Quand les spécialistes critiquent Domenech

Même dans son milieu et sa corporation, le sélectionneur de l’équipe de France est loin de faire l’unanimité. Etat des lieux.

Pour une majorité de Français mordus de foot, mais aussi de spécialistes, Raymond Domenech n’est pas au niveau de sa fonction. Sa communication désastreuse et arrogante, son manque de stratégie et de direction, ses choix de jeu et d’hommes sont autant de handicaps. Le pire est qu’il semble ne jamais se remettre en question. La dernière charge à son égard, signée Zinedine Zidane sur Canal +, est sans ambiguïté. « Le problème vient peut-être du sélectionneur. Ce n'est pas un entraîneur. Il a fait une sélection et doit les faire jouer ensemble. Il faut mettre son ego de côté et travailler ensemble. Le collectif doit primer et c'est ce qu'on n'a pas vu durant le match contre l’Uruguay. » De Guy Roux à Elie Baup, ils sont nombreux les techniciens à critiquer ouvertement les choix et les méthodes de leur collègue. Du rarement-vu à ce niveau.

Personnage modéré, l’entraîneur de l’AJ Auxerre, Jean Fernandez, s’en prend plus volontiers aux 23 Bleus pour expliquer la grisaille qui entoure la bande à Domenech. « On lui fait un faux procès. Le mieux placé pour gérer les affaires aujourd’hui, c’est lui. C’est aux joueurs de se prendre en charge. » Sur le jeu des Bleus, l’entraîneur bourguignon est, en revanche, plus critique. « Il y a une chose qui manque à cette équipe, c’est la vitesse. Dès qu’on récupère le ballon, il faut aller plus vite vers l’avant. A ce niveau là, les Allemands nous ont donné une leçon de football offensif. Il faut travailler là-dessus. » L’entraîneur du Stade Rennais, Frédéric Antonetti, va plus loin dans l’analyse du jeu des Bleus qui, selon lui, manque de liant. Une pierre de plus dans le jardin de Domenech. «Il y a un excès d’individualisme dans cette équipe et cela ne date pas d’aujourd’hui. Les Bleus n’arrivent pas à jouer ensemble. L’équipe de France sera beaucoup plus à l’aise lorsqu’elle affrontera une équipe qui joue et qui n’évolue pas en contre, comme c’est souvent le cas au premier tour. La difficulté pour la France, c’est le premier tour. Si elle passe, elle peut aller loin. »

Girard : « Arrêter de se prendre pour ce qu’on n’est pas »

L’ancien sélectionneur des Espoirs, René Girard, qui a connu Domenech à la DTN, est plus nuancé. « Domenech ? Je ne m'identifie pas du tout à lui. Il a ses idées. Ce ne sont pas les miennes. Mais ce n’est pas le moment de sortir les fusils. Cela fait six ans que ça dure. Il faut respecter qu'on soit d'accord ou pas. » L’entraîneur de Montpellier accable davantage les joueurs. « Pour l'instant, on a des joueurs, on n'a pas d'équipe. Ce sont les joueurs qui sont sur le terrain, il faut arrêter de se prendre pour ce qu'on n'est pas. Cette équipe n'a rien gagné. Elle a tout à prouver et pour le prouver, il faut aller au charbon, ne pas se poser de questions, et pas de "moi je veux ci, moi je veux ça…" » En filigrane malgré tout, la responsabilité d’un sélectionneur coupable de ne pas tenir son effectif. Inquiétant à la veille d’un match crucial face au Mexique.

M.B à Knysna avec J.R à Durban et S.O