Le fabuleux destin des Manaudou

Laure et Florent Manaudou - -
Il plonge vers son propre destin olympique. Elle se tient la tête entre ses mains. Il touche en premier. Elle crie, pleure, saute sur place. Il passe au bord du bassin. Elle court, franchit la barrière en bas de la tribune. Et finit par l’attraper par le bras pour l’enlacer. L’image va faire le tour du monde. Laure Manaudou n’était là que pour lui, que pour ça. Pour l’aider, l’accompagner, quitte à négliger ses courses. Florent, son petit frère, est médaillé d’or aux JO. Vainqueur du 50m nage libre, huit ans après le sacre de sa sœur sur 400m à Athènes, une première dans l’histoire olympique de la natation. L’incroyable pari des Manaudou, faire les Jeux ensemble, devient un véritable conte, l’histoire d’une famille en or.
Il y a quatre mois, à Dunkerque, Laure et Florent se sont tous les deux qualifiés pour Londres. Ils s’y voyaient même avec Fred Bousquet, mais le chéri de Laure et père de leur petite Manon, échouait. « Avec Laure, c’est un rêve qu’on a fait ensemble il y a huit ans, quand elle a fait ses premiers JO à Athènes, expliquait alors Florent Manaudou. J’avais 13 ans. C’était une idée un peu floue parce qu’à cet âge, on ne sait pas si on va continuer à nager ou faire des études. En 2004, j’étais au plus bas dans ma jeune carrière. Ça faisait déjà dix ans que je nageais. C’est à ce moment-là que mon frère (Nicolas, ndlr) m’a repris, m’a conseillé pendant six ans. »
Nicolas Manaudou, l’entraîneur de la famille, a dirigé les séances de Florent et Laure, avant de les voir s’échapper brusquement, sans ménagement, pour d’autres horizons qu’Ambérieu. Le frère et la sœur se sont retrouvés à Marseille, au Cercle des Nageurs. En mars 2011, à l’occasion des Championnats de France à Schiltigheim, la progression de Florent participe même à la volonté de Laure de reprendre sa carrière. Il se qualifie pour les Mondiaux de Shanghai, elle se prépare à officialiser son come-back. La promesse d’Athènes leur parait réalisable.
Florent, en 2011 : « J’aimerais qu’on parle un peu plus de moi »
Elle est finalement plus compliquée à tenir pour Laure, qui peine à retrouver un niveau lui permettant de décrocher son billet. Et qui finalement, dernière de ses séries du 100m dos et du 200m dos, passera largement à côté de ses troisièmes JO. L’important était ailleurs. Restés à la maison, par crainte de ne pouvoir accéder tous les deux à la piscine olympique, les parents Manaudou, Jean-Luc et Olga, ont vu leurs enfants à la télé. « C’est magnifique, confie le papa des deux champions olympiques sur RMC. Laure, c’est le moment d’émotion après le titre. On connait leur attachement. »
Un lien qui a aidé Florent. « On a entendu beaucoup de conneries sur les brouilles de la famille Manaudou, dit Jean-Luc. Je sais pourquoi elle était à Londres. Je crois qu’elle a eu un rôle primordial pour Florent. Avec le palmarès qu’elle a, la savoir à ses côtés pour ses premiers JO et ses premiers pas sur 50m nage libre, c’est évidemment rassurant. Elle l’a conseillé sur l’environnement, la chambre d’appel, comment aborder une finale... Fred (Bousquet) lui a aussi donné des conseils. Laure a été plus que précieuse pour son frère et plus largement pour l’équipe de France. »
En sœur protectrice, en véritable modèle, après avoir elle-même ouvert la voie des podiums à la natation française. En juin 2011, Florent avait pourtant bien l’intention de sortir de son ombre. « Dans les journaux, on m’appelle encore le petit frère de Laure, regrettait-il alors en marge de l’Open EDF. J’aimerais qu’on parle un peu plus de moi. Mais quand j’aurai le même palmarès que ma sœur, ça sera un grand jour pour moi. Peut-être qu’un jour, ma sœur parlera de moi aussi. » Il souriait. Elle ne va plus arrêter de parler de lui.