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Pietton : « Rousseff est en passe de gagner son pari »

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Après une semaine de compétition, Denis Pietton, ambassadeur de France au Brésil, dresse un bilan positif de l’organisation et du déroulement de ce Mondial 2014.

Denis, comment vivez-vous ce début de Mondial, après les craintes dues aux retards, aux manifestations ?

C’est vrai qu’il y avait beaucoup de questions sur ce Mondial. Il y a eu des critiques sur les coûts supportés par le Brésil. Il y a un débat au Brésil qui continue, mais qui s’est quand même beaucoup atténué depuis le début de la Coupe. Alors que les fans de l’équipe brésilienne prenaient du temps pour se mobiliser, on a assisté quelques jours avant le premier match du Brésil contre la Croatie, à un engouement et les gens ont commencé à rentrer dans la compétition. Je dirais que le Brésil est redevenu le pays du football tel qu’on le connaît, donc je crois que cette Coupe du monde a bien commencé. Ce qu’on en sait c’est qu’il y a très peu de manifestations. Techniquement, les choses se passent plutôt bien. Il y a ici ou là quelques incidents. Par exemple, il n’y a pas eu les hymnes nationaux, lorsque l’équipe de France a joué à Porto Alegre, mais d’une manière générale, il y a une bonne organisation et les choses se passent bien, notamment dans les aéroports pour les transports.

Avez-vous eu des craintes ?

On dit qu’il y a une manière de faire du Brésil qui fait que, pour les choses qui ne vont pas pendant longtemps, d’un seul coup à l’approche de l’évènement, les choses s’arrangent. Je crois que c’est un peu le cas. Alors c’est vrai, certains stades n’ont pas été terminés complètement, mais je crois que, d’une manière générale, ça n’a pas gêné la compétition et les choses se passent normalement. Je crois que la présidente Dilma Rousseff qui a dit qu’au Brésil, on allait faire la Coupe des Coupes, est peut-être en passe de gagner son pari, du point de vue de l’organisation. 

Cet événement revêt-il pour la présidente un enjeu diplomatique et électoral important ?

C’est très important, parce que le Brésil se situe dans une séquence, en fait. C’est un grand pays émergeant, tout le monde le sait, c’est un pays qui compte maintenant du point de vue économique, du point de vue politique. C’est un pays qui, de ce fait, prend sa part dans les grands événements internationaux. Il y a eu la Coupe des Confédérations, que le Brésil a gagné, il y a eu les journées mondiales de la jeunesse, la venue du Pape, il y a maintenant la Coupe du monde et il y aura les Jeux Olympiques de Rio, donc pour le Brésil, c’est un peu un test. C’est très important de prouver au monde que le Brésil est un grand pays qui sait organiser des évènements de nature universelle et qui arrive à le faire très bien. »

« Une étape vers les JO »

Est-ce important que le parcours du Brésil soit réussi pour que le climat de fête perdure jusqu'à la fin de la compétition ?

Je suis un supporter de l’équipe de France, bien évidemment, mais je souhaite que l’équipe du Brésil, qui a des débuts un peu difficiles notamment avec le 0 à 0 contre le Mexique, aille le plus loin possible, parce que je crois que tant que l’équipe du Brésil sera dans la complétion, l’ambiance restera extrêmement positive. Si l’équipe du Brésil devait être éliminée, peut être que l’ambiance changerait un petit peu, mais je crois que le souhait de tous, c’est que le Brésil aille le plus loin possible, pour le succès de la Coupe. 

Quelle est la place de la France au Brésil ?

On a à peu près trente mille ressortissants français au Brésil, principalement dans les régions de Sao Paulo et de Rio, mais aussi un peu partout au Brésil. Economiquement, la France est très présente. On est le quatrième investisseur international au Brésil. Tout le CAC 40, les grandes sociétés sont présentes et heureuses d’être au Brésil. Politiquement, les relations sont très bonnes, le président Hollande est venu ici en décembre, pour une visite d’état. C’était la visite retour, après la visite de la présidente, donc l’image de la France est très positive. Elle a une image très forte du point de vue culturel, du point de vue universitaire, du point de vue de la recherche. Nous sommes le premier partenaire du Brésil en termes de recherche et de plus en plus d’étudiants brésiliens vont d’ailleurs en France et de plus en plus d’étudiants français viennent au Brésil, ce qui est très souhaitable, si on veut avoir avec le Brésil une relation équilibrée de réciprocité. 

Quel enjeu revêt cette Coupe du monde pour la France ?

Il y a toujours en enjeu quand il y a une Coupe du monde. Je veux dire que c’est un enjeu d’image, bien évidemment. Plus la France ira loin, plus on parlera de la France, plus ce sera positif pour notre pays. Mais je dirais que l’image, comme je viens de le dire, que nous avons est bonne et je ne crois pas que la Coupe du monde influera profondément. Ce qui est important pour nous maintenant, puisque la Coupe du monde c’est presque du passé, on est en plein dedans, ce sont les JO. Les JO de Rio sont très importants pour nos entreprises et beaucoup de nos entreprises sont déjà très bien positionnées. Par exemple, c’est Atos, la société informatique qui s’occupe de toutes les compétitions pour tout ce qui concerne l’affichage des résultats, etc. Il y a beaucoup d’autres choses qui se font, notamment en matière d’évènementiel autour de ces Jeux Olympiques. Alors oui, cette Coupe du monde, c’est une étape, à mon sens, vers les Jeux Olympiques. 

« La France a une image très forte au Brésil »

Quelle est l'image de l'équipe de France

Il y a une histoire entre le Brésil et l’équipe de France. Les Brésiliens gardent un très mauvais souvenir de la finale 1998. Ça reste dans les mémoires. Je ne suis pas sûr que le peuple brésilien dans son ensemble soit ravi de la qualification des Bleus. Je crois que l’image est en train de changer, parce que les Brésiliens voient qu’on a une bonne équipe. Une équipe jeune, une équipe qui a de l’ambition, donc on verra comment va se passer le reste de la compétition. 

Vous étiez auprès des Bleus lors du premier match, quel est votre ressenti ?

J’ai trouvé qu’il y avait une très bonne atmosphère, j’étais à Porto Alegre pour le match contre le Honduras. Le public était présent, les supporters français étaient très présents. Je les ai rencontrés à la casa bleue, avant, après le match, il y avait une ambiance extraordinaire. Madame Vallaud-Belkacem, notre ministre, était là. J’ai trouvé que la réception que nous avons eu à Porto Alegre était tout à fait excellente et je crois que c’est ce qu’il va se reproduire dans toutes les villes du Brésil où la France jouera. 

Sur le plan local, ici à Brasilia, on a l'impression qu'on ne vit pas la Coupe du monde de la même façon

C’est une ville très spéciale, elle a été conçue par des génies de l’urbanisme qui ont voulu faire une ville nouvelle, une ville d’avenir, une ville tournée vers l’intérieur du Brésil ce qui fait que la géographie et l’organisation de la ville sont un peu spéciales. C’est une ville qui compte et maintenant nous avons des gens qui sont nés à Brasilia, même si la ville est née dans les années 60, qui se sentent de Brasilia. C’est une ville qui compte, c’est devenu par exemple un nœud aérien important pour le pays. 

Est-ce que vous sentez une ambiance Coupe du monde ici ?

Je pense qu’on la sent moins, effectivement, que dans les grandes villes traditionnelles comme Rio de Janeiro ou Sao Paulo. 

Propos recueillis par Julien Richard