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Pound : « Phelps ? Spécial mais pas bizarre »

Pound : "Phelps, c'est remarquable, spécial, mais pas bizarre..."

Pound : "Phelps, c'est remarquable, spécial, mais pas bizarre..." - -

L’ancien président de l’Agence mondiale antidopage, membre du CIO, le Canadien Richard « Dick » Pound, a remis la médaille d’or à Alain Bernard. Avec son franc-parler, il revient sur cette première semaine des Jeux à Pékin.

Dick Pound, l'Américain Michaël Phelps a une capacité à enchainer les courses qui est surhumaine ! N’êtes vous pas surpris (ndlr : 6 titres déjà, Phelps vise le record de 7 médailles d'or de Mark Spitz) ?
C’est remarquable. Ce que fait Phelps n’est pas un accident. Il était déjà très fort à Athènes il y a quatre ans, il a beaucoup progressé depuis. C’est vraiment spécial, c’est un peu come Mark Spitz.

Vous n’avez aucun doute ? La lutte contre le dopage aux Etats-Unis est-elle vraiment menée sérieusement ?
Peut-être pas aussi bien qu’en France, parce que la France est vraiment un pays leader dans la lutte antidopage. Comme tout le monde sait, il y a eu de gros problèmes aux Etats-Unis avec l’affaire Balco (ndlr : scandale du laboratoire américain au centre d’un système organisé de dopage notamment de l’athlétisme et du baseball américains qui a éclaté en 2003). J’espère que ça ne va pas toucher la natation. Mais on ne sait jamais.

Pourquoi les Etats-Unis ont-ils pris du retard dans la lutte antidopage ?
C’est un héritage de la Guerre froide entre les Etats-Unis et l’Union soviétique, où le dopage était une affaire d’Etat. Aux Etats-Unis, ce n’étais pas l’Etat mais rien n’a été fait pour « éviter » le dopage. Mais encore une fois, avec le scandale Balco, l’Amérique a tourné la page.

Quelle est votre avis sur la Chine ? Pékin est-il sincère dans ses déclarations contre le dopage ? Est-il facile de contrôler les athlètes chinois ?
C’est un pays difficile, mais une fois que les athlètes sont rassemblés en équipe nationale, les contrôles sont bien organisés. Le laboratoire accrédité par l’Agence mondiale antidopage est excellent. J’ai l’impression que les autorités publiques veulent que la Chine soit propre. On ne sait jamais, mais leurs athlètes sont indiscutablement parmi les meilleurs.

Pour parler des Jeux en général, ne pensez-vous pas que le gigantisme de ces Jeux à Pékin menace l’avenir des Jeux olympiques ?
Non. Il faut tenir compte de la taille du pays. La ville de Pékin, c’est deux-tiers de la population du Canada, mon pays. Les installations sont nécessaires, elles seront bien utilisées
après les Jeux.

Avant les Jeux, vous aviez déclaré que les Jeux olympiques étaient « au bord du désastre ». Vous disiez cela après le parcours chaotique de la flamme olympique dans le monde. Vous aviez demandé un audit. Où en sommes-nous ?
C’était une suggestion ferme à la commission exécutive du CIO. Le président Jacques Rogge a du admettre qu’il y a avait une crise. J’ai suggéré que la flamme olympique ne devait plus être promenée à travers le monde. C’est beaucoup de risques pour peu de gains. J’avançais l’idée qu’il fallait limiter le parcours de la torche à la Grèce et au pays organisateur. Cette idée a été reprise par beaucoup de gens au CIO, mais la commission exécutive n’en n’a finalement pas tenu compte.

Est-il possible d’imaginer des Jeux olympiques qui restent du sport et rien que du sport ?
C’est difficile avec 205 pays. Il y a toujours la possibilité que les Jeux soient invoqués par des politiques. Le CIO essaie d’éviter ce genre de choses, le boycott ou autre. Mais il faut admettre que c’est difficile de contrôler les hommes politiques.

La Chine a-t-elle fait ce que vous lui aviez demandé en matière de droits de l’homme, notamment concernant le Tibet ?
Il y a toujours la possibilité de progrès plus rapides, mais aucun pays ne reste sans changements fondamentaux après les Jeux olympiques. La présence de 204 pays, de touristes qui se mélangent avec les Chinois, qui comprennent que tout ce qui vient de l’Ouest n’est pas forcément le diable, tout cela contribue aux progrès réalisés par la Chine. Ces changements ne seraient pas arrivés si la Chine n’avait pas eu les JO.

Le rugby à 7, bientôt aux Jeux ou pas ?
J’ai rencontré le président d’International Rugby Board, le Français Bernard Lapasset, une dizaine de fois déjà à Pékin ! Plusieurs sports comme le baseball, le softball, le squash, le golf et d’autres sont en compétition avec le rugby pour entrer aux Jeux. On va décider à Copenhague, en octobre 2009.

C’est bien parti ?
C’est difficile à dire… Ça dépendra de la stratégie de chaque fédération…

Bon, qu’en est-il de la pétanque ?
(Un temps) La pétanque ? (rires) Et bien, comme on dit en anglais, c’est un « long shot » (un long combat)

C'est une mauvaise nouvelle ça, Dick Pound ! Plus sérieusement, les spécialistes disent qu’il n’y aura plus de nouveaux records après 2060. Les Jeux auront-ils encore de l’intérêt ?
Quand je regarderai la finale du 100m à Pékin, je regarderai d’abord la course et après le tableau de marques. Le défi, c’est la compétition.

La France a-t-elle des chances d’organiser des Jeux à l’avenir ?
J’ai été surpris que Londres ai gagné pour 2012. J’espère que la France va poursuivre ses efforts, parce que ce serait une grande réussite.

La rédaction-Bourdin & Co