Guimard : « Même dopés, les Français ne gagneront pas le Tour »

Les Français collectionnent les victoires d’étape depuis le début du Tour. Ça vous surprend ?
Non, parce que Frédrigo ou Voeckler ne sont plus des débutants. Ils ont chacun la trentaine. Le jour où ils se retrouvent devant, ils peuvent gagner. Le succès que l’on n’attendait pas, c’est celui de Feillu en haut d’Arcalis. C’est la grosse différence par rapport aux autres années. L’équipe Astana n’a pas fait ce qu’il fallait faire au bon moment. Mais elle ne peut pas tout contrôler non plus.
Les échappées des Français semblent aller plus souvent au bout cette année. C’est juste une question de réussite ?
C’est aussi lié au découpage du Tour et aux positions au classement général. Les écarts ont été creusés avec les sprinteurs dès le contre-la-montre par équipes. Et comme il n’y a pas de bonifications, il n’y a pas de course entre eux pour aller chercher le Maillot Jaune. Et puis Cavendish domine tellement les arrivées au sprint qu’il y a beaucoup moins d’équipes qui vont au charbon pour aller chercher les échappées.
Comment expliquez-vous qu’il y ait autant de Français dans les échappées ?
Cela ne date pas d’aujourd’hui. Il y a très peu d’étrangers qui veulent aller dans les longs raids parce qu’ils n’ont pas les mêmes motivations. La plupart du temps, ils rentrent dans un schéma tactique collectif alors que le schéma des Français, c’est se montrer et passer à la télévision.
On a l’impression que le cyclisme français ne produit plus que des baroudeurs ?
Aujourd’hui, on parle plus du coureur qui fait 150 km devant que de celui qui va finir 5e dans une arrivée au sprint. Quand vous êtes devant, vous passez à la télé et vous avez les pleurs en bonus, si vous vous faites rejoindre à 2 km de la fin. Alors que celui qui finit 5e dans le sprint final n’aura pas une ligne. A l’étranger, on va parler de vous si votre leader gagne. Chez nous, on fait sa course tout seul. Chacun est un peu individualiste. On n’apprend pas à courir en équipe. Quand vous avez des coups de bordure, ce n’est pas des équipes françaises qui les montent. On ne sait pas emmener un sprint par exemple. Lorsque vous avez trois coureurs dans les quinze premiers, ça veut dire que chaque coureur a fait son sprint ! On n’a pas de coureurs capables de faire preuve d’abnégation pour son leader.
Les bonnes performances françaises sur le Tour sont-elles le signe que la lutte antidopage progresse ?
A un moment, il faut aussi se faire mal aux jambes. Vous pouvez doper tous les Français à l’EPO, ils ne gagneront pas le Tour. C’est quand même le potentiel des coureurs et leur capacité à le développer qui font les classements. A une époque, les étudiants marchaient aux amphétamines. Cela leur permettait de réviser plus longtemps le soir mais cela ne les rendait pas plus intelligents ! Essayer de réciter un poème si vous ne l’avez pas appris…