La machine à remonter les temps

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Elle a traversé l’Atlantique par avion. Comme les 108 athlètes français, la "structureuse" des Bleus trône aujourd’hui à Whistler. Cette machine de 850 kilos (une tonne cinq avec les équipements) sert à préparer les skis des équipes de France de biathlon, ski de fond et épreuve de fond du combiné nordique. C’est d’ailleurs cette "structureuse" qui a grandement contribué aux médailles d'or de Jason Lamy-Chappuis et Vincent Jay.
Le principe est simple : elle dessine la structure des skis (le dessin sous la semelle) comme pour les pneus de voiture. Un travail d'orfèvre. Et l'orfèvre se nomme Johan Gauthier. Flanqué d’Erik Contoz, il s’exécute plusieurs heures par jours. Comme lors de la nuit de samedi à dimanche, quand il a dû travailler jusqu’à 3 heures du matin. Nous l'avons rencontré, alors qu’il travaillait sur l'une des paires que Vincent Jay a utilisée lors de la poursuite. « C’est l’un des facteurs de réussite », témoigne modestement le technicien.
Cette machine a coûté 85 000€, auxquels s’ajoutent 50 000€ pour l'amener à Vancouver et pour la placer dans un hangar loué à un Suisse et trouvé il y a… trois ans. Les deux techniciens ont déjà travaillé sur 111 paires de ski depuis le début des Jeux. Car chaque athlète de l'équipe de France part chaque matin avec cinq à six paires réglées différemment. Gauthier peut même en créer une nouvelle au dernier moment, le matin de la course si la météo l’exige.
Deux ans pour la maîtriser
La France n’est pas la seule à posséder ce savoir. Les Suédois et les Norvégiens ont initié le mouvement il y a une dizaine d’année. La France n’a embrayé qu’il y a trois ans. C’est d’ailleurs la première fois que la "structureuse" voyage avec les skieurs. Johan Gauthier a ainsi eu besoin de près de deux ans pour la maîtriser. Au début de chaque saison, il crée une cinquantaine de structures. Sans recette miracle, car tout s’apprend sur le tas. Une création digne d’un chef cuisinier : il crée des recettes et les teste ensuite sur la neige.
Et si les moyens ont enfin été débloqués, c'est aussi grâce à Raphaël Poirée qui avait regretté ce manque à Turin. Il y a quatre ans en Italie, le biathlète, désormais à la retraite, avait raté le titre olympique à cause d’une mauvaise glisse. Il n’est, hélas, aujourd’hui plus là pour en profiter.