
Miracle mode d’emploi

Diego Forlan - -
Avec sa mine de gamin effronté et ses yeux rieurs, Luis Suarez est à l’origine du miracle céleste face au Ghana vendredi soir (1-1, 4-2 tab). En refusant obstinément que le ballon ne pénètre le but de Muslera dans le temps additionnel de la prolongation, l’attaquant de l’Ajax a permis à son équipe de survivre et de se qualifier pour les demi-finales d’une Coupe du monde, une première en Uruguay depuis quarante ans et le Mundial 1970. « Le penalty de Luis a une valeur énorme, affirme Sebastian Abreu, auteur d’une panenka décisive lors de la séance de tirs au but. Il va rester graver dans l’histoire de la Coupe du monde. » « Ce penalty, c’est tout l’Uruguay qui l’a dévié sur la barre, poursuit Diego Pérez. Je ne vois pas d’autres explications à donner. »
Entre pleurs et fou rire, le sacrifié, qui est d’ores et déjà suspendu pour le match de mardi face aux Pays-Bas, résume son état d’esprit. « Je l’ai fait pour que mes collègues puissent aller aux tirs aux buts et gagner. Je n’ai pas eu le choix sur le moment. Quand j’ai vu que le penalty de Gyan est passé au-dessus, ça a été une immense joie. La main de Dieu, c’est moi ! » « La main de Dieu et de la Sainte-Vierge », corrige aussitôt Oscar Tabarez.
Diego Pérez souligne en tout cas le rôle déterminant de Tabarez à la pause. « Le but de Muntari dans le temps additionnel de la première période nous a fait très mal, explique le Monégasque. Le coach nous a remotivés dans le vestiaire. Il a eu des mots très forts et cela nous a permis d’entamer la seconde période avec un autre comportement. »
La bataille du Soccer City stadium a laissé des traces dans les rangs charruas. « Je suis mort de fatigue », confie Pérez qui a été victime d’une béquille. Nicolas Lodeiro, lui, souffre d’un trait de fracture au pied gauche. Il est d’ores et déjà forfait pour la demi-finale, mardi, et le reste du tournoi alors que le capitaine Lugano (entorse du genou droit) est très incertain.
Abreu : « Nous sommes en train d’écrire l’histoire »
Car la demi-finale arrive vite. « Ce sera un match très difficile », affirme Tabarez. « Il faut penser à se reposer, souligne Diego Forlan. Que les gens fêtent notre qualification comme ils l’entendent. Nous devons déjà penser à mardi parce qu’un autre match nous attend. Notre objectif et nos rêves en dépendent. » « Nous sommes en train d’écrire l’histoire, enchaîne Abreu, mais nous avons d’autres rêves. Comme on dit chez moi, maintenant que nous sommes au bal, il faut continuer à danser. »
Si nos Bleus délavés ont eu la curiosité de suivre ce quart de finale de feu, ils auraient pu constater que la générosité, la combativité, l’absence de calcul et l’abnégation peuvent permettre à des joueurs modestes de se transcender et de renverser des montagnes. C’est, en tout cas, ce qu’ont prouvé les joueurs d’Oscar Tabarez, samedi soir, au Soccer City stadium de Johannesburg.