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Mondiaux de cyclisme: quelle stratégie pour les Bleus pour décrocher l'arc-en-ciel ?

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Si ce sera "tous pour un" dans certaines équipes comme la Nouvelle-Zélande (G.Bennett) ou la Slovénie (P.Roglic), d’autres grandes nations du vélo à l’image de la France se retrouvent bien ennuyées pour la course en ligne des Mondiaux ce dimanche. Avec deux, trois voire quatre coureurs capables de l’emporter sur le parcours très montagneux d’Innsbruck, en Autriche.

Embêté, le sélectionneur français Cyrille Guimard ? "Pas du tout". Plutôt du genre adepte du proverbe "abondance de biens ne nuit pas". Et des biens, ou des moyens d’atteindre le Graal, il en aura cette année à Innsbruck (Autriche) sur la course en ligne des championnats du monde. Vingt-un ans après Laurent Brochard à San Sebastian, ils sont trois coureurs chez les Bleus à pouvoir légitimement prétendre au maillot arc-en-ciel de champion du monde ce dimanche: Julian Alaphilippe, Romain Bardet et Thibaut Pinot. Et même si le grand public n’a plus d’yeux que pour le premier (maillot à pois et deux victoires d’étapes sur le Tour de France 2018), aucun des trois ne fait apparemment plus figure de chef de file qu’un autre.

"Tout dépendra des circonstances de courses, on ne peut pas deviner avant, il faudra simplement bien appliquer tout ce qu’on se sera dit avant. Faire aussi en fonction du ressenti et de sensations de chacun la veille ou le matin de la course" explique Cyrille Guimard. On est de toute manière pas dans la même dialectique leader/équipiers que le reste de l’année, dans des courses avec des équipes de marque. On est tous là parce qu’on est fiers de porter le maillot de l’équipe de France, et peu importe qui gagne au final. On le veut tous ce maillot arc-en-ciel, on est tous là pour le même objectif collectif. Sinon, on ne vient pas en équipe de France."

Ménager les ego de coureurs qui n’ont pas forcément plus que cela d’atomes crochus et ne se côtoient guère qu’en tant qu’adversaires le reste de l’année sur les différentes courses (s’évitant parfois certaines saisons soigneusement jusqu’au Tour de France), voilà qui n’est pas chose des plus aisées pour le sélectionneur. Il a d’ailleurs dû s’assurer assez tôt dans l’été que tous les sélectionnés rameraient dans le même sens le jour de la course.

S’il n’avait pas de doutes pour certains, il a préféré multiplier les contacts pour d’autres. En créant des groupes de conversations dès le mois de juillet sur les réseaux sociaux avec les coureurs potentiellement sélectionnables, en discutant régulièrement avec eux. En leur inculquant coûte que coûte cette culture du maillot bleu-blanc-rouge qui lui avait lui permis à deux reprises de terminer sur le podium du championnat du monde dans les années 1970. 

Résultat de ce travail de fond, des mines réjouies au moment de s’installer à l’hôtel jeudi soir à Igls, près d’Innsbruck. Des sourires semble-t-il sincères lors de la photo de famille ce vendredi matin devant plusieurs médias, le moment de blaguer par exemple entre Romain Bardet et Thibaut Pinot. Le moment de faire un peu le show pour Julian Alaphilippe. Le moment pour tous les coureurs d’apprécier simplement le cadre idyllique d’un Tyrol ensoleillé, de ses montagnes rocheuses et de ses prairies toutes plus verdoyantes les unes que les autres, avant d’aller en reconnaissance sur le parcours.

L’Espagne rate son avion mais ne change pas de stratégie 

Et qu’en sera-t-il chez les autres nations majeures du vélo ? Si les Espagnols ont raté leur avion jeudi et ne sont arrivés à Innsbruck que ce vendredi, leur stratégie semble quant à elle assez claire. En l’absence de Mikel Landa, Alejandro Valverde monopolisera a priori à lui seul toutes les chances de succès dimanche. Même si le jeune Enric Mas, deuxième du dernier Tour d’Espagne, pourrait également s’illustrer pour la Roja.

Plus difficile de savoir ce qu’il en sera chez les Pays-Bas. Après sa médaille d’argent sur le contre-la-montre mercredi, Tom Dumoulin, l’un des grands favoris, s’est entraîné seul vendredi sur le parcours, où il a pu notamment croiser la route des Bleus, et même rouler quelques minutes avec eux. Kruijswijk, Kelderman ou Poels seront là pour l’épauler dimanche, mais pourraient eux aussi jouer les premiers rôles en fonction du déroulement de la course.

Côté colombien, Quintana, Lopez, Uran et Henao seront quatre immenses occasions de briller. "Une dream team, se félicite d’ailleurs Augustin Moreno, le vice-président de la fédération colombienne de vélo. Ils pourraient tous être leaders et gagner la course. Je n’ose pas me prononcer, ce sera si difficile... mais ils sont plusieurs en capacité de gagner dimanche." Certains parlent d’ailleurs de l’année de la Colombie. Le pays court après son 1er titre de champion du monde et n’a jamais paru aussi bien armé.

Mais il faudra aussi compter avec l’Angleterre et le punch des frères Yates (Froome et Thomas sont forfait), la Slovénie de Roglic ou encore l’Italie de Vincenzo Nibali. Le Squale de Messine a presque tout gagné dans son immense carrière. Tous les grands Tours, plusieurs grandes classiques. Mais il n’a jamais été champion du monde.

"Ce qui est sûr, c’est qu’il n’y a jamais eu autant de coureurs capables de l’emporter, conclut Cyrille Guimard. C’est pas comme quand ça se termine au sprint. Sur ce type de parcours, il n’y a que des coureurs qui ont leur mot à dire. Des grimpeurs ou des puncheurs."

Arnaud Souque, à Innsbruck