Euro 2016 : Daniel Riolo débriefe la phase de poules

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Bien sûr il y a la Grèce 2004. C’est l’exemple parfait, « la tarte à la crème du tout est possible ». La Grèce a effacé le Danemark 1992 sans qu’on ne sache jamais lequel de ces deux exploits étaient le plus inattendu. Mais qu’importe. Laissons de côté les choses fracassantes et essayons, à la lumière des dernières compétitions, d’y voir un peu plus clair dans cet Euro.
Depuis 2008, le foot est dominé par l’Espagne et l’Allemagne. Trois titres pour l’Espagne, un pour l’Allemagne + une finale et deux demies. Deux sélections qui dans leurs principes de jeu, leur idée générale, sont quasi sœurs. Ces deux équipes sont encore en course et rien ne nous interdit de penser qu’elles n’iront pas encore une fois loin dans cet Euro. Le parcours un brin poussif de l’Allemagne et la défaite de l’Espagne, qu’on pensait redevenu géante, devant la Croatie, sont toutefois venus rappeler que rien n’était figé. D’abord il y a l’idée qu’entre la phase de poule et la suite, c’est comme si on changeait de compétition. En 2008, vous vous souvenez du favori au sortir des groupes ? Les Pays-Bas ! 9 points, 9 buts. Italie et France largement battus. Puis la Russie et la défaite 3-1. La Russie est énorme, Archavin future star ? Non. Défaite 3-0 face à l’Espagne et Archavin n’a plus jamais joué à ce niveau. Cette même Espagne qui venait de passer aux pénos devant les champions du monde Italiens. Une série de pénos, un virage vers la domination mondiale et le fabuleux triplé !
Quatre ans plus tard, personne n’attend l’Italie qui vient de se planter au Mondial 2010. Une phase de poule poussive, puis Angleterre, Allemagne et une finale ! On pourrait aussi évoquer la phase de groupe de l’Espagne en 2010, celle de l’Allemagne en 2014… Le passé indique donc qu’une nouvelle compétition va débuter. Pour quelqu’un comme moi qui préfère parler de la technique, de tactique, je dois me résoudre à penser que la forme physique pourrait bien être une donnée essentielle.
118 contre 109 ! Ces chiffres sont ceux des kilomètres parcourus dans l’un des matches phares du premier tour, Italie-Belgique. L’Italie a couru près de 10 km de plus ! C’est sidérant. Personne n’a fait ça. La moyenne est même dans cet Euro en dessous de 110 ! On a parlé de leçon tactique, de super match des Italiens, c’est vrai, mais les Belges ont aussi été étouffés physiquement. Les Azzurri ont remis ça devant la Suède. 113 km. Si les Italiens sont capables de refaire ça, l’Espagne peut souffrir en 8e. Face à une équipe plus forte, ça passe aussi à la « baston ». La Croatie, sans Modric, a battu l’Espagne au terme d’un super match, technique, tactique, mais également en se donnant plus physiquement : 106 km contre 104.
L’Allemagne est toujours au-dessus de 110, leurs adversaires plus encore. C’est peut-être ce qui explique la résistance opposée à chaque fois au champion du monde. Dans ses matches souvent ternes, la France est loin de ses standards avec une moyenne à 106 km. Plus que les passes réussies et la possession, qui analysés « brutes » sont des stats sans intérêt, les courses sont souvent un révélateur à prendre en compte.
Pour voir plus loin, il y a aussi l’aléa tableau. Clairement, il se dessine un côté fort. Italie, Espagne, Allemagne, France, Angleterre d’un côté. Croatie, Portugal de l’autre, ça fait un peu favoris contre outsiders. Après cette phase de poules, les certitudes sont donc faibles. Croatie et Italie ont fait sensation jusque-là, mais après ? L’Espagne et l’Allemagne peuvent-elles poursuivre leur domination ? Si après la déroute de 2014, l’Espagne perd contre l’Italie, la fin de cycle se confirmera. Le miraculé Portugal porté par sa star Cristiano peut-il être meilleur ? La France sans jeu mais avec la « Deschamps touch » en finale, ça serait pour moi une sacrée surprise. L’Angleterre ? On la dit jeune, trop jeune. Elle continue pourtant de me plaire. Ainsi donc, on ne sait rien, ou pas grand-chose et ce n’est finalement pas si mal…