Russie impériale !

Là, on ne peut pas dire qu’on n’était pas prévenu. Avec un jeu léché et un entraîneur adepte des gros coups, les Russes avaient tout pour réussir. Le Zenit Saint-Petersbourg avait remporté la Coupe de l’UEFA en mai. Mais ça ne nous suffisait pas pour faire de cette équipe russe un prétendant à la couronne européenne. Depuis la fin de l’URSS, on n’y voyait qu’un exil doré pour footballeurs en mal de cash. Mais là, il faut bien avouer que les joueurs de Guus Hiddink peuvent bien être la Grèce de 2004 d’autant qu’ils ont largement toutes les qualités requises. Ils l’ont prouvé ce soir au Parc Saint-Jacques de Bâle en dominant de long en large des Néerlandais méconnaissables après leurs trois premières prestations.
Domination russe de bout en bout
Toujours en mouvement, ils ont tout le temps débordé des défenseurs bataves lents. Pourtant, ils n’avaient plus joué depuis la partie contre la France. Zhirkov mettait le feu dès la 7e minute sur un coup-franc non cadré. Pavlyuchenko quelques secondes plus tard faisait passer un frisson chez les 120 000 Néerlandais qui avaient fait le déplacement dans la ville de Roger Federer, mais sa tête n’était pas cadrée. 30 ans après, le football total avait changé de camp. Les Russes faisaient tourner en bourrique leurs adversaires du soir en multipliant les offensives sur les côtés. Et pour apeurer une défense qui n’en n’avait pas besoin Kolodin envoyaient deux scuds surpuissants des 35 mètres. Le premier, cadré, était stoppé de justesse par Van der Sar. Le second frôlait le montant gauche du portier de Manchester United. Les Bataves n’avaient pas grand-chose à se mettre sous la dent à part un tir non cadré du grand Engelaar à la demi-heure de jeu. La Russie faisait le jeu tandis que les Pays-Bas étaient incapables de construire pour s’approcher des cages d’Akinfeev. 0-0 à la pause. On pensait que le match allait changer de physionomie avec la rentrée du feu follet Van Persie. Dès l’engagement, sa frappe venait réveiller Akinfeev. Dix minutes plus tard, Arshavin manquait d’ouvrir la marque. Ce n’était que partie remise puisque une minute plus tard Semak servait Pavlyuchenko sur un plateau pour le premier but de la partie. Faciles, ils continuaient leur travail d’usure en baladant ces Néerlandais et en ayant plusieurs ballons pour le doublé. Heureusement côté néerlandais, Van der Sar veillait au grain. Après la Turquie vendredi, on se dirigeait vers la deuxième surprise de ces quarts de finale d’autant que les joueurs de Van Basten gâchaient occasion sur occasion en tirant de loin. Lui qui se consacraient depuis le début de la compétition à peser sur les défenses, Ruud Van Nistelrooy endossait l’habit du sauveur pour sa première réalisation dans l’Euro en reprenant de la tête un centre de Sneijder. Ces beaux Néerlandais n’allaient pas quitter si tôt cette compétition. Ils bénéficiaient d’un bonus de trente minutes.
Hiddink a tué son pays
La chanson était pourtant la même durant la prolongation. Les hommes d’Hiddink faisaient des misères aux Hollandais. Pavlyuchenko trouvait la barre transversale, Kolodin n’était pas loin de tromper Van der Sar sur un énième tir de loin. Le roseau orange pliait mais ne rompait pas. Pendant les 15 dernières minutes, les Russes continuaient de poser leurs grosses pattes sur ces Néerlandais repliés dans leur moitié de terrain. Toujours sans réussite. Jusqu’à cette reprise de Torbinskiy au deuxième poteau qui envoyait la Russie au paradis. Arshavin plantait un dernier coup de poignard à la 116e minute. 3-1 pour la Russie qui se qualifiait pour la première demi-finale de son histoire post-URSS. Fin de l’aventure pour des Néerlandais chatoyants lors de la phase de poule. Ils succombaient aux statistiques qui font qu’aucune formation victorieuse de ses trois matches de poule ne remporte l’Euro depuis l’édition 84 et la France de Platini. Le coaching de Van Basten fera parler. Pourquoi faire entrer Affelay et Heitinga et point de Robben pour dynamiter la défense russe ? Le triple Ballon d’Or va devoir y réfléchir. Le peuple orange le voyait bien remporter le trophée en tant qu’entraîneur 20 ans après l’avoir soulevé en tant que joueur. Le sorcier Hiddink, lui, réussissait encore son pari avec une nation de second plan. Il matait sa patrie. La Russie ne marche pas encore sur l’Europe mais ses promesses sont belles.