
Un numéro vert pour les « balances » ?

L'ancien patron de l'Agence mondiale antidopage, membre du CIO, trouve l'initiative britannique d'instaurer un numéro vert pour les dénonciations de pratiques dopantes "intéressante". - -
Les Anglais mettent les bouchées doubles pour se doter d’un arsenal répressif en matière de dopage dans la perspective des JO 2012. L’existence d’une Agence antidopage indépendante fait partie du cahier des charges du CIO pour l’obtention des Jeux Olympiques, mais Londres veut aller plus loin. Les autorités d'outre-Manche prévoient l’activation d’un numéro vert « où chacun pourra dénoncer un sportif pour des faits supposés de dopage », a expliqué le président de l'Agence David Kenworthy. Avec cet outil, le ministre des Sports Gerry Sutcliffe s’est dit convaincu que « (son) pays sera en pointe dans l'antidopage ». Alors hotline pour les sportifs vertueux ou pour les « balances » ?
L’initiative britannique, une première dans le monde de la lutte antidopage, fait débat. Au rayon des partisans, l’ancien président de l’Agence mondiale antidopage (AMA), membre du CIO, le Canadien Richard Pound. « C’est une chose intéressante, a-t-il déclaré à RMC sport. Ça peut permettre aux athlètes, qui ont vent de pratiques de dopage, de faire part de leurs informations. Une dénonciation n’est pas synonyme de preuve, mais ça peut aider les autorités à cibler les contrôles inopinés. Ça vaut la peine d’essayer. »
Soit mais qu’en pense les intéressés, les sportifs ? Ronald Pognon, le sprinter français, ancien détenteur du record d’Europe en salle, a souvent eu maille à partir avec ses rivaux britanniques, pas nécessairement fairplay puisque certains sont tombés, à l’instar de Dwain Chambers et de Mark Lewis-Francis, dans les mailles des filets de la lutte antidopage. Alors, hotline Ronald ? « Ah non, non, certainement pas. Admettons que je vois quelqu’un se doper devant moi, je vais lui dire que ce n’est pas bien mais je ne vais pas appeler. Même si c’est un adversaire direct, franchement je trouve que c’est un peu dur. »
Autre réaction, également réservée, celle d’un des fondateurs du numéro vert, Ecoute Dopage, Dorian Martinez. « Quand on creuse, on s’aperçoit que les personnes qui accusent ont rarement des preuves, ça va être basé sur des éléments trop subjectifs. » Pour Martinez, cet appel à la dénonciation lancé par les autorités britanniques n’apportera rien au dispositif répressif : « C’est un effet de communication pour nous dire que Londres 2012 seront des Jeux propres. Cette hotline va être submergée d’appels de gens aux témoignages douteux. En termes de résultats, les bénéfices risquent d’être très faibles. »