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Les belles histoires de la Ligue des champions: 2012, l'année renversante de Chelsea

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Malgré une saison difficile, marquée par l'éviction d'André Villas-Boas et jalonnée de rencontres contre des adversaires coriaces, Chelsea a atteint l'objectif dont rêvait Roman Abramovitch: soulever la Ligue des champions. Pour y parvenir, les Blues ont dû renverser des montagnes.

4 mars 2012: c'est la crise à Chelsea. Les Blues, largués dans la course au titre en Premier League, viennent de perdre à West Bromwich Albion. Quelques jours plus tôt, ils se sont inclinés 1-3 sur le terrain de Naples en huitièmes de finale aller de la Ligue des champions (compétition à suivre en intégralité et en exclusivité sur RMC Sport). Ça va mal et la direction prend une mesure radicale: André Villas-Boas, c'est fini. Le jeune technicien portugais, présenté comme le nouveau José Mourinho, prend la porte après huit mois décevants.

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Un premier exploit face au Napoli

Roberto Di Matteo, l'ancien joueur, passe d'adjoint à entraîneur principal. Sa mission: terminer du mieux possible cette saison 2011-2012. En langage Chelsea, ça veut quand même dire: tout gagner si possible, crise ou pas. Pour le championnat, c'est déjà plié, mais il y a toujours la Coupe d'Angleterre... et la Ligue des champions bien sûr.

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Première mission: renverser la tendance face au Napoli d’Edinson Cavani, Ezequiel Lavezzi, Marek Hamsik... A l’aller, Chelsea a été largement dominé et aurait même pu subir une défaite plus lourde. Autant dire qu’avec les soucis du moment, la perspective d'un retournement apparaît assez illusoire.

Mais à Stamford Bridge, les Blues s'enflamment très vite. Didier Drogba, du haut de ses 34 ans, ne brille plus autant en championnat mais retrouve ses sensations en C1. Il ouvre le score de la tête à la demi-heure de jeu et fait monter la température. En début de seconde période, John Terry l’imite. Stamford Bridge s’embrase mais Gökhan Inler calme le stade en réduisant l’écart à 2-1. Un penalty de Frank Lampard envoie les deux équipes en prolongation. Et à la 105e, Branislav Ivanovic, resté aux avant-postes, libère son équipe d’une lourde frappe.

Chelsea s’impose 4-1 à l’issue d’une soirée dingue et se qualifie pour les quarts de finale. Di Matteo, considéré comme un simple intérimaire, savoure ce premier succès. "Nous avons fait l’histoire ce soir. Nous étions dans une situation tellement difficile avant le match. Nous savions que ça nous coûterait beaucoup pour nous en sortir. Ce qu’a fait l’ensemble de l’équipe est incroyable", confie-t-il à ITV. Et ce n’est que le début…

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Drogba met le Barça à terre

En quarts de finale, les Blues passent l’obstacle Benfica sans grande difficulté. Le printemps s’annonce chargé. En Angleterre, Chelsea doit affronter Liverpool en finale de la Cup. Et avant ça, les Londoniens héritent du FC Barcelone en demi-finales de la Ligue des champions, avec match retour en Catalogne. Un Barça qui est, rappelons-le, champion d’Europe en titre.

Lors du match aller, Alexis Sanchez touche très vite la barre de Petr Cech. L’attaque de Barcelone fait souffrir la défense de Chelsea, mais les Blues disposent d’un monstre de puissance en la personne de Didier Drogba. L’Ivoirien pèse sur Carles Puyol et Javier Mascherano et finit par tromper Victor Valdes sur un beau service de Ramires (45+2e). L’arrière-garde anglaise pliera en seconde période, sans jamais rompre. Et voilà Chelsea qui remporte la première manche sur le plus petit des scores. C’est positif, mais les Blues savent que le match retour sera très difficile…

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Au Camp Nou, le 24 avril 2012, le Barça se rue très vite à l’attaque. Chelsea perd rapidement Gary Cahill sur blessure. Puis, John Terry donne un coup de genou à Alexis Sanchez et écope d’un carton rouge à la 37e, juste après l’ouverture du score de Sergio Busquets. A onze contre dix, le Barça fait le break grâce à Andrès Iniesta (43e). Barcelone mène 2-0 et joue en supériorité numérique. Rien ne semble pouvoir empêcher les Blaugrana de se hisser à nouveau en finale.

Et Torres crucifia Valdes

Rien sauf Ramires. Dans le temps additionnel du premier acte, le Brésilien profite d’une passe géniale de Lampard pour débouler face à Valdes et battre le portier d’un lob parfait (45+1e). Le Camp Nou se glace; Chelsea, bien que largement dominé, vient d’inscrire un but assassin. Maintenant, les hommes de Pep Guardiola doivent marquer deux nouveaux buts pour se qualifier.

Dès le début de la seconde période, ce match tourne à l’attaque-défense et Lionel Messi se voit offrir la balle du 3-1 sur penalty. Mais l’Argentin envoie son tir sur la barre transversale. Sous les sifflets, alors que Cech multiplie les parades et que Messi touche encore un montant, le si décrié Fernando Torres remplace Didier Drogba. Bonne pioche pour Di Matteo. Dans le temps additionnel, l’Espagnol profite des boulevards laissés par Barcelone pour aller dribbler seul Valdes, égaliser et envoyer Chelsea en finale (2-2).

La revanche est belle pour El Nino. Un an plus tôt, le buteur était recruté pour 58 millions d’euros, record du club à l’époque. Depuis, l'Espagnol était en grande souffrance, loin du chasseur qu'il était à Liverpool. Et le voilà qui crucifie le géant catalan, lui, le Madrilène. La victoire des Blues chamboule l’institution blaugrana. Trois jours après, Pep Guardiola annonce la fin de son aventure sur le banc du Barça.

Chelsea, avec ses vieux briscards, son coach inexpérimenté et ses doutes, parvient contre toute attente à se qualifier pour la deuxième finale de C1 de son histoire, quatre ans après celle perdue contre Manchester United. C’est peut-être l’équipe la moins pimpante, sur le papier en tout cas, de l’ère Abramovitch. Mais c’est bien cette équipe qui va tenter de remporter la Coupe aux grandes oreilles, après la Coupe d'Angleterre.

Chez lui, le Bayern avait déjà une main sur le trophée...

En finale, Chelsea a rendez-vous avec le Bayern Munich et son public. En effet, ce match se tient à l’Allianz-Arena, fief des Bavarois. C’est la première fois depuis 1984 et le Liverpool-Roma joué au Stade olympique de Rome qu’un club évolue pleinement à domicile pour une finale.

Roberto Di Matteo doit composer avec beaucoup d’absents. Branislav Ivanovic, Ramires, Raul Meireles et bien sûr John Terry sont suspendus (comme David Alaba, Holger Badstuber et Luiz Gustavo côté Bayern). Sur le terrain de Munich, sans surprise, c’est le Bayern qui domine outrageusement. Les joueurs de Chelsea sont acculés devant leur cage et ne s’approchent quasiment jamais du but de Manuel Neuer.

La résistance des Blues se brise à la 83e. Toni Kroos trouve Thomas Müller au second poteau. L’Allemand pique sa tête et trompe enfin Petr Cech. L’Allianz-Arena se libère. "Tout se passait comme il fallait. On était vraiment en bonne position à ce moment-là… C’était déjà la 83e minute. Cela devait nous suffire", commentera plus tard Diego Contento auprès de So Foot.

Drogba, le rédempteur-sauveur, rend hommage à Cech, "le n°1"

Jupp Heynckes fait sortir son buteur et lance Daniel van Buyten pour verrouiller le score dans les ultimes minutes. Mais Chelsea n’a pas dit son dernier mot. 88e: corner de Juan Mata. Didier Drogba est là bien sûr, au premier poteau. "J’avais très peur que Frank (Lampard) touche le ballon, car le centre était parfait. Frank était juste devant moi. Il a sauté, mais je pense qu’il a senti que j’étais derrière lui car il s’est baissé", expliquera l’Ivoirien plus tard. Finalement, le capitaine des Blues s’efface et laisse son coéquipier arracher l’égalisation d’une tête puissante. Stupeur à l’Allianz-Arena!

La prolongation commence et prend une tournure dramatique. 93e: Didier Drogba, héros quelques instants plus tôt, se met à la faute. Franck Ribéry s’effondre à son contact et obtient un penalty. Arjen Robben se présente face à Petr Cech, mais le Tchèque, devant une tribune de supporters Blues en délire, bloque le tir du Néerlandais… avec l’aide de ses fesses. C’est inévitable, cette finale se jouera aux tirs au but.

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Philipp Lahm marque le premier et donne l’avantage au Bayern. Juan Mata, premier tireur de Chelsea, échoue sur Manuel Neuer. Les locaux prennent tout de suite l'ascendant (1-0). Mario Gomez, David Luiz, Manuel Neuer, Frank Lampard réussissent successivement ensuite. Mais Cech repousse à une main la tentative d’Ivica Olic, et Ashley Cole remet les deux équipes à égalité (3-3). Arrive le tour de Bastian Schweinsteiger… qui trouve le poteau. La balle de match est pour le cinquième et dernier tireur de Chelsea. Comme un symbole, ce tireur, c’est Didier Drogba.

Quatre ans plus tôt, l’ancien Marseillais se faisait expulser en finale contre Manchester United. Trois ans plus tôt, il disjonctait à l’issue d’une demi-finale polémique contre Barcelone et prenait quatre matches de suspension. Ce cru 2012, c’est celui de la rédemption. Didier Drogba prend Manuel Neuer à contre-pied et offre à Chelsea sa première Ligue des champions. Dans son antre, le Bayern est médusé. Ce Chelsea que personne n’attendait a réussi un dernier exploit en venant s’imposer ici (1-1, 4 tab à 3).

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Didier Drogba, enfin vainqueur, symbole de ce sacre, n’oublie pas d’y associer Petr Cech. "Après mon tir au but, je suis devenu fou. Je m’apprêtais à courir vers mes coéquipiers, mais je me suis tourné très vite vers Petr Cech. Sans lui, sans cet arrêt sur le penalty de Robben, nous ne serions pas allés jusqu’aux tirs au but. Nous aurions perdu et, au lieu d’être le héros, je serais resté comme le méchant pour avoir provoqué ce penalty. A chaque fois que je pense à la Ligue des champions, à chaque fois que je vois ce trophée ou que je me rappelle que Chelsea l’a soulevé, je pense à Petr Cech. Pour moi, c’est le n°1."

Nicolas Bamba