Lille-Reims: pourquoi Umtiti, victime d'une commotion cérébrale, a été autorisé à reprendre le match

Que s'est-il passé mardi soir au moment où Samuel Umtiti, victime d'un KO lors de la rencontre entre Lille et Reims (6e journée de Ligue 1), s'est effondré sur la pelouse du stade Pierre-Mauroy ? En cas de suspicion de commotion, le règlement au football se limite pour le moment à la règle des trois minutes. Il s’agit là d’une règle de l’IFAB. C’est-à-dire qu’immédiatement après le choc, le staff médical a trois minutes pour prendre une décision: autoriser le joueur à rester sur la pelouse ou le sortir. Durant ces trois minutes, le médecin fait donc rapidement les premiers tests basés principalement sur l’évaluation du niveau de conscience et sur les fameuses cinq questions du score de Maddocks: sur quel stade sommes-nous ? dans quelle mi-temps sommes-nous ? quel est le score ? contre quelle équipe as-tu joué la dernière fois ? ton équipe a-t-elle gagné le match ?
Ce protocole permet de tester rapidement la mémoire immédiate, prioritairement touchée en cas de commotion. Le médecin peut compléter ces questions par des interrogations qui font appel à une mémoire plus lointaine comme "a-t-on gagné ou perdu le week-end dernier ?" Si une seule erreur est faite par le joueur lors de ce questionnaire rapide, il sort immédiatement.
Dans le cas de Umtiti, durant ces trois minutes, le docteur du LOSC Damien Monnot, ancien médecin de Bordeaux-Bègles qui connaît donc parfaitement la problématique des commotions en rugby, n’a pas eu accès aux images du choc. Lors des trois minutes, Umtiti répond parfaitement aux questions et souhaite absolument poursuivre le match. Le médecin examine la nuque. Aucun traumatisme vertébral n’est relevé. Les trois minutes se terminent et face à l’envie d'Umtiti de reprendre, porté par l’adrénaline, il reprendre sa place sur le terrain jusqu’à la mi-temps.
"Si le médecin du LOSC avait eu accès aux images sur le moment, il l’aurait sorti immédiatement"
De retour au vestiaire, le médecin du LOSC se précipite pour récupérer les images qui lui donnent de précieuses informations sur les circonstances précises du choc. À la vue des images et de l’état d’Umtiti qui se sentait moins bien, la décision a été de le sortir à la mi-temps. "Si le médecin du LOSC avait eu accès aux images sur le moment, il l’aurait sorti immédiatement, explique-t-on au département médical de la FFF. Toutes les instances (LFP, UEFA) permettent au club d’avoir une VAR médicale à disposition. C’est-à-dire qu’une personne sur club en tribunes ou sur le banc peut avoir une tablette avec les images. Mais cela demande des moyens humains supplémentaires. Il faut maintenant que les clubs investissent dans ce domaine pour pouvoir réagir plus vite. Ils ne le font pas pour des raisons économiques et parce que le sujet des commotions n’a rien à voir avec le rugby."
En effet, selon nos informations, la saison dernière, 23 commotions en matchs ont été comptabilisées sur 770 rencontres de L1-L2. À titre de comparaison, en rugby il y en a une tous les deux matchs.
Si le staff du LOSC avait eu accès aux images sur le moment, deux éléments auraient définitivement convaincu le médecin de sortir Umtiti sur le champ: le fait qu’il tombe sans gérer la chute et qu’il soit resté immobile plus de deux secondes. Le choc ayant eu lieu de l’autre côté du terrain, ces éléments n’étaient pas facilement identifiables de façon certaine par le staff médical sans appui de la vidéo.
En avril dernier, la France, l’Angleterre et les USA (via la MLS) ont fait une demande formelle à l’IFAB pour expérimenter le délai de 12 min en cas de commotion et ainsi s’aligner sur ce qu’il se fait au rugby. Le staff médical bénéficierait alors de 4 fois plus de temps qu’aujourd’hui avant de prendre la décision et donc d’avoir accès à ces images essentielles. Cette demande a été refusée par l’IFAB. La France compte bien renouveler sa demande pour améliorer le protocole dans ce type de situation.