Le PSG et Monaco, Zlatan, Nîmes : les réponses de Thiriez

Le PSG et Monaco, Zlatan, Nîmes : les réponses de Thiriez - AFP
Frédéric Thiriez, comment vivez-vous la double qualification du PSG et de Monaco pour les quarts de finale de la Ligue des champions ?
C’est une super nouvelle pour le football français, pour la France et pour nos deux clubs phares, Paris et Monaco. Je suis très fier. C’étaient deux matchs franco-anglais, deux clubs français contre deux des meilleurs clubs du meilleur pays de football. Dans les deux cas, c’est le Français qui est passé. Chapeau ! Je dis aussi bien à Nasser Al-Khelaïfi qu’à Dmitri Rybolovlev : merci pour la France. Michel Platini dit très bien que dans le foot, il n’y a pas de vérité. Le petit peut très parfois l’emporter contre le gros. C’est ce qui a été fait. C’est une performance absolument formidable.
Que pensez-vous du climat actuel autour de l’arbitrage, avec notamment les insultes de Zlatan Ibrahimovic ?
J’ai toujours défendu l’idée que le respect est au centre du football. Le respect de l’adversaire, du public et surtout de l’arbitre. Un arbitre, c’est un homme comme un autre. Il peut se tromper. Je lance un appel. On a un championnat extraordinairement serré, avec un suspense énorme donc forcément une très grande tension entre les équipes. Les passions s’exacerbent. Elles vont s’exacerber encore plus. Je leur demande à tous de calmer un peu le jeu. Les présidents, aussi, bien sûr. Calmons le jeu. Le football, c’est un jeu, pas la guerre ! Ne parlons pas les soirs de défaite. C’est un vieux principe que m’avait donné Guy Roux. Quant à Zlatan, c’est un joueur que j’admire énormément et que je connais bien personnellement. C’est un très grand champion qui a rendu un immense service, et qui continuera je l’espère, à Paris et au football français. Mais il n’y a pas deux poids, deux mesures. La règle est la même pour tous. Il y a des choses qu’on ne peut pas dire. Il s’est excusé. Je suis sûr que la commission de discipline en tiendra compte. Mais c’est un joueur soumis aux mêmes règles que les autres. Ça m’a attristé.
Quelle conclusion tirez-vous de l’affaire nîmoise ?
Première chose : la justice sportive, ça marche. J’avais demandé dès le début de cette affaire, qui me paraît grave parce que dans le football, et dans les sports collectifs en général, rien que le soupçon de trucage est mortel. Je dis bien mortel, pas seulement pour l’éthique, mais pour la survie de notre sport. J’avais demandé une instruction rapide, approfondie, très ferme. Ça a été le cas. Il y a 137 personnes qui ont été auditionnées par M.Jaspart, l’ancien patron du 36 quai des Orfèvres. Et 40 autres par la commission. Le verdict est tombé. Je ne peux pas le commenter, parce qu’il y a appel. Si je faisais un commentaire, on dirait que j’influence la commission d’appel. En revanche, mon rôle en tant que président de la Ligue n’est pas uniquement de sanctionner. C’est aussi de faire en sorte que ces choses ne se reproduisent pas.
Comment comptez-vous procéder ?
J’ai trois idées, que je proposerai au conseil d’administration. La première, c’est de modifier nos règlements pour créer un nouveau délit : l’obligation pour tous les acteurs du football de signaler ou de dénoncer toute tentative d’arrangement, d’approche frauduleuse, d’atteinte à la morale sportive. Bizarrement, ce n’est pas le cas aujourd’hui. Curieusement, aucun acteur n’a prévenu la Ligue des tentatives du club de Nîmes pour arranger ces quatre matchs. Je pense qu’il faut prévoir dans nos règlements une obligation d’alerte, de signalement à la Ligue de la moindre tentative visant à porter atteinte à la sincérité d’un match. Deuxième point, la cellule de veille qui existe à la Ligue sur les matchs, qui regarde ce qui se passe, doit être renforcée. Sur Caen-Nîmes, c’est bien elle qui a été troublée par le déroulement bizarroïde du match et qui a demandé immédiatement un rapport complémentaire au délégué. Il faut qu’il y ait davantage de monde dans cette cellule de veille, qu’on surveille mieux les matchs et notamment en fin de saison quand parfois, il peut être tentant de s’arranger à l’amiable entre clubs. Ce n’est pas acceptable. Dernier point, il faut faire de la pédagogie auprès des acteurs. Comme on l’a fait pour les paris sportifs. Il faut leur dire : « Attention, soyez vigilant, voilà ce que vous devez faire…»
Ne craignez-vous pas qu’on vous reproche d’être trop rigoureux sur certaines discussions informelles ?
Ce ne sont pas les bons mots, comme « un nul nous arrangerait bien tous les deux », que je veux incriminer. Ce que je ne trouve pas normal, c’est que les quatre clubs qui ont été approchés par Nîmes n’ont pas réagi. Ils n’ont rien dit. Ils auraient dû, selon moi, alerter la Ligue. C’est cette règle que je veux instaurer, si le conseil d’administration me suit.
Pour les joueurs, l’encadrement et les supporters de Nîmes, le club a été très lourdement sanctionné en étant relégué à cause des agissements de deux personnes…
Tout d’abord, la survie du club n’est pas menacée. La sanction qui a été prononcée, pour l’instant, est une rétrogradation. Ça ne veut pas dire disparition du statut professionnel du club. Je les ai reçus, aussi bien les dirigeants du club que les élus. Il y a des procédures d’appel. Il y a eu une appréciation de la commission de la discipline, qui a estimé que le club devait être sanctionné. Peut-être qu’il y aura une solution différente en appel. Cette affaire est grave pour le football. Ceux qui aiment le foot, qui le regardent tous les week-ends, ne comprendraient pas qu’on ne prenne pas des sanctions assez fortes.
Le feuilleton pourrait être aussi long que celui de Luzenac l’année dernière. N’est-ce pas le moment de simplifier le parcours juridique ?
Vous avez tellement raison qu’aussitôt après l’affaire de Luzenac, avec le ministre des Sports et son secrétaire d’Etat, nous avons lancé ce chantier qui est pratiquement terminé. Un décret va bientôt sortir pour raccourcir les délais de procédure. Donc on aura une accélération des procédures. Dans un deuxième temps, le gouvernement m’a donné son accord de principe pour que nous créions enfin un tribunal arbitral du sport qui évitera tous ces degrés de juridiction, notamment devant les tribunaux civils, qui prennent un temps infini et qui aboutissent sur des solutions divergentes. Il faudra du personnel, quelques magistrats. Mais c’est tout à fait faisable.