Halilhodzic règle ses comptes

Le technicien bosniaque n'a toujours pas digéré son éviction de la sélection ivoirienne - -
Vahid Halilhodzic, comment expliquez-vous ce licenciement de votre poste de sélectionneur de la Côte d'Ivoire ?
C'est une décision politique, évidemment ! Je pense que ce ne se serait pas produit ailleurs qu'en Afrique. Nous avons disputé 23 matchs sans connaître la moindre défaite et après le 24e match que nous perdons dans des circonstances bizarres (NDLR : élimination en quart de finale de la Coupe d'Afrique des Nations contre l'Algérie (2-3) alors que la Côte d'Ivoire menait 2-1 à la 92e minute), je suis licencié. Ça doit être une première dans l'histoire du football. La semaine dernière encore, Didier Drogba m'a appelé pour m'apporter son soutien et me dire qu'il ne comprenait pas la décision de la Fédération. Quasiment tous les joueurs m'ont appelé d'ailleurs. On avait instauré un système de fonctionnement digne des meilleures équipes de la planète et tout cela s'est envolé ! Mais quoi qu'il arrive je soutiendrai la Côte d'Ivoire au Mondial.
Vous semblez profondément meurtri...
J’ai dû tout construire avec cette sélection. Je me souviens, lors du premier rassemblement, seuls six joueurs sont venus s'entraîner. Alors, j'ai dû organiser une grande réunion avec tout le monde où je leur ai dit : « Les gars ! L'amateurisme maintenant, c'est terminé ! » Et ça a été l'acte fondateur des succès de cette équipe. Certaines fois, il y avait même quelques joueurs qui me reprochaient de n'être pas assez dur avec eux. Tout fonctionnait idéalement : on avait les résultats, on travaillait bien à l'entraînement, il y avait un respect mutuel. Je pense qu'on est capable de faire une grande Coupe du monde.
Quels sont les points forts et les points faibles de la sélection ivoirienne aujourd'hui ?
Je dirais que l'équipe est composée de grands joueurs mais que ce n'est pas encore une grande équipe. Certains des meilleurs joueurs ne veulent pas jouer ensemble. Mon travail, c'était de surmonter cela, de faire en sorte que tout se passe bien, qu'il y ait un esprit d'équipe. Est-ce que cela veut dire qu'il faut laisser de grands joueurs sur le flanc ? C'est possible ! Je pense que la défaite contre l'Algérie a pu servir le groupe parce qu'elle a révélé certaines fractures internes. En trois ou quatre mois, j'aurais eu le temps de réparer ces fractures. Avec le nouvel entraîneur, ce ne sera pas le cas car il n'aura que 20 jours pour préparer le Mondial.
Est-ce que vous aviez déjà prévu les rencontres de la Coupe du monde, notamment celle opposant la Côte d'Ivoire au Brésil ?
Bien sûr ! Depuis fort longtemps ! L'objectif, c'était de vaincre le Portugal, faire match nul contre le Brésil et gagner contre la Corée du Nord avec le plus de buts possibles. Ainsi, nous aurions terminé premiers du groupe et nous aurions évité l'Espagne en huitièmes de finale. Tout était prêt ! Une Coupe du monde ne se prépare pas en deux jours mais en six mois. J'avais élaboré une stratégie pour profiter des faiblesses du Brésil. Malheureusement, ça ne servira à rien ! En Afrique du Sud, ça aurait été différent de la CAN. On n'aurait eu rien à perdre et tout à gagner. Ce statut d'outsider nous allait comme un gant, c'est pour ça que je pense qu'on aurait pu faire une grande Coupe du monde.