelques ressemblances avec lui.

Dans la foulée, l’arrière a aussi été diagnostiqué souffrant d’un trouble du spectre autistique. Enfant, il ne restait pas avec sa fratrie préférant s’enfiler des heures de shoot et de jeux vidéo, sans nouer de liens avec sa fratrie. "J’ai toujours su que j’étais un peu différent de tout le monde", expliquait Snell à Yahoo Sports l’an passé. "J’observais les enfants et les adultes autour de moi, comment ils se connectaient. Moi je ne trouvais pas de moyen d’entrer en relation. Le basket est la seule raison pour laquelle j’ai des amis".

Une nouvelle vie en France avec sa famille

Cet après-midi, à 16h, il va faire ses grands débuts pour son nouveau club sur le central de Roland-Garros. En demi-finale, de la super-Coupe, il va découvrir le basket français lors d’un beau défi face à Monaco. En Dordogne, il arrive sa femme, Ashley, et ses deux garçons. Il va trouver un club familial, peut-être ce qu’il avait besoin à cette époque de sa carrière. "Merci, au revoir" glisse-t-il dans un sourire en nous quittant.

Morgan Maury