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Obilalé, le calvaire continue

Kodjovi Obilalé

Kodjovi Obilalé - -

Un an après l’attaque du bus du Togo lors de la CAN en Angola, Kodjovi Obilalé, touché au dos par une balle, n’a toujours pas refait surface. Obligé de se déplacer en béquilles, obligé de tirer un trait sur sa carrière, il souffre aussi d’une situation matérielle des plus précaires.

Jeudi 6 janvier. Collège Saint-Joseph Lasalle de Questembert dans le Morbihan. Dans la cour, une poignée d’adolescents s’apprête à prendre la pose. Parmi eux, un homme. Doudoune cirée, jean, baskets. Et des béquilles à ses côtés. On tend à l’individu un ballon. Un geste de circonstance pour ce futur parrain de la section football de l’établissement. Mais ce dernier l’écarte du bras. « Non, non, le foot, c’est fini pour moi. » Cet homme qui parle d’une voix douce mais ferme, c’est Kodjovi Obilalé.

Il y a un an, celui que l’on surnomme « Doudou » était encore le gardien de but de la GSI Pontivy, club pensionnaire de CFA. Et dernier rempart de l’équipe nationale du Togo. Ça, c’était avant la terrible date du 8 janvier 2010. Ce jour-là, alors qu’il ralliait l’Angola pour y disputer la CAN, le bus des Eperviers est pris pour cible par le FLEC, le mouvement indépendantiste de l’enclave de Cabinda. Les joueurs togolais sont mitraillés. « Doudou » reçoit une balle dans le dos et à l’abdomen. Diagnostic ? Fracture ouverte de la colonne vertébrale. Après six opérations, Kodjovi Obilalé retrouve l’usage de sa jambe gauche. Mais pas sa vie d’avant.

Il va écrire sa biographie

« Je récupère petit à petit, lâche le Togolais. J’espère pouvoir abandonner les béquilles un jour prochain. » Et remarcher. En attendant, c’est en voiture automatique qu’il se déplace. Aujourd’hui, Kodjovi Obilalé vit de ses économies et des 650 euros mensuels qu’il touche pour son handicap. La Fédération et la Ligue de Bretagne lui ont versés 5 500 euros. Le Togo a pris en charge une partie de ses frais d’hospitalisation au centre de rééducation de Kerpape et la FIFA lui a signé un chèque de 71 000 euros. « Si je m’appelais Drogba, ça ne se serait pas passé comme ça », juge Obilalé. L’argent, même jugé insuffisant, n’efface pas l’amertume. « Ça restera indélébile, c’est clair », reconnaît Philippe Le Mestre, son ancien président à Pontivy.

« Le plus difficile pour moi au quotidien est d’accepter ma paraplégie incomplète, confesse Doudou. La dernière fois, j’ai cuisiné et j’ai oublié mes béquilles. Je ne savais pas comment faire pour apporter la nourriture sur la table. J’ai dû la pousser avec le pied. J’avais mal au cœur. » Malgré le sourire, la souffrance est vivace. Mais « s’il pleure encore aujourd’hui parfois », Kodjovi Obilalé a le regard tourné vers l’avenir. Vers sa formation en bureautique-informatique. Et sa préparation du diplôme d’éducateur sportif.

On l’aura compris, le ballon rond est loin désormais. « Il est venu nous voir en début de saison, explique Nicolas Girolet, son ex-entraîneur adjoint à la GSI. Mais c’est difficile pour lui. Le foot est une histoire de sa vie. Elle a été écrite. Et maintenant, il espère en écrire d’autres. » Très certainement dans la biographie qu’il a prévu d’écrire.