
Kopa, l’axe franco-polonais

Raymond Kopa se voit remettre le prix du président de l'UEFA par Michel Platini en 2011 - -
Né Kopachevski, Raymond, 80 printemps aujourd’hui, s’est toujours connu Kopa. « C’est écrit sur ma carte d’identité, raconte-t-il bien calé dans son fauteuil, dans son appartement à Angers. On peut d’ailleurs lire : ‘’Raymond Kopachevski dit Kopa’’ ». A l’école, parmi ses petits camarades du Nord-Pas-de-Calais où ses parents et grands-parents se sont installés dans l’entre-deux-guerres, on l’appelait déjà « Kopa ». Un signe de son amour futur pour sa terre d’accueil que ce suffixe tôt abandonné ? Alors que les années passent à Nœux-les-Mines, tout converge vers une francisation assumée. A 14 ans, il est à 600 mètres sous terre dans les mines, mais taquine déjà le ballon à ses heures perdues. « A 17 ans, je parlais bien un peu polonais, mais ce n’était pas terrible. Aujourd’hui, je parle mieux l’espagnol », lâche en riant l’ex-gloire du Real Madrid avec qui il domina l’Europe à la fin des années 50.
Kopa ne renie pas son pays, d’ailleurs quand il croise un autre grand Français de Pologne, l’ancienne star du demi-fond, Michel Jazy, les deux hommes parlent du pays. « On chante souvent le début de l’hymne polonais, mais lui parle beaucoup mieux polonais que moi. » Pour l’hymne, notre attaquant est plutôt Marseillaise que Mazurka de Dabrowski, chanté par les coéquipiers de Ludovic Obraniak. « Je suis très fier d’être Français, la France nous a acceptés. » Sous le maillot tricolore (45 sélections, 18 buts), Kopa l’a chantée, la Marseillaise, et il s’en souvient encore avec émotion. « Quand on représente un pays, on est fier de le représenter ». Kopa, Platini, Zidane… Le Ballon d’Or 1958, qu’il cache dans un coffre chez lui, pense appartenir à cette famille de « footballeurs étrangers qui ont énormément apporté au foot français ».
« A l’Euro, j’attends du fair-play de la part des Français »
Alors, quand il voit les Polonais de la deuxième ou troisième génération filer à la polonaise pour rejoindre la sélection de l’aigle rouge et blanc, il s’emporte. « Obraniak ? Qui ça ? » Outre qu’il ne connait pas les noms des joueurs actuels du sélectionneur Franciszek Smuda, Kopa ne comprend pas ce mouvement de balancier. « C’est la tendance mais moi, je suis français et je n’admettrai pas de repartir, c’est un choix à faire, ça me choque ce genre d’histoires ». Comme il a été scandalisé par le putsch des joueurs de Raymond Domenech en Afrique du Sud, lors du Mondial 2010. « Tout le monde a été choqué, je dis bien tout-le-mon-de ».
Figure tutélaire du football français au même rang que Just Fontaine, son partenaire de l’épopée de 1958, Kopa a parlé à Laurent Blanc lors de la prise de fonction du champion du monde à la tête des Bleus. Le message, en pleine période post-traumatique liée au scandale de Knysna, était clair. « Je lui ai dit de prendre en priorité les joueurs qui arrivaient, parce qu’il fallait reconstruire. » Qualifiée un an plus tard pour l’Euro 2012, l’équipe de France de l’ère Blanc est un panachage d’anciens et de nouveaux. Kopa croit-il en ce groupe ? « Que va faire cette équipe ? C’est un point d’interrogation, concède-t-il. Il y a de bons joueurs. La preuve : ils jouent à l’étranger, mais pour moi la priorité est d’avoir une équipe qui se comporte bien. Le fair-play, c’est important. » A la fin de l’entretien, notre invité tripote son micro-cravate et nous montre sa rosette. Encore un trophée. « Et vous voulez qu’avec ça je devienne Polonais ? »