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"Il faut rêver grand": Lilian Nalis, adjoint de Franck Haise à Nice, ne veut pas faire de la Ligue des champions un "tabou"

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Coéquipier de Franck Haise à Laval entre 1995 et 1997, Lilian Nalis est devenu depuis un fidèle ami et adjoint de l'actuel entraineur de l'OGC Nice. Avec la suspension de ce dernier, Nalis sera encore une fois dans la zone technique contre Auxerre vendredi (20h45). Il se confie sur leur relation, leur réussite à Lens, leur première saison à Nice avec en ligne de mire une qualification en Ligue des champions. 

Lilian, est-ce que vous pouvez nous décrire votre rôle au sein du staff ?

Mon rôle est de mettre en place les séances d'entraînement et de se coordonner avec tout le staff, avec Alex (Pasquini) qui est analyste vidéo, avec Jo (Ramaré) et Toto (Sébastien Squillaci) qui sont adjoints aussi. Et puis de se coordonner avec le coach, avec le pôle performance pour savoir déjà le nombre de joueurs et puis après en fonction des objectifs technico-tactiques et athlétiques de tout mettre en place pour que la séance fonctionne le mieux possible.

À quoi ressemble une journée type ?

C'est arriver tôt le matin (7h30). Regarder des images de nos matchs ou de l'adversaire qu'on va rencontrer. Et puis faire évoluer un petit peu la réflexion technico-tactique de l'entraînement. Après ça, échanger avec tout le monde sur qu'est-ce qu'on met en place, comment on le met en place. Je dirais, ça c'est le premier jour de la semaine parce qu'au fur et à mesure, généralement on met la séance du lendemain déjà en place la veille au soir. Et puis c'est toujours des échanges pour faire au mieux.

Et un jour de match ?

À domicile, on fait les mises au vert au centre d'entraînement. On profite pour travailler sur les matchs qui vont suivre. On se soucie d'être au point sur tout ce qui va se passer pendant le match du soir. Le coach prépare sa causerie l'après-midi. On a le matin le visionnage des coups de pieds arrêtés, que ce soit défensif ou offensif. Si on les a travaillés la veille ou pas, on va mettre quelques images. Et puis après la journée se passe, c'est le coach qui gère tout ça.

Habituellement pendant une rencontre, comment fonctionnez-vous ?

Quand on arrive au stade, c'est une présence sur l'échauffement avec les joueurs, et puis ensuite le match. Ça se traduit par le fait de regarder, de bien suivre la rencontre, et puis en fonction de certains ressentis et du partage entre nous et avec l'analyste vidéo, parce qu'on est aussi connectés avec l'analyste vidéo, d'amener des choses au coach quand on a des choses qui nous préoccupent, qu'on a remarquées. Et puis derrière, lui passer l'information. Après, c'est lui qui choisit.

Qu’a engendré la suspension de Franck Haise ?

Disons que c'est moi qui suis normalement en relation avec l'analyste vidéo (en tribune) quand Franck est bord de terrain. Donc là, ça a décalé, c'est Jo (Ramaré) qui a pris la relation avec Alex (Pasquini). Et puis Alex est assis à côté du coach là haut.

Est-ce un grand chamboulement ?

Le chamboulement est surtout sur le bord de terrain parce qu'à un moment donné, les joueurs préfèrent avoir leur coach que d'avoir un adjoint. Mais sinon, c'est uniquement cette chose-là qui est modifiée.

Le rôle de numéro 2 dans un staff, c’est être dans l’ombre sans trop l’être ?

J'ai vécu différents rôles en fait. Donc, on va déjà s'adapter au numéro un. Qu'est-ce qu'il attend de toi ? Après, il faut aussi être en capacité d'imposer sa personnalité, ce qu'on a besoin aussi de ressentir et de vivre, et puis d'être en capacité de le dire pour partager. Mais après, on est juste là pour faire des propositions. Tous les adjoints, on est là pour, à un moment donné, proposer, échanger... Et derrière, la décision finale, c'est le coach qui la prend.

Est-ce difficile de mettre en place des séances quand on a 13 absents ?

À partir du moment où on a un process bien identifié, on est resté dessus. La seule chose qu'on a fait, c'est se servir des jeunes du club pour les faire monter, pour qu'on puisse mettre en place nos séances. Donc en soi, ce n'est pas difficile. Après, la seule chose contre laquelle on lutte, c'est d’accompagner au mieux tous les jeunes joueurs qui viennent avec nous pour que le niveau essaie de rester le plus intéressant possible pour tous les joueurs de l’effectif.

Comme contre Saint-Etienne et Lyon vous serez dans la zone technique pour la réception d’Auxerre. Vous êtes titulaire du BEPF depuis 2024, l’objectif est-il de devenir numéro 1 ?

Je ne sais pas si je le vivrai un jour. Je veux surtout vivre au quotidien tout ce que je vis en ce moment, les bons moments à travers le football, on a des métiers fantastiques. Après, ça sera une question de contexte, ça sera une question d'opportunité. Je ne peux pas savoir, je veux surtout me concentrer sur le moment présent et sur tous les bons moments que je vis autour de mon métier aujourd'hui.

Vous avez joué avec Franck à Laval puis vous vous êtes retrouvés 25 ans plus tard à Lens et maintenant à Nice, comment cela s’est fait ?

Je travaillais au Sporting Club de Bastia, au niveau de la formation, et puis Franck m'a téléphoné, il m'a dit : je suis à la recherche d'un adjoint. On est amis depuis très longtemps, on a joué ensemble, on a passé des très bons moments, des très bonnes années footballistiques et de camaraderie aussi autour de ces saisons. On a eu plaisir à se retrouver, après on ne se connaissait pas trop dans ces métiers-là et puis on a cherché à se découvrir. Il m'a chargé de missions, de ce qu'il attendait de moi et puis les choses se sont mises en place. Mais on s'est très vite, je dirais très vite, très bien entendus et on partage beaucoup de mêmes visions.

Franck Haise dit de vous : “C’est mon adjoint et c’est mon ami, mais ce n’est pas parce que c’est mon ami que c’est mon adjoint.”

Je pense qu'on est capable de connaître exactement les positions en fonction des moments de vie. C'est-à-dire que quand on est en dehors, on profite un maximum sans trop se poser la question du football et puis quand on revient au stade, on se soucie d'être performant dans nos métiers et de jouer le rôle qui est le nôtre et de bien le faire en oubliant à ce moment-là l'amitié. On est là pour du professionnel, on fait du professionnel. Par contre, en dehors, on va profiter de moments un petit peu différents.

Est-ce une force, cette amitié, ou un danger ?

Je pense que quand on sait rester à sa place, c'est plus une force. On sait exactement qui on est, ce que l'on veut et on se respecte l'un l'autre, que ça soit dans la vie de tous les jours ou dans le travail. Donc, obligatoirement, chacun s'est resté à sa place et c'est pour moi la source d'un bon fonctionnement.

Franck Haise admettait devoir “pousser davantage” ce groupe que celui que vous aviez à Lens. Pourquoi ?

Ce sont deux aventures complètement différentes. Quand j'arrive, Franck vient de faire monter le club de Ligue 2, il y a des joueurs qui ont peu joué en Ligue 1 ou qui la découvrent, soit qui ont déjà joué en Ligue 1, qui arrivent dans un club et qui ont besoin de performer. Et là, je crois que Franck, sa force a été de créer cette alchimie où il y a eu rapidement un projet de jeu, un projet de vie où tout le monde a adhéré. Peut-être par peur du niveau qu'on allait affronter, tout le monde a vraiment fait confiance à Franck. Et là, dans ce cas-là, c'est parti et puis on a avancé au fur et à mesure. C'est à-dire qu'au fur et à mesure des résultats, il y a des joueurs qui sont arrivés, les années se sont suivies, au niveau des résultats, on est resté là-haut et puis on s’est amélioré à chaque fois, au niveau des points et du classement. Donc, en fait, il y avait cette création de confiance forte entre le groupe et Franck et les joueurs progressaient au fur et à mesure.

Alors qu'ici à Nice, on arrive dans une aventure où l'effectif est déjà construit. Il n'y a pas grand monde qui arrive cette année, il reprend un groupe qui a déjà vécu ensemble, qui a déjà eu des résultats la saison dernière puisqu'ils se sont qualifiés pour la Coupe d'Europe… Mais en même temps, il arrive avec son projet de jeu, son projet de vie, et c'est là que c'est un peu plus complexe parce qu'on met les pieds dans le plat avec des joueurs qui sont habitués à certaines choses et pas à d'autres. Cette saison, ça a été l'équilibre entre quand ça voulait aller dans le bon sens et quand ça ne voulait pas aller dans le bon sens. Il a passé son temps à naviguer entre : c'est bien, c'est moins bien, je veux ça, je sais ce que je veux mais je ne l'obtiens pas et puis je vais les faire avancer au fur et à mesure. C’est pour ça que cette saison, il en arrive à se dire : j'ai pas tiré peut-être le maximum aujourd'hui de ce que ce groupe peut donner, voilà. Mais c'est normal, on a besoin de passer du temps à se connaître pour avancer collectivement.

Est-ce qu’il y a une évolution dans votre management entre Lens et Nice ?

Non, ça on n'a rien changé parce que je pense qu'il y a du professionnalisme et puis il y a aussi des valeurs. Donc là-dessus, il n'y a pas grand-chose qui a bougé, ça a juste été surtout une question d'adaptation au fur et à mesure de la saison et au fur et à mesure du ressenti qu'on avait.

Vous êtes 3e à 9 journées de la fin, quelle est l’ambition pour la fin de saison ?

L'ambition, comme disait le coach avant le match de Lyon, c'est de produire du jeu parce que c'est que par le jeu qu'on va y arriver. Et puis donner le meilleur de nous-mêmes pour performer. Je crois qu'il y a des stats qui sont sorties, comme quoi on était depuis ces dix derniers matchs ou depuis 2025 toujours sur des x-goals supérieurs à l'adversaire dans la performance. Au niveau des expected points nous sommes aussi juste derrière le Paris Saint-Germain. Donc ça veut dire que les choses sont bien faites par le groupe, par les joueurs, par tout le staff qui l'entoure. Je pense qu'on a envie de travailler ensemble et d'avancer. Donc je dirais se focaliser là-dessus, donner le meilleur de nous-mêmes pour aller chercher les meilleurs résultats possibles.

Est-ce tabou de parler de Ligue des champions ?

Non, ce n'est pas tabou. Il faut rêver grand, il faut toujours se dire que si on peut aller la chercher, il faut aller la chercher. Il n'y a pas de raison. On est là au classement, on est en train de lutter avec des effectifs qui ne sont pas similaires aux nôtres. Mais par contre, on essaie d'imposer nos qualités et nos valeurs sur chaque match pour justement rivaliser avec eux.

Est-ce une force d’y être déjà parvenu avec Lens ?

C'est une force, mais ce qui est fort surtout, je pense que c'est que les joueurs y ont cru. Alors qu'au départ, on partait peut-être d'un peu plus loin aussi. Mais je pense que Franck a réussi à les persuader que c'était possible. Ils y ont cru fortement et parce qu'ils y ont cru fortement, on l'a réalisé.

Propos recueillis par Maxime Tilliette