"Je veux faire de belles années ici": les confidences de Vitinha sur son bonheur au PSG

Félicitations pour votre 27e place au Ballon d'or. Est-ce la confirmation du fait que votre année passée était fantastique?
Oui, c'est un honneur. C'est la première fois que je vais au Ballon d'or, la première fois que je suis nommé, c'est tout nouveau pour moi. Bien sûr que je vais continuer, je sais que c'est difficile. Mais le plus important, c'est la constance. Et c'est ça que je veux faire, continuer à être là parce que c'est un bon signal pour moi et pour l'équipe.
Le Ballon d'or vient d'être attribué à Rodri qui joue un peu au même poste que vous. Est-ce que ça vous donne envie de continuer à aller de l'avant et pourquoi pas un jour à être sur la plus haute des marches?
Oui, bien sûr que tout le monde en rêve. Quand on est enfant, on rêve de ça. C'était inédit, c'était différent. A part Modric, je ne me rappelle pas de la dernière fois qu'un milieu a gagné. Peut-être Kaká, mais il était plus offensif. Et c'est vrai que ça changemais comme je l'ai dit, il faut continuer, il faut se concentrer sur le présent.
Je voulais revenir sur la victoire impressionnante du PSG au stade Vélodrome. Quand on est parisien, une victoire au Vélodrome, c'est toujours important. Est-ce une fierté d'avoir gagné 3-0 au Vélodrome?
Oui, ça a toujours une saveur spéciale. Ça fait déjà pas mal de fois que j'affronte Marseille. On a presque toujours gagné, sauf une fois en Coupe de France. Mais toutes les autres fois en Ligue 1, on a gagné au Parc et aussi à l'extérieur. Ca fait plaisir à tous les supporteurs. C'est très bon de gagner là-bas.
On avait dit avant le match que c'était peut-être l'année ou jamais pour les Marseillais, que peut-être que l'écart s'était resserré, qu'ils avaient réalisé un bon début de saison... On parlait aussi beaucoup du fait qu'il y avait moins de stars dans l'effectif parisien. Est-ce que ça a encore plus motivé le groupe?
Je pense que ça, c'est plus un sujet pour les gens à l'extérieur de l'équipe. Je sais, j'entends, je vois, j'écoute aussi ce que disent les médias aussi. C'est normal, c'est respectable que vous fassiez votre travail aussi. Mais pour nous ici, c'est la même chose, on vient pour gagner, pour les battre. Et c'est ce qu'on a fait. On va rejouer contre eux au Parc et on va faire la même chose.
Quand on voit le début de saison du PSG en Ligue 1, il y a eu quelques matchs où ça ne s'est pas très bien passé, mais les résultats ont toujours tourné pour vous. En Ligue des champions, c'est un peu plus compliqué, avec un axe de progression surtout sur ces matchs à l'extérieur. Est-ce que ce match à Marseille vous conforte dans ce que vous pouvez faire loin du Parc?
Les matchs comme celui à Marseille, c'est le genre de matchs qu'on veut tous jouer. J'ai cette sensation, je pense que le groupe aussi. Le groupe est jeune mais on a cette envie de jouer ce genre de grands matchs. Et la vérité, c'est que c'est pour ça qu'on joue au foot, pour jouer ces grands matchs. Je comprends que les médias parlent beaucoup et tirent la sonnette d'alarme sur les matchs de Ligue des champions parce qu'on ne gagne pas parfois. On a quatre points, tout est normal mais vous allez dire que ce n'est pas normal d'avoir ce genre de résultats. Mais il faut aussi voir ce que l'on montre. Je pense que quand tu ne regarde que le résultat, ça n'est pas juste. Il faut regarder le contenu. Je sais que c'est le résultat qui compte mais on sait aussi qu'on a fait de bons matchs, qu'on a créé beaucoup d'occasions, qu'on a raté aussi. Je pense que le plus important, c'est de se focaliser sur ça. On a bien su se créer des occasions, on a bien joué pendant presque tous les matchs, à part peut-être contre Arsenal en première mi-temps où ça n'était pas bon. Il manque des buts mais on a créé. Et c'est ça le plus important, on finira par marquer.
Ça, c'est la politique de Luis Enrique, c'est ce qu'il a mis en place. Mais le résultat est très important, vous le savez. Votre discours et celui du coach après le match contre le PSV Eindhoven, c'était de dire "on n'a pas gagné, mais c'est le meilleur match qu'on ait fait pour l'instant en Ligue des champions"...
Sur ce match, on a fait une première demi-heure incroyable. Jusqu'au but du PSV, on a très bien joué. On s'est créé beaucoup d'occasions, mais on a raté. Quand ça passe, ça passe. Là, tu ne peux rien faire. Tu peux travailler toute la semaine la finition à l'entraînement et pendant le match, ça ne rentre pas. Ça arrive. Mais le plus important, c'est qu'on se crée des occasions.
Est-ce que dans le groupe vous avez des doutes sur votre efficacité?
Non, je pense juste que parfois le ballon entre et parfois il ne rentre pas. Bien sûr, quand tu as des joueurs de qualité, c'est normal que le ballon entre beaucoup plus facilement. Mais moi je pense que le ballon va entrer. Peut-être pas aujourd'hui, peut-être pas hier, mais demain il va entrer. Donc on ne peut pas trop se préoccuper de ça. Je pense que l'aspect le plus important, c'est de se créer l'occasion, de bien jouer. Et ça, on le fait presque tout le temps. Contre le PSV, on a fait 30 minutes très bonnes. Et après le but, on a fait 15 minutes chaotiqyes. Parce qu'on a senti qu'on avait bien joué, qu'on avait créé, qu'on n'avait pas marqué et qu'après on a concédé un but. C'est pas facile, mais il faut réagir face à ça, il faut s'améliorer dans cet aspect, continuer à jouer de la même façon, continuer à rester tranquille parce que ça nous est déjà arrivé l'année dernière de prendre un but et de rester quand même calme, la tête froide. Je pense que ça peut être un axe d'amélioration.
Depuis que Luis Enrique est là, vous avez pris une place importante dans cette équipe. La preuve de votre progression, c'est que vous êtes 27e au Ballon d'or. Avec ce positionnement un peu plus bas, qui est un peu nouveau aussi pour vous. Est-ce que la progression de cette équipe passe aussi par vos performances?
Pas seulement. Je pense que c'est important, mais c'est vrai pour beaucoup d'autres joueurs à d'autres postes. Quand le coach m'a changé et m'a mis en n°6, je me suis senti très bien à ce poste. Mais vu la façon dont on joue, ce n'est pas un 6 classique. La plupart du temps, on a le ballon. Même en défense, je trouve que je me suis amélioré aussi. Je me sens très bien à ce poste. Et je pense que l'équipe en a profité aussi.
Certains disent qu'au PSG, iil y a un cadre bien précis et que le coach n'aime pas qu'on dépasse ses fonctions, qu'on aille au-delà de ce qu'il demande. Est-ce que vous avez quand même de la liberté là-dessus quand vous jouez? Il vous arrive très souvent de frapper et de marquer des buts...
Vous avez répondu à la question (sourire). Quelqu'un qui m'a affronté l'an dernier, la première chose qu'il voit c'est que moi je suis libéré. J'ai la liberté d'évoluer dans les zones plus hautes. J'ai la liberté aussi de demander le ballon plus bas. Mais c'est sûr qu'on a aussi notre boulot à faire, on a notre poste, il faut respecter le plan tactique aussi, ça c'est vrai.
Cela veut dire que Luis Enrique ne vous bride pas?
Non, pas du tout. Et ça n'est pas juste moi, mais moi je suis un peu le cas que tu vois, j'ai beaucoup de liberté avec lui.
On parlait de la Ligue des champions. C'est très important pour les supporters parisiens notamment. Et la question que beaucoup d'entre eux se posent, c'est "est-ce qu'on peut performer dans une compétition aussi relevée avec un effectif si jeune"? Vous êtes arrivé au PSG où vous avez connu de nombreuses stars. L'équipe a beaucoup évolué. Désormais, vous êtesune équipe très jeune. Il y a un milieu de terrain qui est très technique mais peut-être un peu moins physique. Est-ce que vous pensez que cette équipe du PSG peut performer en Ligue des champions, peut se montrer à la hauteur des autres grandes écuries d'Europe?
Je ne vais pas arriver ici et vous dire "non, c'est vrai". Je suis sûr qu'on peut y arriver. Même si on est jeune, même si on n'a pas beaucoup d'expérience en Ligue des champions, on est un groupe avec beaucoup de qualité. Peut-être avec des joueurs moins connus mais moi, je trouve que ça n'est pas important. Je pense qu'on est en train de devenir plus fort que l'année dernière. Et c'est normal. Tu ne commences pas aussi bien que tu finis. Tu vas progresser dans une saison. Moi, je trouve qu'on est mieux déjà. Mais on va être encore mieux. En Ligue des champions, on a gagné contre Gérone, on n'a perdu à Arsenal et on n'a pas réussi à gagner contre le PSV. Mais on n'est pas alarmant parce que comme je l'ai dit, on a bien joué. On a senti qu'on pouvait gagner, à part à Arsenal qui était un match un peu différent. On a toute la capacité pour faire une grande Ligue des champions. Comme les supporteurs, nous aussi on veut bien jouer, on veut gagner et on va faire tout pour.
L'événement de l'été, c'est le départ de Kylian Mbappé qui est parti au Real Madrid. On se disait "comment le PSG va-t-il se relever du départ d'une telle star", il avait mis énormément de buts. Luis Enrique a dit qu'il trouverait une réponse collective. Pour vous, le PSG sans Mbappé n'est pas moins fort que le PSG avec Mbappé?
Non, pour moi le PSG de maintenant est plus fort que celui de l'année dernière. Et ça va continuer. C'est normal, tu perds un joueur qui est un des meilleurs joueurs du monde, un joueur qui marque 50 buts, c'est évident que ça change un peu l'équipe, ça change un peu la dynamique, ça change tout, mais pas en mal.
Le discours de Luis Enrique, c'est de dire qu'il y a beaucoup de joueurs qui doivent marquer plus de buts parce que quand tu perds un joueur à 50 buts, automatiquement les tâches vont être un peu dispatchées... L'image qu'il y avait au PSG avant que Luis Enrique n'arrive et avant que le club change de profil et de façon de fonctionner, c'était qu'il y avait beaucoup de stars. On a l'impression qu'aujourd'hui, on a un peu plus de professionnalisme...
Oui, j'ai vécu cette période aussi. Moi je trouve que maintenant les entraînements sont plus intenses, ils sont comme ils doivent être. On s'améliore aussi dans cet aspect. On est sérieux à l'entraînement, on fait tout pour arriver au match et être dans les meilleures conditions.
Vous avez connu le PSG version Messi, Neymar, Mbappé, des joueurs qui ne sont plus là aujourd'hui, donc ça travaille mieux. Il y a des joueurs qui peuvent jouer à différents postes, c'est ça qui est intéressant avec ce PSG de Luis Enrique. A titre personnel, vous vous régalez plus aujourd'hui? Est-ce que le jeu est différent, vous sentez plus de mouvement autour de vous?
Oui, c'est incomparable. C'est un joueur, il sait. C'est différent quand tu as un collectif, une équipe plus jeune et qui ils ont tous beaucoup d'énergie, beaucoup d'envie de faire des choses. Quand tu vois un collectif plus vieux, c'est pas qu'ils n'ont pas envie mais la façon de faire est différente. Quand tu es plus expérimenté, tu es plus dans la gestion peut-être, même aux entraînements. Quand tu joues, la dynamique n'est pas la même. Et moi, je ne dis pas que c'est mieux ou que c'est pire, mais c'est différent. C'est forcément différent.
J'imagine que vous avez envie de progresser ensemble alors que les stars sont souvent plus sur leurs acquis. Ils savent déjà qu'ils ont atteint le summum. Vous, vous êtes en phase de progression. Est-ce que ça vous rend encore plus attaché au club?
Oui, bien sûr. Chaque année qui passe, tu es plus attaché au club. Moi, c'est ma troisième année. Je me sens très bien ici et je veux continuer sur cette lancée, collectivement et individuellement.
C'est important parce que le club a souffert de ça les années précédentes avec des joueurs qui ne s'identifiaient pas. Vous en avez un qui est remarquable, c'est le capitaine Marquinhos. Il y a aussi une grosse communauté portugaise ici à Paris...
Oui, et il y a pas mal de Portugais qui sont attachés à Paris. C'est presque la famille. C'est vrai que je me sens très bien ici. J'aime la ville. J'aime ma maison. J'aime le campus. Tu viens ici, tu viens toujours travailler, tu te sens bien...
Vous vous voyez faire une carrière à la Marquinhos? C'est à dire passer toute votre carrière au PSG, vous vous voyez prolonger longtemps?
Moi, je ne regarde pas aussi loin. Je ne dis pas non, mais je préfère regarder au plus proche. Et dans les prochaines années, je veux continuer ici, je veux faire des choses inédites.
Comme vous l'avez dit, les moyens, les infrastructures, le campus, tout ça est incroyable par rapport au Camp des Loges.
J'ai vécu les deux endroits. J'étais au Camp des Loges aussi la dernière année...
Mais vous n'avez pas connu le premier Camp des Loges...
Non, parce que celui-là, il était pire que tout. C'était en quelle année?
Moi, je suis arrivé en 2004 au Paris Saint-Germain.
Ah oui, j'avais 4 ans. (rires)
Luis Enrique parle très peu de son travail avec la presse, donc avec les supporteurs parisiens. Vous qui êtes à l'intérieur avec lui au quotidien, qu'est-ce que vous pouvez nous dire de son travail? Est-ce que c'est un coach passionnant? Est-ce que le travail tactique est excellent? Quel est votre ressenti?
Mais moi, je suis suspect. Parce que je n'ai que de bonnes choses à dire sur lui... C'est mon coach, je ne vais pas dire de mauvaises choses. Dans le relationnel, individuellement il m'a fait progresser, il m'a fait atteindre un niveau que je ne m'attendais pas à atteindre aussi tôt. Je m'attendais à arriver à ça, mais pas en une année. Et il m'a aidé individuellement à arriver à ça. Collectivement, quand on voit la saison dernière, on a gagné la Coupe de France, on a gagné la Ligue 1, on est arrivé en demi-finale de la Ligue des champions. Et après on nous dit que c'est une mauvaise saison? Comment on peut dire que c'est une mauvaise saison? C'est une incroyable saison. On est 36 équipes en Ligue des champions et on est arrivé dans les quatre dernières et on a raté la qualification pour rien. Il faut voir pourquoi on n'est pas passé. Mais moi, je trouve que c'était une saison exceptionnelle. Et voilà, sur lui, même collectivement, je n'ai que des bonnes choses à dire. Il parle beaucoup individuellement. Moi, j'aime bien ça. Moi, j'aime bien que toutes les choses soient bien claires.
En fait, c'est votre papa quoi...
Non, non, non. Ou le deuxième alors. Je n'ai qu'un seul papa (rires). Mais c'est vrai que je m'identifie beaucoup à son idée de jeu aussi, tactiquement. C'est difficile pour moi de dire quelque chose qui ne soit pas bon. Même sur le plan humain, il est incroyable. Après, je comprends aussi que les médias puissent avoir des problèmes avec lui...
J'aimerais parler du Portugal aussi parce que vous avez un rôle qui a aussi progressé. Aujourd'hui, vous jouez avec l'équipe nationale du Portugal. Quelle est votre vision de cette équipe, est-ce que vous pensez que vous êtes aussi en train de progresser et que vous serez prêts à la Coupe du Monde?
Oui, on espère et on voit qu'on va être prêts. La vérité c'est que, individuellement, ça a changé aussi. Avant, je ne jouais pas beaucoup. Je rentrais en cours de match, mais ce n'était pas la même chose. Je pense que j'ai pris une autre dimension dans l'équipe aussi, une autre importance. C'est à cause de la saison que j'ai eue en club aussi, surtout. Roberto, le coach, a cru en moi aussi. J'ai joué tous les rôles. C'était exceptionnel ça. L'importance que j'ai eue dans cet Euro, dans cette équipe nationale, était différente aussi. Ça fait du bien, ça te fait sentir bien.
Il y a une référence mondiale quand même en équipe du Portugal avec vous, c'est Cristiano Ronaldo, toujours présent à 39 ans. Il était encore là en Ligue des nations sur le dernier rassemblement. Qu'est-ce qu'il représente pour vous qui êtes international portugais et comment expliquez-vous cette longévité exceptionnelle?
39 ans et toujours titulaire en équipe nationale, je n'ai pas d'explication pour cette longévité. Lui, il l'a dit déjà et moi j'imagine que c'est ce professionnalisme qu'il a dans tout ce qu'il fait. Le matin, le soir, tous les jours de sa carrière, c'est incroyable. J'imagine les efforts et les sacrifices qu'il doit faire et qu'il a faits. Et j'imagine aussi que c'est ça qui l'a maintenu dans cet état à 39 ans. Mais oui, c'est un privilège pour moi. On est petit, on est des enfants on a on a le rêve de jouer un jour avec lui et ça arrive. Heureusement, j'aurai eu pas mal d'années à profiter de la sélection avec lui.
Il sera à la Coupe du monde d'après vous?
Bien sûr qu'il y sera, il ne va pas lâcher.
Merci beaucoup pour cet entretien, c'était un régal. Je vous souhaite donc de prolonger jusqu'en 2029 au Paris Saint-Germain.
Moi, je veux continuer ici, je veux faire de belles années ici, je suis heureux ici, la ville, tout, ma famille. Je me suis attaché au club et je veux continuer.