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Les Bleus, l'OM, Gattuso... L'intégrale de l'entretien de Jonathan Clauss dans Rothen s'enflamme sur RMC

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EXCLU RMC SPORT - Jonathan Clauss, défenseur latéral de l'Olympique de Marseille et de l'équipe de France, était l'invité exceptionnel de Rothen s'enflamme sur RMC, jeudi 19 octobre.

Jérôme Rothen: Salut Jonathan!

Jonathan Clauss: Bonsoir!

Jérôme Rothen: Comment vas-tu?

Jonathan Clauss: Ça va, on récupère doucement, mais ça va.

Jérôme Rothen: Ça ne peut que aller forcément. Tu as retrouvé goût à l’équipe de France. Comment as-tu vécu ce rassemblement?

Jonathan Clauss: Oui, forcément que ça va très bien. Avec cette convocation, effectivement, ça redonne beaucoup d’énergie. C’est forcément plaisant de se dire que, après la déception d’il y a un an à peu près puis celle de la Coupe du monde qui a été dure à encaisser, j’ai su rebondir. J’ai bien bossé, bien assimilé les choses. J’ai été et je suis content d’être retourné en équipe de France. Ça s’est plutôt bien passé, pour ma part et pour l’équipe. Dans la globalité, je suis content de ce rassemblement.

Jean-Louis Tourre: Deux titularisations, contre les Pays-Bas avec une passe décisive et contre l’Écosse.

"J’ai réussi à switcher par rapport aux déceptions"

Jérôme Rothen: J’imagine, Jonathan, qu’il y a eu une discussion personnelle avec Didier Deschamps?

Jonathan Clauss: Oui, il m’a tout de suite convoqué, le lundi soir en arrivant. On a discuté de choses et d’autres. Il avait des choses à me dire. À la base, moi je n’avais pas forcément de choses à dire. Mais il m’a aussi laissé libre court à la parole, à mon point de vue, et ça nous a permis de chacun s’exprimer sur pas mal de choses et ça a fait du bien de mon côté de pouvoir discuter avec lui.

Florent Germain: Est-ce que c’était le point final? J’ai bien aimé une petite phrase avant que tu partes en sélection, où tu dis que cet été t’as réussi à switcher. Il y a peut-être eu un travail mental que tu peux nous expliquer ? Pour que tu oublies complètement l’épisode Coupe du monde. Peut-être que ce rendez-vous avec Didier Deschamps a été le point final à cela?

Jonathan Clauss: C’est ça. Cet été, j’ai réussi à vraiment switcher par rapport aux déceptions et aussi par rapport à la pression qu’il y a pu avoir lors de cette première année à Marseille. Il fallait faire un travail dessus. J’ai énormément discuté avec quelqu’un pendant deux mois. On a mis pas mal de choses en place. C’est ce qui m’a permis justement d’emmagasiner ces déceptions qui se sont transformées en force à un moment donné. Cela m’a permis de redémarrer fort cette deuxième saison. J’ai eu cette discussion avec le sélectionneur comme un point final à ces événements qui ont pu parfois être très beaux, parfois un peu moins beaux. Pour redémarrer sur de très bonnes choses.

Jérôme Rothen: Tu nous parles de cette déception à la Coupe du monde. Je parle en connaissance de cause, parce que j’ai plus ou moins vécu la même chose en 2006 avec Raymond Domenech. Mais ce qui me surprend, c’est que tu nous dis que t’as attendu le mois de juin pour régler cette situation.C’est long quand même, le mal devait être profond.

Jonathan Clauss: Je n’ai pas attendu le mois de juin pour régler entre guillemets mes problèmes. Tout de suite après l’annonce de la non-Coupe du monde et même la fin de la compétition, j’avais besoin de retrouver vite les terrains. L’OM avait besoin de moi et j’avais besoin de l’OM dans cette période, parce qu’il fallait que tout le monde soit performant sur le terrain. Après, j’ai pris mon mal en patience parce que je savais que ça allait peut-être traîner. Une Coupe du monde, c’est un rêve d’enfant. Quand vous êtes rêveur comme ça, que vous touchez presque du bout des doigts ce qui vous fait rêver depuis tout gamin, évidemment que ça ne met pas deux heures à partir.

Jérôme Rothen: Surtout que t’es vieux maintenant! Tu ne vas pas en avoir encore dix des Coupes du monde!

Jean-Louis Tourre: 31 ans.

Jonathan Clauss: Justement! Je n’ai pas mis jusqu’à juin, mais le fait d’avoir la tête un peu plus reposée, les vacances, d’autres choses à voir… Ça permet de se vider la tête, de discuter d’autres sujets, d’être moins sous pression du foot de tous les jours. Ce mois de juin m’a permis d’évacuer ce qu’on va appeler les résidus des six derniers mois.

"Éviter d’arriver encore une fois en grand enfant qui vit son rêve"

Jean-Louis Tourre: Tu as même dit pendant ce rassemblement que tu n’étais pas là pour être mignon à la télé. En gros tu n’es pas là pour prendre des photos, mais t’imposer et être titulaire.

Jonathan Clauss: Mignon…

Jérôme Rothen: Dans le sens bien coiffé!

Jonathan Clauss: Même pas! C’était surtout dans le sens où après mon parcours atypique, les gens s’identifiaient parfois à moi, parce que le parcours n’a pas été évident. Après, moi je voulais aussi éviter d’arriver encore une fois en grand enfant qui vit son rêve, qui ne vit pas le truc comme un professionnel.

Jérôme Rothen: Comme un compétiteur.

Jonathan Clauss: C’est ça. Je suis arrivé en équipe de France parce que…

Jérôme Rothen: Parce que tu le méritais, déjà, mais sur la pointe des pieds.

Jonathan Clauss: Exactement, avec des étoiles dans les yeux. Là, j’avais envie de mettre les deux pieds dedans, d’être vraiment concentré sur ce qui m’attendait. Et c’est ce que j’ai fait. L’expression, c’était plutôt dans ce sens.

Florent Germain: Qu’il n’y ait pas le sentiment que ce soit une belle histoire, que c’est éventuellement un peu facile de faire un choix fort avec Jonathan Clauss. Que tu sois considéré comme un compétiteur à part entière. Que tu montres que t’as envie d’y être. Assumer ça.

Jonathan Clauss: Exactement, c’est assumer ça.

Jérôme Rothen: Je pense que la discussion avec Didier Deschamps a dû te rassurer et a dû le rassurer aussi. Vous vous êtes dit les choses et ce n’est pas plus mal. À l’arrivée, tu as eu gain de cause. Maintenant, on a l’impression que tu es titulaire indiscutable!

Jonathan Clauss: Euh…

Jérôme Rothen: Je plaisante! Je te mets en difficulté!

Jonathan Clauss: Alors je pense qu’il y a eu gain de cause, pas forcément pour l’aspect football, parce que c’est tellement aléatoire et c’est à moi de continuer d’être bon avec l’OM pour que je suisse prétendre à une place dans les 23 de l’équipe de France et après une place de titulaire. Au-delà de ça, c’était sur l’aspect mental. Lui avait peut-être besoin de réponses sur mon aspect mental et sur ma force de caractère.

Jérôme Rothen: Est-ce qu’il t’a donné des explications sur le fait que tu pouvais jouer à quatre? Tu le montres cette année à Marseille, où t’es l’un des meilleurs, et ce n’est pas parce que t’es là que je le dis. T’es capable de jouer à quatre, on l’avait vu à Lens par moments même si vous avez joué à cinq, comme à Marseille où t’es passé de droite à gauche et on se demande encore pourquoi… Là, tu joues à quatre, t’es performant. Donc est-ce que Deschamps t’a donné des explications sur le fait qu’il pense que tu peux lui donner satisfaction comme latéral droit, malgré un profil plus offensif?

Jonathan Clauss: Oui, on a beaucoup parlé du poste. Effectivement, il savait que je pouvais jouer à quatre. Mais tant qu’il ne m’avait pas vraiment vu jouer à quatre à très haut niveau, évidemment qu’il n’allait pas me lancer dans le grand bain alors que je n’avais plus vraiment joué ainsi en club. Après, il m’a dit qu’il aimait bien mon profil, qu’il y avait des choses évidemment à parfaire, à gérer aussi au niveau des efforts parce que je suis avant tout un défenseur. C’est ce que Marcelino me disait, c’est ce que Gattuso me dit aussi aujourd’hui. Evidemment que l’apport offensif est important, parce que c’est l’évolution du football de faire plus que ce qu’on vous demande, mais la base c’est d’être défenseur. Ça fait plusieurs fois que je l’entends et c’est sur ça que je me concentre aujourd’hui. Oui, il y a des choses à parfaire, mais je suis dans la bonne voie et il faut que je continue à bien bosser comme ça.

"Gattuso aime pour l’instant ce que je propose"

Jean-Louis Tourre: Comment tu juges le début de saison de l’OM pour l’instant? On a l’impression que les désillusions, la Ligue des champions, certaines défaites en Ligue 1, noircissent le tableau.

Jonathan Clauss: Ça noiricit le tableau pour les gens de l’extérieur. Nous, à l’intérieur, à part cette élimination contre le Panthinaïkos, où on prend une défaite là-bas en jouant à dix et dans des circonstances un peu en notre défaveur. Malgré tout, on n’avait pas perdu de match. Oui, c’est sûr qu’il y a des matchs qu’il aurait fallu gagner ou qu’il faudrait gagner. Mais on aimerait gagner tous les matchs de la saison. Mais au-delà des résultats, malgré le changement d’entraîneur, malgré les événements qui tournent autour de nous, je trouve qu’on a réussi à encore plus créer cet esprit d’équipe. Ce côté famille, ce côté se donner à 2000% à l’entraînement. Pour être les premiers rouages d’un mouvement peut-être à l’intérieur du club pour nous faciliter la tâche dans des moments difficiles.

Jérôme Rothen: On ne va pas parler du passé recent, mais plus de l’actualité et du futur. Gattuso, qu’est-ce qu’il te demande personnellement depuis qu’il est arrivé?

Jonathan Clauss: Il me demande de continuer à jouer mon jeu. Il est derrière moi, on a beaucoup de discussions. Il aime pour l’instant ce que je propose. Donc c’est tant mieux pour moi. C’est un gagnant, un bagarreur, un combattant dans l’arme. Il a cette grinta que je n’ai peut-être pas autant développé que lui. C’est là-dessus qu’il vient beaucoup me chercher. Cet aspect chien, avoir la dalle.

Jérôme Rothen: C’est important ça pour un défenseur.

Jonathan Clauss: Justement, c’est important. Parfois, il en exagère. Mais je n’en rigole même pas du tout, je ne prends absolument rien à la rigolade. Quand il vient me chercher dessus, je sais qu’il a totalement raison. C’est pour ça que ce qu’il peut m’apporter là-dessus, je peux encore gratter dedans.

Florent Germain: On remarque que les fois où Renan Lodi n’était pas là, tu n’as pas glissé à gauche. C’est plutôt Murillo qui a joué à gauche. On a l’impression que ton point fort, c’est être à droite, et il ne veut pas se priver de ça. Est-ce que t’en as parlé avec lui? Sans trahir de secrets, j’ai quand même le sentiment que t’avais nourri une petite frustration d’être trimballé à droite et à gauche la saison passée. Il ne s’agit pas de pointer du doigt Igor Tudor, mais je crois que ça t’a un peu fatigué à un moment de la saison.

Jonathan Clauss: Jouer à droite, c’est évidemment mon poste de prédilection. Mon poste préféré, on va dire. Après, il n’a jamais été question que j’aille à gauche depuis le début de saison. S’il m’en avait parlé, ça ne m’aurait pas forcément dérangé. C’est juste qu’il ne m’en a jamais parlé. Pour Marcelino ou Gattuso, ça ne doit pas être une option. Concernant l’année dernière, Tudor avait des plans comme lui pensait être le mieux. Moi, à un moment donné, je suis joueur. On me demande de jouer à droite, à gauche, défenseur central ou attaquant, je le ferai.

Florent Germain: Le coach Gattuso dit quand même qu’il a retrouvé un groupe un peu perturbé par tant de changements tactiques entre Tudor et Marcelino. Est-ce que c’est une réalité? Est-ce qu’on perd un peu ses repères entre différentes demandes des entraîneurs?

Jonathan Clauss: On ne perd pas spécialement les repères. C’est juste qu’on veut tellement assimiler vite et bien qu’on sur-assimile. On a sur-assimilé les consignes d’Igor Tudor qui se sont totalement transformées avec Marcelino, qu’on a dû encore une fois sur-assimiler parce qu’il fallait agir très vite. Aujourd’hui, les choses changent encore. On essaie de sur-assimiler, mais au final c’est tellement ancré en nous…

Jean-Louis Tourre: C’est-à-dire sur-assimiler?

Jonathan Clauss: C’est en gros qu’on a envie de tellement bien faire, et vite, qu’on en fait trop. En faisant trop, on a parfois des vieux démons qui reviennent d’anciens systèmes de jeu, d’anciennes consignes, des choses qu’on a un peu plus de mal à oublier vite. Aujourd’hui, et c’est pour ça que je pense que cette trêve a été importante pour nous, on sent qu’on sait exactement ce que chacun doit faire. C’est clair pour tout le monde, tout le monde est impliqué à 200%. C’est ça qui est très important.

"Avec Gattuso, c’est plus dans le physique, plus dans le pressing, plus dans le contre-pressing"

Jérôme Rothen: Est-ce que le travail au quotidien avec Gattuso, même si tu n’as pas encore fait beaucoup de séances avec lui et que c’est difficile de cataloguer un entraîneur, est-ce qu’il axe son travail sur la physique, la technique, la tactique?

Jonathan Clauss: Il est arrivé rapidement, il n’avait pas tant de temps, donc ça a été beaucoup de conseils, de discussions. L’axe de travail était surtout porté sur le ballon, sur notre façon de jouer. L’aspect tactique, on l’a un peu mis en place, mais c’était surtout l’aspect avec le ballon, c’est ce qu’il aime. On a peaufiné en avançant avec beaucoup plus de tactique. L’aspect physique a été bien bossé pendant une semaine et demi. J’ai entendu des retours et j’ai bien fait d’être en sélection!

Jean-Louis Tourre: Gattuso avait dit que vous aviez travaillé physiquement, sous Marcelino, avec une méthode qui n’a rien à voir avec la sienne. Et donc que vous aviez peut-être un petit retard physique pour sa méthode.

Jérôme Rothen: Est-ce que tu confirmes ça? Le fait d’avoir eu une préparation avec Marcelino qui était peut-être trop différente de ce qu’on fait dans les autres championnats, à part l’Espagne bien sûr.

Jonathan Clauss: Le mot, c’est vraiment ça: différent. C’est complètement différent. Marcelino voulait une préparation axée sur une possession quasi totale du ballon. Derrière, défensivement, on n’était pas forcément obligés d’aller chercher extrêmement haut. En attendant les équipes adverses, on allait réussir à être bien physiquement. C’était plutôt dans cette optique. Avec Gattuso, c’est plus dans le physique, plus dans le pressing, plus dans le contre-pressing, plus dans les efforts. Mais les efforts quelconques, que ce soit une sortie de bloc, un dégagement du gardien où il veut que ses défenseurs sprintent jusqu’à la ligne du milieu de terrain. C’est peut-être bête à dire, mais des efforts répétés sur un match complet puisent de l’énergie. Du coup, il faut du coffre.

Jérôme Rothen: Je voulais finir sur ta qualité de centre. Bon pied, bon oeil, tu l’as, il n’y a aucun doute. Mais quand tu as une telle qualité, pourquoi tu ne te focalises pas plus sur les coups de pied arrêtés?

Jonathan Clauss: Je les travaille, mais comme je travaille plein de choses à l’entraînement. Après, ce n’est pas moi qui décide. Ils sont au courant, je pense, de mon pied. Mais je ne suis pas le seul à en avoir un.

Jérôme Rothen: Tu n’es pas le seul, bien sûr. Veretout a mis quelques galettes aussi, sur corner ou coup franc indirect.

Florent Germain: Alexis Sanchez et Dimitri Payet sont partis, donc Jonathan Clauss est un prétendant sérieux maintenant.

Jérôme Rothen: Tu parles des coups de pied directs. Ça, c’est à la liberté de chacun et comment le groupe vit et comment tu veux te placer dans cette hiérarchie. Bien sûr qu’il y a des bons pieds. Mais quand tu as la qualité comme ça pour centrer, et que c’est plus spécifique à toi que tous les autres joueurs, automatiquement tu le travailles plus. C’est pour ça que je ne comprends pas pourquoi tu ne t’imposes pas plus sur les corners ou les coups de pied arrêtés indirects.

Jonathan Clauss: Parce que le staff est arrivé et décide tout simplement. Je n’irai jamais à l’encontre du staff pour dire que j’ai un pied, que je sais frapper les corners. S’il m’arrive de faire ça et qu’on me répond qu’on me demande juste de jouer et de faire mon travail, eh bien je le ferai. C’est pour ça que je ne mettrai pas en avant par rapport à ça.

Jean-Louis Tourre: Voilà, on a l’exemple de quelqu’un de discipliné! Ça fait bizarre à Jérôme, ça!

Jonathan Clauss: Si demain on me dit de tirer les corners, je les tirerai. Si je ne dois pas les tirer, je ne les tirerai pas et je ferai en sorte d’être très bon sur le terrain et de ne pas faire d’histoire pour un corner.

Jérôme Rothen: D’accord, on va pousser pour toi alors. Merci beaucoup Jonathan de nous avoir accordé cette interview après ton retour en équipe de France. Je te souhaite de continuer à t’imposer avec Marseille, d’avoir de bons résultats.

Jean-Louis Tourre: Gros match dès samedi soir à Nice!

Jérôme Rothen: Donc bon courage! Et puis surtout, j’espère te revoir sur le terrain en équipe de France. Parce que ça fait du bien d’avoir des latéraux comme toi.

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