Montpellier: immersion avec un staff adepte de la vidéo

La vidéo, c’est le dada d’ODO. Olivier Dall’Oglio, nouvel entraîneur de Montpellier, ne se souvient pas exactement de quand il a utilisé la vidéo pour la première fois. Mais, très vite, il y a vu un intérêt: "Je suis quelqu’un de visuel, l’image me parle plus. Au lieu de parler pendant trois heures, la vidéo permet de montrer beaucoup de choses. Une image vaut mieux que mille mots. Dès que j’ai pu avoir des images, j’ai travaillé avec. Au début, quand j’étais à Dijon, c’était juste les images du match, mais avec le temps cela s’est amélioré. Aujourd’hui, on peut avoir quatre plans avec tout le bloc équipe par exemple."
Et pour exploiter le mieux possible la quantité de données, ils sont trois analystes à temps plein : Jonathan Llorente (analyse adversaire avec force et faiblesse animation et joueurs clefs), Selim Errif (data, analyse coups de pied arrêtés adverses et retour vidéo individuel post-formation) et Maxime Flaman (retour match avec principe et plan de jeu et retour individuel joueur), arrivé de Brest dans les valises de Dall’Oglio. Soit autant qu’à Paris, Marseille ou Lyon. Pour le coach de la Paillade, ce ne sont pas "que des garçons qui manipulent un ordinateur ou une caméra. Ce sont des adjoints. On a besoin d’avoir des analystes qui sont des tacticiens. Je les consulte. On travaille sur les options de jeu. Ce sont eux qui voient le plus de matches. Je les écoute, c’est normal et après je tranche". A trois, ils doivent regarder près de 100 heures d’images par semaine. Et preuve de leur importance, ils ont quitté leur bureau pour rejoindre l’open space avec l’ensemble du staff.
Depuis cette année, la vidéo rythme la semaine des joueurs à Montpellier. Le mardi, retour collectif et individuel sur le match. Et à partir du mercredi, des images sur le prochain adversaire avec zooms offensifs, défensifs et les coups de pied arrêtes. Sans oublier, les demandes des joueurs qui peuvent aussi être friands d’images.
Et le jour du match, Romain Pitau, adjoint chargé de la post-formation, prend place à côté des analystes pour communiquer avec le banc de touche, notamment Grégory Péres, adjoint de Dall’Oglio. Ils sont donc quatre à discuter, échanger, disséquer le jeu pour conseiller le mieux possible le banc de touche et essayer d’apporter quelques ajustements. Retour sur le match face à Nantes (2-0), vu des yeux des analystes.
Préparation méticuleuse
Ce 31 octobre, les joueurs arrivent, comme d’habitude, 1h30 avant le coup d’envoi. Petit tour sur la pelouse, retrouvailles avec quelques Nantais, mise en tenue et échauffement avant le coup d’envoi. Pendant ce temps, les analystes, eux, installent tout le matériel nécessaire. Chacun son ordinateur. Et ils s’assurent que les machines communiquent bien entre elles. Pour la venue de Nantes, petite excitation. Ils ont un nouveau joujou. Une caméra tactique qui doit permettre d’avoir le plan large et d’abandonner ainsi le vieux caméscope avec le trépied que Jonathan passait son temps à bouger pour suivre le ballon. Testée le vendredi, ils sont impatients de voir son fonctionnement car c’est rare dans les clubs de Ligue 1, ce genre de caméra.
Avant le coup d’envoi, Jonathan partage quelques clés du match "avec l’axe Pallois, Girotto, Kolo Muani, on sait que l’on va affronter une équipe très athlétique. On a d’ailleurs prévenu Teji (Savanier), qu’il risquait de subir des contacts assez durs dans les premières minutes". Le meneur de la Paillade attendra 19 minutes avant de goûter au traitement de faveur de Girotto, qui échappera de peu au jaune. "Je l’avais dit, je me suis juste trompé sur la minute" rigole Jonathan. Maxime, lui, est plus excessif dans ses analyses: "Oh, c’est jaune ça ! Il vient de faire deux fautes en deux minutes".
Et être analyste vidéo pendant un match demande une vraie qualité visuelle. Du jeu à l’écran, de l’ordinateur au terrain. Pas besoin de grandes phrases entre eux, quelques mots suffisent pour se faire comprendre. Des échanges brefs: "Téji, il est face au jeu-là, c’est bien joué". Transition, profondeur, patience. "Je mets cette séquence Romain? On a été patient là" questionne Jonathan. Les problèmes sont rapidement identifiés. Pitau descend rapidement l’information au banc de touche.
Pendant que Selim compile les stats, Maxime isole la séquence la plus marquante: "Pour le moment, j’ai gardé l’appel d’Arnaud Souquet sur la passe de Savanier. S’il y en a une de meilleure, on en mettra une autre". Jonathan la récupère sur son ordinateur et dessine dessus pour être le plus explicite possible à la mi-temps. Montpellier a souffert pendant le premier acte mais le score est toujours de 0-0. Mi-temps sifflée.
Jonathan descend rapidement la centaine de marches pour rejoindre le vestiaire, avec son ordinateur sous le bras. Trois séquences offensives et défensives ont été isolées, 3-4 minutes à peine. Et c’est Dall’Oglio qui tranche ce qu’il décide de montrer. Juste avant de remonter, l’analyste débriefe la causerie : "Il a insisté sur les transitions défensives, notamment à la perte de nos ballons, d’être vigilant, car on a été en difficulté. On n’est pas assez équilibré pour pouvoir faire un contre pressing ou un repli pour récupérer le ballon. Au niveau offensif, insister sur la profondeur. Il a montré deux séquences, notamment une action avec un décalage qui aurait pu être mieux finie".
Analyse pertinente
Une analyse qui portera ses fruits. Montpellier marquera notamment le 2e but sur une bonne gestion de la profondeur avec une passe de Ferri pour Wahi. Jordan Ferri, rodé à la Ligue 1, aime ses débriefings à la mi-temps : "Il nous montre en rapide comment on peut mieux gérer les animations offensives et aussi ce que l’on a bien fait. Sur le terrain, parfois, on ne voit pas les situations, les bons appels ou les mouvements. Aujourd’hui, c’était surtout axé sur la profondeur". La 2e mi-temps est un peu plus tranquille pour les analystes. Le gros du travail a été fait, ils ont donc plus les yeux rivés sur le match et sont un peu plus dans les encouragements. Le scénario du match enlève aussi de la pression. Victoire au final 2-0 de la Paillade. Et si les joueurs célèbrent la victoire avec les supporters, les analystes replongent rapidement dans le boulot. Il faut vite préparer le débriefing vidéo individuel et collectif qui sera présenté aux joueurs dès le mardi.