Coupe de France: l’emblématique Anny Courtade veut redonner à l'AS Cannes sa grandeur d'antan

Elle est la Présidente la plus titrée de France et ne sait toujours pas dire non lorsqu’on la met au défi. En 2016, Anny Courtade quitte le RC Cannes après 25 ans de présidence décrochant 20 titres de championnes de France, 19 coupes de France et 2 Ligues des champions, son plus beau souvenir jusqu’ici. "Il y a le premier titre de champion de France mais la Champion’s League à Istanbul, c’est extraordinaire", se souvient la cheffe d’entreprise. "On était le plus petit budget d’Europe, il n’y avait que des hommes spectateurs, c’était un milieu hostile et quand j’ai entendu chanter la Marseillaise, j’étais pleine de fierté pour notre équipe, le sport en général et la France. On nous a dit que c’était un accident et l’année suivante en Pologne, on gagne une nouvelle fois, j’en frissonne encore. J’aimerais retrouver cette adrénaline qui existe dans le sport de haut niveau et non dans les affaires."
Alors quand il la voit quitter le volley-ball, le maire de Cannes, David Lisnard, saute sur l’occasion. "J’ai été élu maire en 2014 et le club, qui venait de déposer le bilan, descendait en 7e division. L’AS Cannes a une histoire et je pense qu’elle a un avenir. J’y suis attaché car c’est là que mon père a commencé sa carrière de footballeur professionnel, mon grand-père était un dirigeant et j’y ai vu comme tant d’autres débuter Zidane, Vieira, Micoud, Luccin, Frey… On a donc restructuré le club, j’ai mis Anny dans le comité directeur et je souhaitais qu’elle devienne Présidente. C’est une femme de rigueur et de passion et dans cet univers il faut les deux. Ce qu’a gagné le RC Cannes est colossal, c’est le fruit de l’engagement d’Anny Courtade qui sait faire confiance au talent, s’entourer de compétences et apporter un supplément d’âme et financier quand il le faut."
Mais Anny Courtade a longtemps refusé le poste de présidente avant de céder suite à la démission de Johann Micoud en 2019. "J’ai appris dans la presse que j’étais la nouvelle présidente. Le maire m’a dit ‘voilà tu as perdu trois ans’", dit-elle amusée.
Petite taille, gros caractère
Aujourd’hui en 5e division (N3), l’AS Cannes vise cette saison la montée mais doit batailler dur au sein d’un groupe relevé entre équipes du bassin marseillais et déplacements en Corse, parfois périlleux. La semaine dernière, Cannes se déplace sur la pelouse du leader, Furiani. Mené 2-0 à dix minutes de la fin, l’ASC parvient à décrocher le match nul (2-2). S’il a apprécié la force de caractère de ses joueurs, l'entraîneur Jean-Noël Cabezas a aussi pu admirer celle de sa Présidente. "Elle est allée engueuler le Président de Furiani parce que certaines choses ne lui plaisaient pas. Elle n’a peur de rien, elle ne doute de rien, elle fonce."
L’anecdote ne surprend pas Victoria Ravva, ex-internationale française et mythique joueuse du RC Cannes ère Courtade entre 1995 et 2015. "Elle avait son caractère de caca, il faut le dire, se marre la native de Tbilissi, en Géorgie. Anny pouvait venir vers nous et avec ses 1,63m nous regarder de bas en haut et nous engueuler comme des enfants de cinq ans. Des fois j’avais peur d’elle, on avait peur de sortir du vestiaire parce qu’elle était impressionnante."
Mais la collectionneuse d’art est, à terme, toujours appréciée par les joueurs qui croisent sa route. "Elle est très proche de nous, admet le gardien de l’AS Cannes, Florian Verplanck, titulaire ce samedi face à Dijon en Coupe de France. C’est quelqu’un très à l’écoute qui nous parle régulièrement, elle vient souvent aux entraînements, vient voir tous les matchs. On la sent derrière nous, ça nous pousse à lui rendre ce qu’elle nous donne au quotidien." "Ça amuse beaucoup les autres présidents que j’aille à tous les matchs", sourit Anny Courtade notamment proche de Jean-Pierre Rivère son homologue niçois. "Il faut leur montrer qu’on les aime, qu’on partage les joies et les peines. C’est comme dans l’entreprise avec les collaborateurs, il n’y a que dans l’échange qu’on s’enrichit."
De l’échange, il y en a eu pendant 20 ans entre Anny Courtade et Victoria Ravva. "Elle connaissait tout de nos vies et dès qu’il nous arrivait le moindre problème elle nous aidait, confirme l’ex-volleyeuse. Elle était maternelle avec la plupart et c’est vrai qu’elle nous prenait pour ses filles. Un jour Charlotte, sa vraie fille, m’avait d’ailleurs dit ‘Si elle avait voulu avoir une autre fille, ç’aurait été quelqu’un comme toi’".
"Cinq à sept ans pour retrouver La Ligue 2"
Aujourd’hui chargée de l’évènementiel au sein du club de volley de l’AS Cannes, Victoria Ravva s’inspire beaucoup de son ancienne présidente. "J’ai beaucoup appris d’elle. Ma réussite dans ma vie professionnelle, je lui dois un peu parce que c’était mon exemple. Je voyais comment elle fonctionnait et s’imposait dans un milieu masculin. Cette aventure avec elle a été une leçon de vie incroyable." L’entraîneur de l’AS Cannes se sert lui aussi de la figure de l’octogénaire pour faire passer certains messages. "Elle apporte de la rigueur et veut réussir dans tout ce qu’elle fait", résume Jean-Noël Cabezas: "Je me sers d’Anny dans mon discours car c’est quelqu’un qui ne lâche rien."
Et Cannes ne devra rien lâcher pour remplir son objectif de montée afin de retrouver le monde profession,nel. "Ce club n’est pas du tout à la place qu’il devrait être et notre projet est de, sur cinq à sept ans, retrouver la Ligue 2" affirme la Présidente qui a passé plus d’une cinquantaine de rendez-vous avec d’éventuels investisseurs ou repreneurs en douze mois. "Il y a un vrai intérêt pour l'AS Cannes qui a connu de grandes vicissitudes, il faudrait que le club retrouve un rang digne de son passé en mémoire et en honneur de Zidane, Bellone, Lambourde, Luccin, qui ont fait sa réputation et son histoire."
Et cela passera par une montée en N2 en fin de saison. A la question de la préférence entre une Coupe de France ou une accession à l’échelle supérieure pour la saison prochaine: "Les deux mon capitaine, répond Courtade. J’ai toujours été ambitieuse. Vous imaginiez l’affiche PSG-Cannes ? Ce serait extravagant. En Coupe de France, on s’attend toujours à des surprises phénoménales." Avant cela, il faudra passer Dijon (L2) après avoir sorti Rodez L2) aux tirs au buts lors du tour précédent. Heureusement, Anny Courtade a la recette du succès.