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Maroc-Espagne : la bataille acharnée pour les talents binationaux

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Partenaires sur le papier dans l’organisation du Mondial 2030 avec le Portugal, le Maroc et l’Espagne se livrent en coulisses à une guerre feutrée mais acharnée, celle de l’attraction des jeunes footballeurs binationaux. Chaque génération voit éclore des pépites hésitant entre le drapeau de naissance et celui de leurs origines. De Madrid à Rabat, des académies aux fédérations, cette lutte symbolise une nouvelle ère du football mondial, où la diplomatie sportive se joue désormais en coulisse.

Au-delà du terrain, la rivalité Maroc–Espagne s’étend dans les bureaux des fédérations. Si les deux pays collaborent pour accueillir la Coupe du monde 2030, leur vision des sélections nationales est traversée par des intérêts divergents. Le Maroc, porté par son ambitieuse Académie Mohammed VI, multiplie les offensives en Europe, et plus particulièrement en Espagne, pour convaincre les jeunes talents issus de la diaspora de rejoindre les Lions de l'Atlas. Dans le camp d’en face, la fédération espagnole s’emploie à verrouiller ses pépites, consciente que la richesse de son vivier est désormais convoitée.

Hakimi, symbole d’un choix de cœur

Le cas d’Achraf Hakimi reste l’illustration la plus éclatante de cette bataille. Formé au Real Madrid, courtisé par l’Espagne, il a finalement choisi de porter le maillot du maroc, le pays de ses parents. Un choix qui, rétrospectivement, a contribué à hisser le Maroc en demi-finale du Mondial 2022, marquant une génération entière. Le latéral du PSG est devenu le visage d’un projet marocain qui séduit de plus en plus de binationaux: rejoindre une sélection où la concurrence est moins écrasante qu’en Espagne, mais où l’ambition et le prestige ne cessent de croître ces dernières années.

Des talents ballotés entre deux drapeaux

La liste des joueurs ayant ballotés entre les deux fédérations est lognue. Brahim Diaz, international espagnol jusqu’en U21, a fini par répondre à l’appel du Maroc. À l’inverse, Lamine Yamal, prodige du Barça, a choisi la Roja malgré les avances insistantes du royaume chérifien. Tout comme Munir, Rachad Fettal, Thiago Pitarch et bien d’autres, ils incarnent cette génération tiraillée, où chaque décision devient affaire de stratégie familiale, de perspectives sportives… et de sensibilité identitaire.

Un vivier espagnol au cœur de la stratégie marocaine

La diaspora marcaine vivant en Espagne représente plus d'un million de personne. Pour la Fédération royale marocaine, c’est une manne à exploiter. Les recruteurs scrutent les divisions de jeunes, guettant chaque profil prometteur. La CAN U17 remportée par le Maroc en 2023 l’a prouvé : trois joueurs de l’effectif étaient nés en Espagne (Ismail El Aoud, Ziyad Baha, Ilyas El Arbaoui). Désormais grâce aux règles de la FIFA, un footballeur peut basculer d’une sélection à l’autre tant qu’il n’a pas joué plus de trois matchs avec l’équipe A. Une flexibilité qui attise les convoitises. Une bataille invisible pour les talents binationaux qui rappelle celle de la France et de l'Algérie depuis plusieurs années maintenant.

Maxence Mullié