RMC Sport

Jeux olympiques (judo): Luka Mkheidze, d'un camp de réfugiés à la médaille de bronze

Né en Géorgie, passé par un camp de réfugiés en Pologne, le Français Luka Mkheidze a apporté à la France sa première médaille aux JO de Tokyo. Le judoka français a pris le bronze en judo (-60 kg), ce samedi.

Il est l’athlète masculin le plus petit de la délégation française aux Jeux olympiques. Du haut de son 1,60m, il est devenu l’un des plus grands. Dans la catégorie des -60kg, le judoka Luka Mkheidze a apporté à la France sa première médaille olympique, en bronze, ce samedi aux JO de Tokyo. Le natif de Tbilissi a donné le ton d’entrée en dominant en prolongation l’Espagnol Francisco Garrigos, un adversaire qui l’avait battu en finale des championnats d’Europe au mois d’avril à Lisbonne. Après cette belle revanche, il a ensuite franchi les marches jusqu’au podium, en ne chutant qu'en demi-finales. Il a battu le Sud-Coréen Won Jin Kim dans le combat pour la médaille de bronze, encore en golden score.

"Je suis très, très fier. Franchement, je n’arrive pas encore à réaliser que j’ai fait cet exploit, a-t-il savouré dans la foulée sur RMC. Depuis que je suis tout petit, je pense à ce moment-là. Le parcours que j’ai eu dans ma vie, c’est ce qui m’a donné l'envie de me battre tous les jours, c’est aussi grâce à ça que je suis là aujourd’hui, je n’ai jamais rien lâché. J’étais cramé après la demi-finale. Dans ma tête, je me demandais comment j’allais faire. Les supporters, le staff, tout le monde est venu m'encourager, ça m'a donné beaucoup de force."

Dans cette catégorie des -60kg, l’équipe de France attendait une breloque olympique depuis 1980 avec Thierry Rey. Seize ans après, naissait le petit Luka Mkheidze. Très loin de la France, à Tbilissi, en Géorgie.

Dans un camp de réfugiés en Pologne

Dès l’âge de sept ans, poussé par son papa, le jeune Luka apprend le judo. Et rêve des exploits des judokas géorgiens. Le jeune homme est doué. A 12 ans, il devient champion de Géorgie. Mais sa vie bascule en 2009. Confrontée à la pauvreté, sa famille fuit la Géorgie. Direction la Biélorussie en avion, puis la Pologne en train où ils trouvent refuge sous une tente, dans un centre de réfugiés. "On nous donnait un sac de nourritures avec des conserves qu'on mangeait froides, racontait-il y a trois ans au Parisien. J'allais à l'école tout en pratiquant le judo mais au bout de 8 mois, notre demande d'asile politique a été refusée. Il fallait partir, de peur d'être expulsé et renvoyé en Géorgie."

Le coup de pouce d’Edouard Philippe

Grâce à l’aide d’un passeur, Luka Mkheidze et sa famille réussissent à passer en France en mars 2010. Ils atterrissent à Villeneuve-Saint-Georges, dans le Val-de-Marne. Puis, après avoir vécu pendant un an dans une chambre d’hôtel d'Athis-Mons, toujours en banlieue parisienne, il rejoint un autre centre de réfugiés au Havre où il découvre le "luxe" d’avoir des toilettes et une salle de bain. Sur les tatamis, il fait parler sa force. Mais le coup de pouce du destin intervient en 2015 grâce à un certain Edouard Philippe. L’ex-Premier ministre, alors maire du Havre (avant de le redevenir), a en effet facilité le processus pour que Luka Mkheidze obtienne la nationalité française. "Mon club de l'époque, le Judo Perrey Guerrier l'avait sollicité en tant que maire du Havre où j'habitais, pour qu'il appuie ma démarche, se souvient-il. D'habitude, ça prend beaucoup plus de temps mais après quelques mois, j'ai reçu une lettre d'Édouard Philippe à mon domicile m'avertissant que j'allais obtenir ma nationalité, un courrier officiel l'a rapidement confirmé."

Un peu plus tard, il a pu remercier Edouard Philippe de vive voix : "Je m'étais mis en tête d'intégrer l'équipe de France de judo et d'être sélectionné pour des Mondiaux… Le rêve se réalise. Merci Édouard Philippe!" Son ascension est en marche. Au club de Sucy Judo depuis 2016, il intègre l’Insep un an plus tard. Après une médaille d’argent aux Europe à Lisbonne, Luka Mkheidze va changer de dimension avec cette médaille olympique conquise à Tokyo. Une gloire méritée pour un destin hors-norme.

ABr