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Teklehaimanot écrit l’histoire du Tour et de l’Afrique

Daniel Teklehaimanot

Daniel Teklehaimanot - AFP

A 26 ans, Daniel Teklehaimanot (MTN-Qhubeka) a crevé l’écran en se glissant dans l’échappée du jour. Si le coup n’a pas fait mouche, l’Erythréen s’est fait un nom et une place de choix dans l’histoire du Tour de France en devenant le premier coureur noir africain à endosser le maillot à pois de meilleur grimpeur.

En 2013, c’est à distance qu’il avait assisté à l’entrée fracassante de l’Afrique dans l’histoire du Tour de France. Le 4 juillet de cette année-là, le Sud-Africain blanc Daryl Impey (Orica-GreenEdge) devenait le premier Africain à endosser le maillot jaune. Deux ans plus tard et en l’espace de seulement de 6 étapes, c’est lui qui vient de s’approprier l’histoire. Et plutôt trois fois qu’une !

En faisant déjà partie de la première équipe africaine sélectionnée sur le Tour, à savoir MTN-Qhubeka. En devenant ensuite l’un des deux seuls coureurs noirs (avec son coéquipier Merhawi Kudus) de l’histoire à participer à la Grande Boucle. Et enfin, ce jeudi, en apportant sa touche très personnelle puisqu’il est devenu à la force du jarret le premier coureur africain de pure souche à revêtir le maillot à pois de meilleur grimpeur. "Jamais je n'oublierai cette journée, déclarait le natif de la région de Zoba Debu après le podium protocolaire. Je vis un rêve avec ce maillot prestigieux. Tout se bouscule dans ma tête. Ce n'est pas seulement un grand moment pour moi, c'est un grand moment pour l'Afrique toute entière." 

Il apprend le métier en Suisse

Ce coup de projecteur, Daniel Teklehaimanot ne le doit qu’à lui-même, lui qui a flairé le bon coup en se glissant dans l’échappée du jour et en raflant les points pour le maillot à pois. Ce sens de la course, l’Erythréen l’a acquis en Europe, plus précisément à Aigle en Suisse, où l’UCI y a son siège. Sur les bords du lac Léman, l’Union Cycliste Internationale prend sous son aile les coureurs issus d’horizons lointains ou qui manquent de moyens pour leur permettre de tenter d’éclore au plus haut niveau. A 20 ans, Teklehaimanot, né dans la région de Zoba Debub, va ainsi tourner le dos à un pays meurtri par des années de conflits et à ses onze frères et sœurs pour apprendre ses gammes.

« Il a connu une progression fulgurante », raconte Michel Thèze, le responsable du Centre Mondial du Cyclisme qui l’a repéré lors d’un championnat d’Afrique au Maroc et l’a attiré dans son centre d'entraînement financé par l'UCI. Tellement fulgurante que la science de la course lui échappait parfois. « Ça me rappelle une course où il n’avait pas compris pourquoi ses compagnons d’échappée ne collaboraient pas avec lui, poursuit Thèze. Il roulait tout simplement trop vite ! »

Quemeneur : « Il mérite amplement ce maillot »

La carrière de ce coureur élégant et racé va également s’écrire en accéléré. Après avoir signé son premier contrat en 2008 chez Amore & Vita – Mc Donalds, il garnit ensuite les rangs de la formation Cervelo (2010) comme stagiaire pro, Orica GreenEdge (2012-2013) avant de devenir leader de MTN-Qhubeka. Un statut qu’il semble assumer comme un chef. Un mois après avoir endossé le maillot à pois lors du Critérium du Dauphiné, il a donc récidivé ce jeudi sur les routes du Tour. Tout, sauf un hasard.

« Je le connais depuis un petit moment, j’ai couru souvent avec lui et puis, j’étais échappé au Dauphiné aussi où il a été meilleur grimpeur, raconte Pierrick Quémeneur, d’Europcar, échappé également avec lui ce jeudi. On ne veut pas dire que je l’ai laissé faire les grimpeurs parce qu’il est nettement plus fort que moi au niveau du sprint (rire) mais c’est bien pour la mondialisation. L’Érythrée, c’est un super pays de vélo. On avait Nathanaël Berane dans notre équipe l’année dernière. Ce sont des mecs extras et il mérite amplement ce maillot. »

G.Mathieu (avec PT)