Sagnol : « Je n’ai jamais voulu dire "Ta gueule" à Marcel Desailly ! »

L'aboyeur des Bleus à remis ses maillots d'international et du Bayern au placard. - -
Willy Sagnol, depuis quand cette décision vous trotte-t-elle dans la tête ?
C’était plus une obligation qu’autre chose. J’ai consulté pas mal de médecins pour essayer de trouver une solution à mon problème. J’ai un nerf coincé dans la cicatrice issue de mon opération du tendon d’Achille. A chaque consultation, je me suis heurté à une réponse négative. Même si c’est moi qui ai pris cette décision, les docteurs l’ont aussi prise pour moi. J’ai mis du temps, car je me suis toujours dit qu’avec les nouvelles techniques, j’allais trouver un chirurgien pour m’opérer. Malheureusement, ce n’est pas le cas. L’opération est possible, mais les risques encourus sont beaucoup trop importants. Je risque de me retrouver sans aucune sensibilité dans le pied. Cela aurait pu m’amener à marcher avec une canne ou une béquille.
Cela vous pose-t-il un problème dans la vie de tous les jours ?
J’ai toujours des douleurs quand je marche. Voilà pourquoi je n’essaye même pas d’entretenir l’espoir. D’après les médecins, le nerf va mourir ou se détacher de lui-même à terme. Mais ce processus peut prendre plusieurs années.
Comment avez-vous vécu les heures qui ont suivies l’annonce de votre retraite ?
Ça s’est très bien passé. Le plus dur a été de prendre la décision. Ensuite, il fallait juste l’expliquer aux gens. Il y avait un peu d’émotion. Uli Hoeness, le manageur général du Bayern, a eu des mots très gentils envers moi. C’est un Allemand typique. Normalement, il ne se laisse pas trop aller à de telles déclarations d’amitié.
Cela fait quand même plusieurs mois que vous réfléchissez à votre retraite…
A partir de fin novembre, je me suis vraiment posé la question de savoir si quelqu’un allait pouvoir trouver une solution. Les deux derniers mois ont simplement confirmé ce que je pensais depuis un moment.
Comment envisagez-vous votre avenir immédiat ?
Pour l’instant, je ne sais pas trop. Je n’ai pas forcément l’envie de me retrouver tout de suite sur le terrain. Je dois d’abord faire la part des choses. Si je me mettais à entraîner, je serais sans doute confronté à des joueurs avec lesquels j’ai joué. Or pour moi, un entraîneur doit toujours imposer le respect envers ses joueurs. Il est également important d’avoir ses diplômes. Entraîner, c’est un vrai travail, pas seulement une envie. A terme, je pense m’inscrire dans un stage pour apprendre le métier. Pour l’instant j’aspire plus à un rôle structurant dans un club. J’ai vu comment était organisé le Bayern Munich. J’aimerais éventuellement aider un club français à se structurer, afin qu’il devienne de plus en plus fort. Nos clubs sont très bons au niveau de la formation. Mais en ce qui concerne les structures, il y a peut-être un manque. Mais là encore, il s’agit d’un métier auquel je dois être formé.
A Monaco, Jérôme De Bontin pourrait-il penser à vous ?
J’ai déjà eu des discussions avec le président monégasque. Je le connais depuis très longtemps. On entretient ensemble des relations hors football. On s’est rencontré plusieurs fois, notamment pour aider l’AS Monaco. Ce sont des choses qui se feront peut-être un jour. Mais pour l’instant, je n’en ai aucune idée. Ce n’est pas ma priorité.
Avez-vous envie d’aider un club que vous avez connu ?
Que ce soit Monaco ou Saint-Etienne, l’envie existe. J’aimerais beaucoup le faire. Ce sont des clubs que j’ai aimés et c’est une possibilité. Mais il faut aussi trouver des gens réceptifs en face. Et là, c’est plus difficile.
Lors de la Coupe du monde 2006, vous aviez lâché un cinglant « Ferme ta gueule, l’ancien » à destination des anciens Bleus devenus consultants. Pourriez-vous aujourd’hui passer de l’autre côté de la barrière ?
C’est aussi une possibilité. Je tiens à revenir sur cette phrase, qui a été sortie de son contexte. Je ne l’ai jamais prononcée. Le journaliste me posait une question sur les anciens joueurs, et pas seulement ceux de l’équipe de France, qui critiquaient les Bleus. Il m’a demandé ce que je pouvais leur répondre et j’ai expliqué que je voulais leur dire « ta gueule ». Ce n’était pas dirigé contre Marcel Desailly, comme j’ai pu le voir écrit partout. C’était un ras-le-bol général, car j’avais l’impression qu’en 2006, il était de bon ton de critiquer l’équipe de France. Je pensais sincèrement que les Français voulaient voir leur équipe triompher, et pas échouer minablement après deux matches.
En devenant consultant, auriez-vous la crainte de donner des leçons ?
J’ai toujours été un partisan de la critique, qu’elle émane des anciens joueurs, des entraîneurs ou des journalistes, à partir du moment où elle est constructive. Quand on critique quelqu’un parce que c’est la mode, ça me dérange.
Que pensez-vous des critiques à destination de Raymond Domenech ?
J’espère que tout le monde souhaite que l’équipe de France se qualifie pour la Coupe du monde 2010 et y fasse un beau parcours. Après, si les Bleus sont critiqués, il faut que cette critique serve à quelque chose. Ça ne sert à rien d’attaquer le sélectionneur. Il va de toute façon rester en place. Il faudrait plutôt que tout le monde donne ses idées pour faire progresser l’équipe.
Entre Sagna, Fanni, Clerc et Réveillère, qui est le plus à même de vous succéder ?
Il faut faire avec le réservoir français. Ce sont tous les quatre de très bons joueurs. Sagna a fait une très bonne saison à Arsenal l’année dernière. Cette année, c’est peut-être un peu plus délicat. Il est toujours plus difficile de confirmer que de prouver. Rod Fanni est dans cette configuration. Il est en train de prouver qu’il a un gros potentiel. Le plus dur pour lui va également être de confirmer. Je leur souhaite vraiment à l’un et à l’autre, ainsi qu’à François Clerc, qui doit revenir de blessure, de faire le maximum. C’est l’équipe de France qui en tirera profit.
Quel est le meilleur souvenir de votre carrière ?
Je n’en ai pas vraiment. Pendant toute ma carrière, j’aurai vécu une expérience humaine extraordinaire, avec de bons et de mauvais moments. Ça m’a fait avancer et ça m’a permis de m’enrichir en tant que personne. J’ai mûri avec le football, et j’espère que ça continuera ainsi.
Avec le Bayern Munich, vous avez tout gagné…
C’est toujours difficile de dire qu’un titre compte plus qu’un autre. Pour le public, une Ligue des Champions est peut-être plus importante qu’un championnat. Mais les championnats ou les coupes sont souvent le résultat du travail de toute une année.