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Giro 2025: "C'est un autre phénomène qu'on a là", Ayuso ou Del Toro? Les boss d’UAE TeamEmirates ont tranché

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Leader de l’équipe UAE au début du Giro 2025, Juan Ayuso est tombé à la troisième place, à 1'26 de la jeune pépite du cyclisme, le Mexicain Isaac Del Toro. Qui sera le leader pour la troisième semaine dantesque de ce Tour d’Italie?

C’est la question qui titille tous les suiveurs de ce Giro 2025 assommé par l’équipe UAE TeamEmirates (4 coureurs dans les 14 premiers dont Del Toro, premier et Juan Ayuso troisième à 1’26 de retard, six secondes derrière le transparent Simon Yates): l’équipe UAE TeamEmirates va-t-elle se mettre à rouler pour le surprenant maillot rose Isaac Del Toro ou bien continuer à faire de Juan Ayuso son leader quitte à "sacrifier" l’actuel porteur du maillot rose, une image qui risque de faire beaucoup parler si jamais elle arrive.

Pour comprendre la portée du dilemme des patrons de l’équipe UAE, il faut aussi se souvenir que lors du Tour 2024, Juan Ayuso avait tellement rechigné à se mettre au service de Tadej Pogacar qu’il avait été exclu de l’équipe (officiellement victime du Covid le moins transmissible de l’histoire puisque personne d’autre de l’équipe n’avait été touché), et que depuis les deux hommes n’avaient pas été alignés ensemble sur une même course.

Après sa démonstration de l’an passé, Pogacar avait décidé de faire l’impasse sur ce Giro, ce devait donc être le moment d’Ayuso, 22 ans, coureur le plus prometteur du peloton. Patatras: après l’étape des chemins blancs, une autre pépite à peine plus jeune, le Mexicain Isaac Del Toro, prenait le rose et gardait plus d’une minute d’avance après le dernier contre-la-montre. Tout ça avec l’approbation bien visible sur les réseaux de Tadej Pogacar, jamais avare d’un compliment quand il s’agit d’enfoncer Ayuso.

Giro : Isaac Del Toro toujours maillot rose, et si c'était lui le véritable leader des UAE ?
Giro : Isaac Del Toro toujours maillot rose, et si c'était lui le véritable leader des UAE ?
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"Nous serons cohérents avec sa position"

Reste qu’avec une 36e place lors de son seul Grand Tour disputé, la Vuelta 2024, Isaac Del Toro, virevoltant sur son vélo toute la deuxième semaine, n'offre pas encore toutes les garanties sur une course de trois semaines alors que se profile une dernière semaine dantesque avec quatre étapes de haute montagne.

Après avoir ménagé la chèvre et le chou pendant une semaine, les patrons d’UAE ont finalement tranché et le team manager Matxin Fernandez l’a annoncé lors de la journée de repos: les UAE vont défendre le maillot rose de Del Toro, nouveau leader de son équipe. "Isaac a démontré qu'il est le plus fort de la course jusqu'à présent. Il est leader par ses propres mérites, nous l'aiderons à maintenir cette situation. Nous serons cohérents avec sa position."

Del Toro plus fort à la pédale, c’est l’avis de tous les suiveurs de ce Giro et même de certains de l’intérieur. "El Torito" s'est montré "le plus fort et de loin" dans ce Giro, selon l'avis du Colombien Egan Bernal, vainqueur du Tour de France en 2019. Facile même, au point de frôler parfois l'insolence comme dimanche lorsqu'il a enfilé tranquillement un gilet en plein col dans la roue de Bernal et Richard Carapaz qui grimaçaient, eux, de douleur.

En vérité, on ne voit que lui dans ce Giro où il promène son charisme naturel et un style pétillant qui renvoie à son grand maître chez UAE, Tadej Pogacar, avec lequel il échange souvent.

"Je crois qu'il croit en moi. Mais je ne suis pas Tadej Pogacar, il a un plus gros moteur que moi", assure Del Toro à qui Pogacar, à l'entraînement en ce moment, avait conseillé par texto d'attaquer lors de l'étape à Sienne, avant de poster une photo d'eux deux sur les réseaux sociaux.

De fait, l'éclosion de Del Toro rappelle celle de "Pogi" à la Vuelta 2019 où le Slovène avait remporté trois étapes et pris la troisième place de son premier grand Tour, avant de gagner dès l'année suivante le Tour de France.

Les deux hommes ont aussi en commun d'avoir gagné le Tour de l'Avenir, le Tour de France des espoirs. Même l'impression visuelle est troublante lorsque Del Toro se tient, comme le Slovène, penché en avant sur son vélo, le buste bien droit, au moment de grimper.

"C'est un autre phénomène qu'on a là", en déduit Fabio Baldato, le directeur sportif de Del Toro dans ce Giro.

"La star de demain"

Né sur les bords du Pacifique à Ensenada, en Basse-Californie, avant de s'installer à Saint-Marin à l'âge de 15 ans, le Mexicain vient comme Pogacar d'un pays sans tradition cycliste.

Au pays, on commence à s'enflammer - "imaginez ce que c'est d'avoir tout un peuple derrière vous", s'émerveille-t-il - et Raul Alcala, professionnel mexicain dans les années 80-90 voit déjà Del Toro "gagner le Giro".

"Il est destiné à faire de grandes choses. Il surprend tout le monde mais il a déjà montré de belles choses cette saison comme lors de sa victoire sur Milan-Turin", une des plus vieilles classiques du monde, a-t-il expliqué dans le journal Esto.

Pour Alex Carrera, l'agent de Del Toro, il est "important pour le cyclisme" d'avoir un coureur qui vient d'un autre continent que l'Europe. Selon lui, Del Toro, dont il loue aussi le professionnalisme, a "tout pour devenir la star de demain". Et il est plutôt bien placé pour en parler puisqu'il est aussi l'agent de Pogacar, toujours lui.

Pierre Koetschet avec AFP