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Voeckler en avait tellement envie

Thomas Voeckler

Thomas Voeckler - -

Vainqueur de sa troisième étape sur le Tour de France à Bellegarde-sur-Valserine, Thomas Voeckler n’imaginait pas en être capable il y a deux semaines. Blessé à un genou, touché par l’enquête ouverte contre Europcar, il prend sa revanche.

Quand on est échappé sur la route du Tour de France, il est interdit de se retourner dans les derniers mètres d’une étape. Mais là, ça bouillonne sous le casque. Impossible de ne pas regarder un peu en arrière. Parce que les jambes le font souffrir, que les adversaires n’ont pas encore rendu les armes. Mais surtout, parce que resurgissent dans sa mémoire quelques épisodes fraîchement douloureux. Un genou grinçant, une enquête sur son équipe, des sifflets le jour du prologue à Liège. Thomas Voeckler, le héros du Tour 2011, est obligé de se retourner un peu sur lui-même, de repenser à ces dernières semaines pour savourer encore plus ce mercredi la troisième victoire de sa carrière sur la Grande Boucle.

Et puis, il ferme les yeux, envoie un petit bisou et serre le poing. Tout s’efface. La blessure, les critiques, les attaques. Thomas Voeckler (Europcar), porteur du maillot jaune pendant 20 jours grâce à deux épopées (2004, 2011), a encore été le plus fort, le plus malin, alors que se rapprochait Bellegarde-sur-Valserine. Echappé depuis le début de cette 10e étape, il avait de la marge dans le premier col hors catégorie du Tour 2012, le Grand Colombier. Michele Scarponi (Lampre), Luis Leon Sanchez (Rabobank) et Dries Devenyns (Omega Pharma-Quick Step) avaient intérêt à s’accrocher à chaque à-coup du Français.

Mais à trois kilomètres de l’arrivée, le plus dur commence. Dries Devenyns sort et les autres ne bougent pas. Il s’énerve, peste contre l’Italien et l’Espagnol, beaucoup plus prompts à le reprendre, lui, plutôt que le Belge. Croire qu’il va jeter l’éponge, c’est se tromper. Dans la dernière bosse, Thomas Voeckler reprend le quadragénaire Jens Voigt (RadioShack) puis Dries Devenyns. Quelques minutes plus tard, l’homme qui craignait d’être forfait pour le Tour, est sur le podium, pour embrasser les hôtesses et enfiler le maillot du meilleur grimpeur. « Je suis très fier d’avoir gagné cette étape, d’avoir ce maillot. Mon Tour est réussi », explique-t-il. Réussi car inespéré.

Boosté par son petit Mahé

« Je n’aurais jamais pensé avoir ce bilan après huit jours de course, alors que j’étais encore chez moi à 12 jours du départ du Tour de France, confie-t-il. J’ai été obligé de m’arrêter pendant huit jours. C’est énorme. Je n’aurais jamais pensé m’en tirer aussi bien. » Vraiment ? « Il ne me surprend plus, répond son coéquipier Pierre Rolland, offensif lui aussi. C’est encore une belle leçon de vélo de la part du patron. C’est lui le chef ! On a encore beaucoup à apprendre. C’est un vrai régal d’être à ses côtés. C’est quelqu’un que j’apprécie beaucoup, quelqu’un d’humain. » Qui voit dans la présence de sa petite famille sur le bord de la route l’occasion de se surpasser.

« Ce n’était pas prévu, ils devaient aller à La Toussuire, dit-il à propos de Mahé, Lila et sa femme Julie. J’ai croisé le regard de mon petit garçon dans le « dernier grimpeur » de la journée (Col de Richemond). J’ai eu le sourire. D’un seul coup, j’étais en marge de l’échappée. La dernière fois qu’il m’avait encouragé alors que j’étais devant, c’était à la Flèche brabançonne et j’avais gagné. Je ne vais pas faire un roman à l’eau de rose. Mais j’ai eu quelques secondes de bonheur. » Comme tous les Français passionnés de vélo qui, au lendemain de l’arrestation de Rémy Di Grégorio, ont retrouvé la foi.

LP avec PYL, GQ, RP