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Les belles histoires de la Ligue des champions: l’épopée de Monaco en 2004

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Contre toute attente, cette saison 2003-2004, l’AS Monaco se hissa jusqu’en finale face au FC Porto. Une belle aventure avec des révélations, des buts en pagaille, un Morientes ultra-dominant, et des victoires retentissantes face aux Galactiques du Real Madrid et face au Chelsea de Roman Abramovitch.

Août 2003. La saison vient de commencer et l’AS Monaco subit d’entrée un gros coup dur. Shabani Nonda, meilleur buteur de l’exercice 2002-2003 en Ligue 1 (26 buts), se blesse gravement au genou dans un match de championnat face au PSG. Cette indisponibilité met à mal les projets de l’ASM, qualifiée pour la Ligue des champions (une compétition à suivre en intégralité et en exclusivité sur RMC Sport). Mais de ce coup du sort va découler un transfert qui va profondément marquer la saison du club du Rocher.

Monaco doit remplacer son buteur congolais. Et le club alors coaché par Didier Deschamps jette son dévolu sur une valeur sûre: Fernando Morientes, très bon au Real Madrid mais moins utilisé depuis l’arrivée de Ronaldo un an plus tôt. En quête de temps de jeu et d’Europe, l’Espagnol relève le défi: il est prêté pour toute la saison à l’ASM. Les vice-champions de France ne vont pas le regretter. "Nando" va porter les Rouge et Blanc très haut en C1.

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Un historique succès contre La Corogne: 8-3!

En ce début de saison, les favoris pour la victoire en Ligue des champions sont le Real Madrid des Galactiques, l’Arsenal de Wenger, Henry et Vieira, ou encore l’AC Milan, tenant du titre, ou la Juventus, finaliste quelques semaines plus tôt. Ils sont bien peu à parier sur Monaco. Pourtant, avec ses quelques stars, ses bons joueurs estampillés Ligue 1 et d’excellentes trouvailles, le club du Rocher va secouer l’Europe.

Dès la phase de poules, ça démarre très fort. Monaco gagne ses deux premiers matches, avec un 4-0 contre l’AEK Athènes. Il y a surtout cet énorme carton contre le Deportivo La Corogne, le 5 novembre: les Monégasques écrasent leurs adversaires 8-3, avec un quadruplé notamment de Dado Prso! Une bonne façon pour le Croate de fêter ses 29 ans. Ce score fleuve représente un record à l'époque. L’ASM termine première du groupe C avec en prime le statut de meilleure attaque (15 buts, à égalité avec la Juventus).

Une équipe parfaitement équilibrée

Cette saison 2003-2004 marque un changement dans le format de la Ligue des champions. La deuxième phase de poules disparaît au profit des huitièmes de finale (aller/retour). A ce stade de la compétition, l’AS Monaco hérite du Lokomotiv Moscou. En Russie à l’aller, les Moscovites l’emportent mais concèdent un but de Morientes (2-1). Au retour, un unique but de Prso permet à Monaco de gagner (1-0) et de passer à la faveur du but inscrit à l’extérieur.

Qualifié pour les quarts de finale, le club monégasque a fière allure. Dans la cage, Flavio Roma assume pleinement son rôle de n°1, après avoir bataillé avec Stéphane Porato puis Tony Sylva. Dans l’axe de la défense, la paire Givet-Squillaci se révèle et frappe à la porte des Bleus. Le côté gauche impressionne, avec Patrice Evra et la machine à centrer Jérôme Rothen. Moins clinquants mais tout aussi précieux, Andreas Zikos, Lucas Bernardi, Jaroslav Plasil et Edouard Cissé excellent. Et devant, le capitaine Ludovic Giuly brille avec Fernando Morientes, Dado Prso et le tout jeune espoir Emmanuel Adebayor.

L'exploit face aux Galactiques du Real Madrid

Mais les ambitions monégasques sont mises à mal par le tirage au sort, qui a désigné le Real Madrid pour prochain adversaire en quarts de finale, avec match aller à Santiago-Bernabeu. Là-bas, c’est quand même l’ASM qui frappe la première grâce à Sébastien Squillaci, dans un style peu orthodoxe en fin de première période. Mais au retour des vestiaires, les Galactiques s’énervent, et avec de la réussite, ils font plier Monaco avec quatre buts inscrits par Ivan Helguera, Zinedine Zidane, Luis Figo et Ronaldo. Le Real plane… avant d’être ramené un peu sur terre. Fernando Morientes réduit l’écart à quelques minutes de la fin. L’attaquant ne célèbre pas face à son ancien public. Le Real ne gagne "que" 4-2. Ce dernier but signé Morientes, les Merengue vont le regretter.

Au match retour, ça part pourtant mal pour Monaco, qui concède rapidement un but de Raul. D’une bonne volée, Giuly égalise en fin de première période. Le match s’embrase dès le retour des vestiaires: sur un long centre d’Evra, Morientes saute et semble rester dans les airs pendant une éternité. Sa reprise de la tête laisse Iker Casillas sans réaction. C’est déjà le septième but de l’Espagnol en C1 cette saison. Tous sont inscrits de la tête. Et voilà Monaco qui mène 2-1.

Il ne manque qu’un but pour accomplir ce qu’on croyait impossible. Ludovic Giuly libère tout Monaco d’une subtile Madjer à la 66e minute. Le Real est à terre et ne s’en relève pas. L’exploit est accompli : Monaco sort le grand Real, et avec la manière! Fernando Morientes, impérial dans le jeu aérien, est le nouveau chouchou des supporters. Dans toute l’Europe, on se méfie désormais de cette ASM.

Les Blues passent aussi à la casserole

En demi-finales, les bookmakeurs parient que Monaco jouera Arsenal, qui écrase la Premier League cette saison-là. Finalement, c’est Chelsea qui passe au détriment des Gunners. Un Chelsea qui a bien changé. Quelques mois plus tôt, Roman Abramovitch a pris possession du club et a commencé à investir pour en faire un gros d’Europe. Ce n’est que la toute première étape de la fusée que le magnat russe construit, mais on y trouve déjà d’excellents éléments: Claudio Ranieri sur le banc, William Gallas, John Terry, Frank Lampard et Eidur Gudjohnsen déjà présents, Claude Makélélé, Juan Sebastian Veron, Hernan Crespo, Damien Duff, Joe Cole et Adrian Mutu recrutés…

Au match aller, Monaco prouve encore sa suprématie à domicile. Dado Prso ouvre le score. Hernan Crespo lui répond, mais dans le dernier quart d’heure, Fernando Morientes fusille Carlo Cudicini (son premier but du pied en C1 cette saison-là), et Shabani Nonda, enfin de retour, scelle la victoire monégasque (3-1). L’ASM, bien lancée, doit quand même encore gérer le match retour à Londres.

A Stamford Bridge, la demie retour commence mal. Rapidement, Chelsea mène 2-0 (buts de Jesper Gronkjaer et Frank Lampard) et touche du doigt la qualification. Jusqu’à la douche froide: dans le temps additionnel du premier acte, Jérôme Rothen transperce la défense depuis son aile gauche et centre pour Morientes, dont la tête trouve le poteau et Hugo Ibarra, bien placé pour réduire l’écart. En seconde période, Morientes, encore lui, réalise un une-deux parfait avec Bernardi et égalise du droit (2-2). Chelsea est impuissant: c’est bien l’ASM qui se hisse en finale!

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Une fin cruelle

La dernière marche sera trop haute. Rien ne tournera rond pour Monaco au stade de Gelsenkirchen (Allemagne), théâtre de la finale contre le FC Porto, autre finaliste surprise. Didier Deschamps perdra vite son capitaine Ludovic Giuly sur blessure (qui sera aussi forfait pour l’Euro 2004). Les Portugais, coachés par José Mourinho, maîtrisent le match d’une main de maître et s’imposent logiquement avec à la clé à un score lourd: 3-0.

Malheureusement, cette saison se termine mal pour l’ASM qui, à jouer sur plusieurs tableaux, a perdu de l'énergie et a fini par perdre son avance en Ligue 1 pour terminer seulement troisième, derrière Lyon et Paris. Pas de titre européen non plus donc. Mais une performance qui reste dans les mémoires tout de même. Et dans les livres aussi. Fernando Morientes termine meilleur buteur de la C1 (9 buts) devant Dado Prso (7 buts). Jérôme Rothen, lui, termine co-meilleur passeur de la C1 (6 buts) à égalité avec Deco (FC Porto).

Cette campagne européenne marque le crépuscule d’une très belle équipe. Durant l’été, Fernando Morientes retourne au Real. Il n’y restera pas longtemps et ne retrouvera jamais vraiment son niveau ensuite (Liverpool, Valence, Marseille). Hugo Ibarra voit son prêt s'achever et doit rallier le FC Porto. Jérôme Rothen rejoint le PSG, son club de cœur, où Edouard Cissé est revenu. Ludovic Giuly, de son côté, répond à l’appel du FC Barcelone, tandis que Dado Prso s'envole pour les Glasgow Rangers. Quelques mois plus tard, Patrice Evra part aussi pour Manchester United.

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Nicolas Bamba