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JO 2024 : la pongiste chilienne "Tania" Zhiying Zeng à l'aube de ses premiers Jeux olympiques... à 58 ans

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Née en Chine, l'athlète chilienne "Tania" Zhiying Zeng avait fini par abandonner son rêve à l'âge de 20 ans. Aujourd'hui, elle témoigne aussi bien de sa joie que de sa "surprise" de le voir se réaliser sur le tard, elle qui va disputer, à Paris, ses premiers Jeux olympiques... à 58 ans.

Les Jeux olympiques regorgent de belles histoires. Celle de Zhiying Zeng, plus connue sous le nom de "Tania", en est assurément une. À 58 ans, la pongiste sino-chilienne s'apprête à participer à ses premiers Jeux olympiques.

"Je suis très heureuse, contente, surprise. Tous les jours, je vis ici, avec les jeunes. C’est plein d’énergie. Je crois que je suis jeune aussi! Je suis très heureuse. J’essaye de tout vivre au maximum", savoure-t-elle au micro de RMC Sport à J-2 de la cérémonie d'ouverture.

Malgré son âge avancé pour la discipline, la pongiste dit se sentir "très jeune", comme ses équipières et équipiers. "Mais bon, pour l’instant; ils sont beaucoup à me dire: 'Tu es entraîneuse? Non, je suis une joueuse!'", se marre la pongiste. "Je viens ici pour être compétitive, alors ont est égales, il n’y a pas de différence d’âge."

Aujourd'hui, elle ressent "beaucoup de fierté": la fierté d'être Chilienne et de "représenter (son) pays".

Une enfance au milieu des tables de ping-pong

C'est pourtant loin d'Iquique, sa ville d'adoption, que débute son histoire. Enfant, dans la province de Guangzhou, elle ne tarde pas à échanger ses premières balles. Sa mère est alors entraîneure, révèle-t-elle dans un entretien au Guardian datant du 10 juillet, et son pays tente de fabriquer les futurs champions de la disicipline. Les tables de ping-pong sont partout dans ses souvenirs de l'époque.

"J’ai commencé à 9 ans. À 11 ans, je suis entrée dans une école pour devenir professionnelle. Là-bas, tu peux devenir professionnel à 13 ans. Alors, presque toute ma jeunesse, je jouais", rembobine-t-elle. 

En 1986, elle a 20 ans. Tout change dans le microcosme du tennis de table: les raquettes bicolores entrent en piste et trahissent l'effet et la vitesse que la jeune chinoise met dans sa balle. Celle qui rêvait de défendre la bannière chinoise aux JO déchante.

Trois ans plus tard, le destin lui fait signe. Un compatriote expatrié au Chili lui suggère de venir donner des cours à des enfants dans un école. À ce moment-là, elle a quasiment laissé tomber le tennis de table. Zhiying Zeng finit par acquiescer.

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"Je ne savais même pas dire bonjour"

"Quand je suis arrivée au Chili, je ne savais pas parler espagnol, je ne savais même pas dire bonjour. Heureusement, beaucoup de gens très gentils m’ont aidée pour toutes les choses", relate Zhiying Zeng. Son prénom, les Chiliens peinent cependant à le prononcer. C'est alors qu'elle opte pour "Tania".

Sa carrière de coach ne s'étire pas dans le temps, mais la pongiste pose ses valises pour de bon au Chili. Elle s'investit dans le commerce de produits chinois et fonde une famille à Iquique. "Je me suis habituée à beaucoup de choses différentes, comme la nourriture chilienne, que j’adore", assure "Tania". Le Chili, pour moi, c’est mon pays."

La pongiste chilienne Zhiying Zeng en 2024.
La pongiste chilienne Zhiying Zeng en 2024. © RODRIGO ARANGUA / AFP

Au début des années 2000, elle convertit avec succès un de ses fils au tennis de table, lui qui ne jurait alors que par les jeux vidéo. Elle frappe quelques balles avec lui mais n'imagine même pas qu'elle pourrait un jour représenter le Chili en compétition.

La crise sanitaire rebat complètement les cartes. Zhiying Zeng investit dans une table de tennis de table et renoue avec ses premières amours. Sans même qu'elle ne s'en rende vraiment compte, la voilà inscrite à des tournois locaux, puis nationaux, et demain, internationaux.

En 2023, celle que l'on surnomme désormais "Mamie Tania" devient la pongiste la mieux classée du Chili. Personne n'y croyait vu son parcours et son âge. Un doux rêve d'enfance remonte à la surface: participer aux prochains Jeux olympiques.

Des JO déjà gravés dans sa mémoire

Coup dur en février dernier: elle n'est pas sélectionnée pour défendre les couleurs du Chili aux championnats du monde en Corée du Sud. "Tania" ne comprend pas bien pourquoi mais ne baisse pas les bras. Elle en a vu d'autres.

En mai, la 151e au classement mondial ressort le bleu de chauffe lors des tournois de qualification olympiques et décroche son ticket pour Paris. "C’est un rêve qui se réalise, un peu tard… mais il se réalise. (...) Tout le monde doit avoir un rêve. Il ne faut pas abandonner ton rêve à mi-chemin, il faut se battre pour lui", philosophe-elle auprès de RMC Sport. "Il peut se réaliser tard, ou tôt, mais il faut que ce soit toi qui provoque ton rêve."

 À 58 ans, "Tania" s'entraîne trois heures cinq jours par semaine. Pas plus, sinon son corps la ramène à la réalité de son âge, admet-elle. "Mon objectif? Gagner le premier tour. Je me prépare mentalement, je vais me battre avec tout ce que j’ai. J’espère que je vais pouvoir gagner, ça va être très difficile." 

Avant son entrée en compétition, samedi 27 juillet à l'Arena Paris Sud, place à la cérémonie d'ouverture des JO et son défilé d'athlètes sur la Seine. "Je vais essayer d’en profiter au maximum. Ma famille m’a dit de lever la main parce que je passerai à la télé. Ca va être immense, une belle surprise et un cadeau pour moi." Avant même qu'ils aient commencé, Zhiying Zeng en est convaincue: "Je ne pourrai jamais oublier ces Jeux, ils resteront avec moi toute ma vie."

Florian Bouhot et Edgar Groleau