Sfeir : « Le peuple égyptien est perdu »

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Pour Antoine Sfeir, directeur des Cahiers de l’Orient, le drame de Port-Saïd vient d’un sentiment d’abandon d’une partie de la population égyptienne. La révolution qui a fait chuter Moubarak n’a pas donné ce qu’espéraient les jeunes égyptiens comme il l’a dit au micro des Grandes Gueules sur RMC : « C’est à la fois un événement et un non-événement. Le non-événement c’est que dans ces pays-là, beaucoup de matches se terminent par des pugilats. L’événement c’est le nombre de morts. C’est le nombre de morts qui fait qu’on en parle. Dans tous les événements qui secouent le Proche-Orient, on peut voir une manipulation. Que l’armée ou la police n’ait pas fouillé les gens, ils ne fouillent pas toutes les personnes au stade. Que l’armée soit restée l’arme au pied, ils n’ont pas reçu d’ordre, c’est ça le drame. C’est trop facile derrière de se cacher derrière les supporters de Moubarak.»
Et d'ajouter: «Les frères musulmans sont aux affaires et responsables devant la population qui les a élus. Si le peuple n’a pas de pain pour manger, ils seront tenus pour responsables et n’auront pas 37% aux élections. L’armée a été et veut rester l’ossature du pouvoir. Il faut voir dans cet événement quelque chose de sociétal. Près d’un an après le renversement de Moubarak, on est à la recherche d’un autre Raïs. Le peuple lui-même est perdu. Il se retrouve dans une bipolarité entre les frères musulmans ou l’armée islamiste alors que ce sont les jeunes, qui ont lancé la révolution et qui ne sont dans aucun de ces camps. Aujourd’hui, ils sont paumés et à la recherche d’autre chose. Il y a un vide qui s’est créé et qu’il faut remplir d’une manière ou d’une autre. » 74 personnes sont décédées dans le drame de Port-Saïd.»