RMC Sport

L’Atlético, une saison de foi parfaite

-

- - -

Près de trois mois après la finale de Ligue des champions remportée par le Real, l’Atlético, champion d’Espagne, et son rival madrilène se retrouvent mardi soir (23h) pour le match aller de Supercoupe d’Espagne. L’occasion de se souvenir de l’éblouissante saison des hommes de Diego Simeone.

Qu’importe la défaite en finale de la Ligue des champions, Diego Simeone a réussi quelque chose d’unique la saison passée. Son Atlético Madrid, premier vainqueur de la Liga hors Barça et Real depuis presque une décennie (dernière occurrence : Valence en 2003/2004), fut dur, rude, strict, discipliné comme un bataillon d’infanterie. Mais il eut, malgré sa rigueur, la plus belle des vertus sportives, d’ordinaire réservée aux esthètes et aux attaquants, aux techniciens et aux poètes : le panache.

Le jeu de l’Altético c’était d’abord ça. Un peu de cette qualité unique qui vous fait toujours aimer les héros. Même les moches et les méchants, les bandits et les traitres. Tant qu’ils ont du panache, tout va bien. Le panache de Cyrano, celui de s’assumer, de ne pas essayer d’être autre chose. Quand on ne peut pas être plus fort que l’autre, il faut essayer de devenir la meilleure version de soi-même. C’est probablement le plus grand défi, le trophée le plus difficile à obtenir, d’autant plus dans un sport collectif. Diego Simeone est la meilleure version de lui-même, son équipe est la meilleure version d’elle-même. Mieux… ses adversaires aussi.

L’année dernière, face à l’Atlético, les individualités ne fonctionnaient pas. Cristiano Ronaldo ne fonctionnait pas seul (quatre buts certes, mais trois sur penalty en cinq matches), Lionel Messi ne fonctionnait pas seul (zéro but en six rencontres), Balotelli et Kaka ne fonctionnaient pas seuls (un but seulement pour le Brésilien en C1), Samuel Eto’o ne fonctionnait pas seul (zéro but) etc. Quelle que soit l’opposition, le message de Diego Simeone sût rester fort et clair. « Pour battre mon équipe, il faudra ETRE une équipe », semblait-il dire. Pire, « pour jouer mon équipe, ne serait-ce que la jouer, il faudra être une équipe. » On ne se débarrasse pas d’El Cholo en solo. Il sait se défendre. Et joliment.

Jouer à une certaine hauteur

La grande leçon de Simeone, ce qu’il a apporté́ au football de 2014, c’est en effet qu’on peut faire preuve de panache en défendant son bout de terrain. On connaissait le courage, l’abnégation, l’héroïsme même, d’équipes acculées face à plus fortes qu’elles et qui réussirent tout de même à se sauver. Mais elles n’avaient jamais d’idée au-delà̀ de la survie. L’Inter de Mourinho en 2010, ce n’est presque que Mourinho. Elle est héroïque, elle est l’outsider, elle est la marchande d’exploits, mais elle ne touche pas l’imaginaire de la même façon. On l’a déjà̀ un peu oubliée cette Inter. Elle ressemble à ce qu’elle a été́ sur la scène européenne, un « coup », un petit miracle, une langue tirée au Barça qui nous amuse avec la victoire à dix contre onze et l’arrosage automatique du Nou Camp qui vient (essayer de) calmer le Portugais.

Diego Simeone et ses joueurs ne cherchaient pas seulement à survivre. Ils voulaient gagner, mais à leur façon, un peu au-dessus des principes de possession absolue partagés par le reste du continent. En respirant, comme disait l’autre, « à une certaine hauteur ». La défense et la dureté́ de Simeone ne furent pas la défense et la dureté́ des autres. Elles escortaient quelque chose de supérieur au résultat, à l’idée de victoire ou de défaite. Elles existaient à une certaine hauteur. On a hâte de voir combien de temps la gravité les épargnera.

Raphael Cosimano Journaliste RMC Sport