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Championnats d'Europe de judo: comment Joan-Benjamin Gaba, révélation des JO 2024, est devenu l'homme à battre

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Quasiment inconnu il y a un an, le judoka de Chilly-Mazarin Morangis, Joan-Benjamin Gaba, a éclaté au moment des JO de Paris 2024 avec sa médaille d’argent en -73kg et son écot inestimable lors de la victoire face au Japon en finale par équipes. Il rêve maintenant de grands titres individuels. Mais beaucoup veulent son scalp.

Devant son public lors du tournoi de Linz cet hiver, l’Autrichien Samuel Gassner a célébré sa victoire au premier tour contre Joan-Benjamin Gaba comme on fêterait une médaille en grand championnat. Bras levés, effusion de joie… Il s’en doutait mais ce jour-là le Français a bien vu qu’il était devenu un scalp très recherché par les routiers du circuit de la fédération internationale. "Les adversaires n’ont pas le même regard sur toi", note "JB". "Ils savent que s’ils te battent ils vont marquer des points dans leur pays. Ils se transforment. Ils n’ont pas le même niveau que quand je les prenais avant."

Après cette compétition de reprise, huit mois après ses deux folles journées aux Jeux olympiques, le Francilien a regagné des couleurs au tournoi de Tbilissi (Géorgie). Une cinquième place au terme d’une journée où il avait retrouvé ses valeurs de combativité, de lutte pour chaque centimètre carré de judogi. En demi-finale, il a livré une bataille mémorable face au héros local Lasha Shavdatuashvili, champion d’Europe, du monde et olympique, pendant plus de dix minutes. Un match scellé sur un sasae tsuri komi ashi de "Shavda" dans un brouhaha monstre.

"Je ne suis pas loin d’arriver à mon niveau"

"Je me sentais mieux en Géorgie", avoue Gaba. "Ça va aller crescendo. Je ne suis pas loin d’arriver à mon niveau. Il me faut du temps pour récupérer ce niveau (des JO)." Avant Paris 2024, Gaba pointait autour de la 40e place mondiale de sa catégorie. Un classement qui lui valait des premiers tours très assaisonnés. Sa performance de juillet dernier l’a fait monter au 12e rang planétaire. Cet habitué des rôles d’outsider devient maintenant un premier rôle avec une place de tête de série comme sur ce championnat d’Europe. Il va maintenant défier des garçons qui sont à la place qu’il occupait il y a peu. "Ce costume ne me convenait pas, j’ai voulu en changer", appuie-t-il. Pas question de modifier sa mentalité entre le chasseur et le chassé.

"Je reste chasseur", pose-t-il. "Il y a des mecs que je veux battre."

La montée en puissance de Gaba avait commencé à l’automne 2023 avec une victoire aux championnats de France avant un acte de naissance à l’international avec une troisième place à l’Euro à Zagreb. Ce jour-là, il avait plié le reste de la concurrence française en -73kg et fait taire les sceptiques. La "mentalité Tony", ce mantra de la Génération Forces Spéciales que lui et son compère des -90kg Maxime-Gaël Ngayap-Hambou adorent répéter pour dépasser leurs limites.

Gaba n’a pas changé malgré la notoriété tombée sur lui au lendemain des JO. Ses amis n’ont vu aucun changement. Le garçon aime toujours le rap et le manga de boxe Hajime no Ippo. Il sait très bien qu’au judo, le moindre laisser-aller se payera cash sur un tatami de compétition: "Le judo c’est très difficile. Je ne vois pas comment on peut prendre la grosse tête. Il suffit de revenir sur le tatami et tu vas te rendre compte que tu n’es personne."

Ses résultats et ceux de Ngayap-Hambou ont tiré les autres membres des "FS" jusque-là dans l’ombre comme Arnaud Aregba (-81kg) et Maxime Gobert (-73kg) également sélectionnés pour cet Euro. Leader, exemple, Gaba est devenu un personnage important du judo français. Le kata-guruma (roue autour des épaules) qui a envoyé Hifumi Abe au pays des larmes s’est maintenant installé dans son judo. Il est devenu forcément davantage étudié qu’avant les JO. Il sera aussi attendu dimanche lors du par équipes dans lequel la France sera favorite et lui un pilier du collectif de six athlètes. La vie de Gaba a changé mais pas ses attentes. "Je fais le maximum pour ne rien avoir à me reprocher", conclut-il. Il est déterminé à ne pas rester l’homme des Jeux olympiques.

Morgan Maury